Devoir de Philosophie

Le cinéma suédois

Publié le 13/05/2016

Extrait du document

Le cinéma suédois

Ils font donc primer leur penchant naturaliste : dans La Charrette fantôme (Sjôstrôm), l'image demeure réaliste malgré les surimpressions et effets de nuit ; dans Le Trésor d'Arne (Stiller), les mouvements d'appareil, étonnants pour l'époque, et le raffinement esthétique restent au service d'une intrigue violente et désespérée.

 

Ainsi le cinéma suédois trouve-t-il sa voie entre réalité et lyrisme, documentaire et esthétique, imposant un parcours alliant le baroque au romantisme.

 

Pendant la Première Guerre mondiale, les cinématographies allemande, française et italienne connaissent une éclipse bien naturelle, dont profite la Suède, à l'époque puissante et prolifique. Mais, dans les années 1920, le cinéma suédois va peu à peu perdre de son importance. Un mythe symbolise cette déperdition d'énergie.

compagnon Mauritz Stiller. Celle que l'on surnommera la Divine fera la carrière éblouissante que l'on sait (dont la célèbre Reine Christine), tandis que le malheureux Stiller sera écarté des plateaux.

Illustrant la traversée du désert du cinéma suédois, ce grand réalisateur ira mourir, à quarante-cinq ans, à Stockholm. À l'inverse, Sjôstrôm s'adaptera aux moeurs hollywoodiennes : La Lettre écarlate (The Scarlet Letter, 1926), avec Lillian Gish, est un succès. Puis il retourne en Suède, où il soutiendra les débuts d'Ingmar Bergman.

 

Repu et exil_

 

La crise économique, la reprise des autres pays européens et la toute-puissance d'Hollywood vont entraîner une léthargie profonde du cinéma suédois : certains réalisateurs (Erik Gustaf Edgren, Gustav Molander, Per Lindberg)

 

ne travaillent que pour le marché

 

intérieur, d'autres se reconvertissent dans le théâtre, et les comédiens et comédiennes ne font parler d'eux que lorsqu'ils exercent à l'étranger.

LA RENAISSANCE : INGMAR BERGMAN

Ingmar Bergman est un géant, dont l'œuvre dense et complexe a marqué l'histoire du cinéma de la seconde moitié du xx\" siècle. Né en 1918, fils d’un pasteur luthérien strict (« J'étais bloqué dans tous les domaines...

 

C'était vraiment le silence de Dieu », confiera-t-il dans son livre de souvenirs Laterna magica, paru en 1987), il s'enfuit, à vingt ans, pour faire du théâtre comme auteur et metteur en scène. Il écrit des scénarios pour le cinéma et réalise son premier film. Crise (Kris), en 1946. Soixante ans et quarante-quatre films plus tard, il est l'un des réalisateurs les plus connus au monde.

 

Des clés pour l'œuvre ?_

 

Résumer une telle œuvre est impossible. Du moins peut-on l'édairer de quelques oppositions fondamentales.

 

La première est celle du mystique

et du charnel, du cœur et du sexe.

 

Le Septième Sceau (Det Sjunde Inseglet, 1957) et Sourires d’une nuit d'été (Sommarnattens Leende, 1955)

illustrent bien ce balancement entre des angoisses fondamentales (Dieu, le bien et le mal) et les déchirements du couple, entre les scénarios de l'âme et ceux de l'incommunicabilité, entre l'austérité du premier et le libertinage poétique du second. Seconde dualité de l'auteur : la vie et sa transcription, l'inspiration autobiographique et l'aspiration à traiter de l'universel. À l'inverse de ses parents, désunis mais enchaînés par le refus du divorce, Ingmar Bergman mena une vie sentimentale pleine et agitée (quatre mariages et huit enfants), et ses liaisons avec ses interprètes principales irriguent son œuvre : Harriet Andersson (Monika, Sommaren med Monika, 1953), Bibi Andersson (Sourires d’une nuit d'été), Liv Ullmann (Persona, id., 1966).

« LA DIVINE GRETA GARBO Née à Stockholm en 1905, Greta Gustaf sson, vendeuse, puis modèle, tourne un petit film publicitaire pour une marque de chapeaux.

Elle est remarquée par Mauritz Stiller, qui lui confie un rôle dans La Légende de Costa Berling (Costa Berlings saga, 1924 ).

