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Étudiez le dispositif des lieux et les effets qu'en tirent le romancier et le cinéaste

Publié le 06/12/2019

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En 1721, Montesquieu construit ses Lettres persanes sur deux espaces éloignés et antithétiques. En 1782, Laclos bâtit son intrigue sur deux lieux relativement proches : Paris et le château de Mme de Rosemonde. Quels effets le romancier tire-t-il de cet agencement des lieux ? Dans quelle mesure ce mode de composition est-il chargé de significations symboliques ?

Les Liaisons dangereuses

Pierre-Ambroise-François Choderlos De Laclos

« 11 2 faible profondeur de champ.

Les scènes consacrées à la piété s'ouvrent sur le rituel lit urgique, mais un zoom arrière révèle la silhouette de l'hypocrite qui feint de s'amen­ der.

La « méthode » du libertin consiste à ne laisser aucune retraite possible.

Les lieux d'intim ité L' espace auquel conduisent les intrigues est natur ellement la chambre.

Fragonard a illu stré la symbolique érotique de la rencont re des amants avec Le Verro u, dont s' inspire Frears Au xvm • siècle, la chambre n'est pas synonyme d'intimité, mais dans Les Liaisons dangereuses, elle n'est plus un asile inviola ble.

Valmont fait irruption en pleine nuit dans la chambrette de son domestique, il épte par Je trou de la serrure les émois de Mme de Tourvel, il s'i ntroduit chez Cécile, clef dans la bouche, cliché à connotation sexuelle.

La chambre est le premier lieu, où les libertins s'apprêtent ; elle est le dernier, où les ébats amoureux introduisent le désordre, avec violence pour Cécile, cynisme pour Émil ie, passion pour la Présidente.

Seule la Marquise, revêtue de ses atours, règne sur un lit d'a pparat.

Ill.

Les lieux de communi cation Une arch ite ctu re corn lexe à l'ima Pour traduire à 1' écran l'intrication des proj ets de séduction, le cinéaste fait grand cas des lieux de passage.

Avec les valeurs de la plongée et de la contre-plongée, les escal iers sont le théât re de rivali tés entre Mme de Merteu il et Valmont : lorsqu 'elle exige la preuve par écrit, elle Je toise du haut des marches ; lorsqu 'elle lui souffle la lettre de rupture, ils descendent ensemble dans une égalité feinte.

Frears utilise la profondeur de champ à des fins parodiques : Valmont, embusqué, écoute ce qui se dit ou mime les intervenants.

Il aiguise la curiosité grâce au hors champ dans la scène de la fausse couche ; à chaque fois que la Marquise rejoint Belleroche, le boudoir est suggéré par les reflets dans le miroir.

Le ciné aste joue sur la fru stration et le désir.

Les corridors sombres et tortueux, arpentés la nuit par Valmont, entretiennent une atmos­ phère inquié tante.

Escaliers, couloirs, paliers, tout se charge de signif ications.

L' esp ace épistolaire Dès le générique, l'enveloppe se transf orme en missive et dévoile le titre.

Frears ponctue ses séquences de portraits à l'écritoire : émoi d'une Cécile en larmes après le viol, rigueur et simplic ité de la Présidente, maestria de la Marquise à son bureau.

L'a rtiste joue sur le parallélisme des perversions : Valmont se servant d'Émili e pour rédiger sa missive ; Cécile, de Valmont.

La lettre lue déf init un espace romanesque et film ique, selon qu'elle est lue en public ou en privé.

La tran smission du courrier, de Julie à Valmont, de Valmont à Cécile, de Valmont à Danceny, établit des corrélations entre les espaces.

Enjeu des liaisons, la lettre coordonne les espaces, les divise, inscrit une tension.

En central isant l'action au château, Laclos obtient un effet de concentration avec une économie de moyens qui fait songer à Racine.

La mise en scène de Frears accentue l'effet d'enf ermement : plus l'action avance, plus nombreuses sont les scènes in térieures.

À l'ima ge de Baja zet (1672), l'int rigue du roman comme celle du film tendent vers l'impasse et le huis clos.. »

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