Rebaptisée Greta Garbo , la jeune actrice tourne en Allemagne La Rue sans joie de G.

W.

Pabst (Die freudelo se Casse, 1925), avant d'être appelée à Hollywood par Louis B.

Mayer, patron de la Metro-Goldwyn-Mayer, avec son Pygmalion et compagnon Mauritz Stiller.

Celle que l'on surnommera la Divine fera la carrière éblouissante que l'on sait (dont la célèbre Reine Christine ), tandis que le malheureu x Stiller sera écarté des plateaux .

du cinéma suédois, ce grand réalisateur ira mourir, à quarante­ cinq ans, à Stockholm .

À l'inverse, Sjostrom s'adaptera aux mœurs hollywoodiennes : La Lettre écarlate (The Scarlet Letter , 1926), avec Lillian Gish, est un succès.

Puis il retourne en Suède , où il soutiendra les débuts d 'lngmar Bergman.

REPLI ET EXIL La crise économique , la reprise des autres pays européens et la toute-puissance d'Hollywood vont entraîner une léthargie profonde du cinéma suédois : certains réalisateurs (Erik Gustaf Edgren , Gustav Molander, Per Lindberg ) n e travaillent que pour le marché intérieur.

d'autres se reconv ertisse nt dans le théâtre , et les comédiens et comédiennes ne font parler d'eux que lorsqu'i ls exercent à l'étranger .

LA RENAISSANCE : INGMAR BERGMAN lngmar Bergman est un géan~ dont l'œuvre dense et complexe a marqu é l 'h istoire du cinéma de la seconde moitié du X't siècle .

Né en 1918, fils d 'un pasteur luthérien strict(« J'étais bloqué dans tous les domaines ...

C'était vraiment le silence de Dieu », confiera-t -il dans son livre de souvenirs Laterna magica , paru en 1987 ), il s'enfuit, à vingt ans, pour faire du théâtre comme auteur et metteur en scène.

Il écrit des scénarios pour le cinéma et réalise son premier film, Crise (Kris) , en 1946.

Soixante ans et quarante-quatre films plus tard , il est l'un des réalisateurs les plus connus au monde .

DES CliS POUR L'ŒUVRE? Résumer une telle œuvre est impossible.

Du moins peut-on l'éclairer de quelques oppositions fondamentales .

La première est celle du mystique et du charnel, du cœur et du sexe .

Le Septième Sce11u (Det Sjunde lnseglet , 1957 ) et Sourires d'une nuit d'été (Sommarnattens Leende , 1955 ) illustrent bien ce balancement entre des angoisses fondamentales (Dieu, le bien et le mal) et les déchirements du couple, entre les scénarios de l'âme et ceux de l'incommunicabilité , entre l'austérité du prem ier et le libertinage poétique du secon d .

Seconde dualité de l'auteur : la vie et sa tran scrip tion, l'inspiration autobiographique et l'aspiration à traiter de l'universel.

À l'inverse de ses parents, désunis mais enchaînés par le refus du divorce, lngmar Bergman mena une vie sentimentale pleine et agitée (quatre mariages et huit enfants), et ses liaisons avec ses interprètes principales irriguent son œuvre : Harriet Andersson (Mo nika , Sommaren med Monika, 1953 ) , Bibi Andersson (Sourires d 'une nuit d 'été), Liv Ullm11nn (Persona, id., 1966 ).

Mais l'auteur transcende toujour s ses émotions intimes pour parler de l'être humain dans son essence et sa totalité.

Jamais guéri de son enfance (« à la fois idyllique et panique », en dira-t -il) et rongé par l'idée de la déchéance physique et de la mort , il en tirera un form idable album de souvenirs (Ftmny et Alex11ndre , Fanny och Alexander , 1982), dans lequel , à soixante-quat re ans, il évoq ue l'enfant de dix ans qu'il fut et qui, de son théâtre miniature, observe la comédie des adultes, leurs vérités et leurs mensonges.

Décidément peu avare de contradictions, Bergman avait moins de quarante ans lorsqu 'il réalisa le plus beau film qui soit sur la confrontation de l'enfance et de la vieillesse, de la vie et de la mort : dans Les Fraises sauvages (Smultronstollet, 1957), un vieil homme , le temps d'un voyage , revoit l'essentiel de sa vie et de son œuvre.

Ce n'est autre que Victor Sjostrom, père du cinéma suédois, qui signa là, à quatre-vingt-sept ans, sa dernière apparition à l'écran .

Bergman y glissai~ par l'image d'un corbillard sans cocher, un hommage à La Charrette fantôme.

Celle de la mort.

NOUVELLES VAGUES (1960-1970) La notoriété de Bergman ne doit pas faire oublier les problèmes que rencontre le cinéma suédois dans les années 1960 .

La production chute , passant de 40 films par an, en moyenne, pendant la Seconde Guerre mondiale, à 17 en 1962 , 12 en 1963.

Ces difficultés s'expliquent en grande partie par la concurrence de la télévision et parce que les films suédois s'exportent mal.

Une procédure d'aide à la création, voisine du systè me français , est alors créée par le biais de l'In sti tut suédois du cinéma : plus de vingt jeunes réalisateur s e n bénéficieront.

Parmi eux figurent les maître s de cette nouvelle vague : Jorn Donner, Vilgot Sjoman , Bo Widerberg, Mai Zetterlin g et Jan Troell.

Le premier , Jorn Donner , d'origine finlandaise, n'hésite pas à «tuer le père » en publiant un pamphlet anti­ Bergman .

Ses film s , Un dimanche de septembre (En sondag i september , 1963 ), Aimer (Att tilska , 1964 ) ou Anna (id., 1970 ) constituent des satires légères empreintes d'une franche sensualité .

Dans ce domaine, Vilgot Sjoman , romancier e~ lui, ami de jeunesse d 'lngmar Bergman , va frapper encore plus fort dans la négation des tabous et devenir l'homme scandale de sa génération .

Si La Maitresse (Aiskarinnan, 1962 ), avec Bibi Andersson etMIIXVOn Sydow , joue encore sur un registre classique, 491 (id., 1964) est un brûlot délinquance juvénile, tandis que Mo sœur mon amour (Sysko nbtidd 1792 , 1966 ) choquera en évoquant des relations incestueuses.

Dans ses deux films suivants, Sjôman évolue encore et fait sienne la rudesse du cinéma vérité : J e s ui S curieuse (Jag iir nyfik en-gu l, 1967) et sa suite, Je veux tout savoir (log iir nyfiken-bld, 1968 ), passeront à la postérité comme des manifestes de la liberté sexuelle revendiquée au grand jour .

Sur un mode provocant e t une forme un peu brute , Sjoman apparaît comme l'homme charnière, certes héritier de Bergman , mais rapidement suspect de roubl ardise commerciale.

À l'inverse, Bo Widerberg s'inscrit dans la lignée classique , comme s'il tendait la main aux grands anciens (Sjôstriim et Stiller) par-dessus Bergman.

Même s'il emprunte à la Nouvelle Vague française des procédés de tournage légers et une part d 'improvisation , son œuvre , puissante et grave , reflète les soubresauts de la société suédoise, dans un style naturaliste (Le Quartier du corbeau , Kvarteret Korpen , 1963) ou lyrique (Adalen 31, id., 1969 ).

Son cinéma engagé -et parfois moralisateur- sera mondialement reconnu (Elvira Madigan, id., 1967; Joe Hill, id., 1971 ).

Mai Zetterling s'est d 'abord fait un nom comme actrice dans les années 1950 , où elle tourne principalement aux États-Unis .

Passée à la réalisation avec Les Amoureux (/1/skande par , 1964) et surtoutleux de Nuit (Nattlek, 1966) , elle incarne un féminisme militant non dénué de baroquisme avant de se consacrer au documentaire tout en continuant sa carrière de comédienne .

À l'ori g ine chef opérateur- il a notamment travaillé sur Péché suédoi s (Barnvagnen, 1962 ) de Widerberg -, Jan Troell réalise son premier film en 1966 , Les Feux de la vie (Htir har du ditt /iv), une œuvre austère, exigeante , naturaliste, mais qui laisse deviner sa veine épique.

Il deviendra une star internationale avec Les Émigrants (Utv andrarna , 1971 ), puis Le Nouveau Monde (Nybyggarna , 1972 ), qui racont e l'arrivée en Amérique de paysan s suédois dans la première moitié du XIx' siècle.

UN DÉCLIN TRANQUILLE (1970-2005) L'HtCtMONIE AMtRICAINE Dan s les années 1970 , la Suède, comme les autres pays européens (France exceptée), subit l 'hégémonie des films américains sur le marché intér ieur , tandi s que la production nationale ne s'exporte plus et ne figure plus guère dans les compét ition s international es.

Cannes en est un bon reflet : mis à part 8o Widerberg, qui est devenu l'unique représentant de son pays (Ada len 31, Grand Prix du jury en 1969 ; Joe Hill , Prix du jury en 1971 ; Victoria, sélectionné en 1979 ), la Suède brille par son absence.

Chemin du serpent Ormens vag hal/eberget , 1987- est un chef-d'œuvre), sa disparition, L'tROTISME À LA SUtDOISE Le fameux érotisme scandinave repose sur une imagerie trompeus e.

Le naturisme (à la fois doctrine religieuse ancienne privilégiant les forces de la nature et pratique commune) n 'est pas plus sexué que la nudité au sauna .

Mais sa présence a toujours impressionné les pays latins alors qu'une morale farouchement luthérienne imprègne le cinéma suédois de la notion de péché .

Les premiers mélodrames , s'ils abordent la sexualité de façon frontale , condamnent sans appel les amours coupables.

Dans Les Proscrits, célèbre film de Victor Sjostrom (1918), le couple illégitime perd son enfant avant de se suicider.

En 1951 , Elle n'a dansé qu'un seul été (Hon dansade en sommar, Arne Mattsson), fameux pour une scène de bain au clair de lune, se conclut par la mort de la jeune coupable, maudite par un pasteur farouche.

À propos de L'Amant de Lady Chatterley (D.

H .

Lawrence), Bergman disait : «Voilà un roman sincère qui aura des milliers de lecteurs douteux.

» Une formule qui pourrait s'appliquer à nombre de ses films.

Qu'Il soit panthéiste et simplement érotique (MOIIIk•), joyeux (Sourires d'une nuit d'été), fantasmatique en 1989 , laisse la place vide : Jan Troell , après bien d'autres, s'est perdu à Hollywood .

Deux réalisateurs prennent aujourd 'hui une timide relève, qui viennent l'un et l'autre- signe des temp s -du clip et de la publicité.

Lasse Hallstrom , qui se fit connaître en 1979 avec un film sur le groupe Ab ba, puis avec Ma vie de chien (Mitt /iv som hund , 1985 ), a entrepris une nouvelle carrière américaine avec Le Chocolat (Chocolat, 2000), qui réunit Johnny Depp et Juliette Bino che.

Le plus original est sans dout e Roy Andersson , auteur de centaines de clips publ icitaires réputé s.

Il a fondé son propre studio à Stockholm , ce qui lui permet de tourner en toute liberté et en prenant son temp s : 4 films en vingt ans e t quatr e ans de tournage pour le dernier (Chan sons du deuxième étage , Sanger fran andra vaningen, 2000).

En écho et en guise (peut- être) de testament , lngmar B ergman a réuni de nouveau et trente ans plus tard ses interprètes de Scènes de la vie conjugale (Scener ur ett tiktenskap , 1973 ), Liv Ullmann et Erland Josephson.

Dans Saraband (2003), les deux com édiens retrouvent leurs personnages (Marianne et Johan, ce dernier ayant quatre-vingt- six ans comme Bergman) pour un nouveau tête-à-t ête désenchanté .

Entre violence et amour , désespoir , tendre sse et secrets inavouables, le réalisateur signe une nouvelle œuvre intimiste et limpide, annoncée comme ultime .

(La Source , Jungfruktillan, 1960), cru (Le Silence , Tystnaden, 1963) ou terrifiant (Cris et Chuchotements , Viskningar och rop, 1972), le sexe est omniprésent dans l'œuvre de Bergman.

En 1963 , Le Silence choqua beaucoup , aucune séquence n'ayant été coupée par la censure.

À l'ombre de ce libéralisme put alors fleurir une génération sans tabous, celle de Vilgot Sjôman avec 491 et surtout Je suis curieuse , qui fit un triomphe aux États-Unis et ouvrit la voie du cinéma X.

Alors, le label suédois devint synonyme d'érotisme, décliné sous les titres les plus vulgaires.

Pour les quelques films majeurs précédemment cités , combien de « Péchés suédois », de « Sensuellement suédoise » ou de « Suédoises au pensionnat» vinrent confirmer la phrase de Bergman à propos du roman de Lawrence .... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles