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Ce qui n'est pas clair n'est pas français (Rivarol)

Publié le 15/05/2012

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Le français était bien devenu, à la fin du xviiie siècle, la langue universelle. On le parlait à Berlin (Frédéric II) et à Saint-Pétersbourg. Après avoir expliqué le fait par le prestige de Louis XIV et de son siècle et l'hégémonie intellectuelle exercée au xviiie siècle par nos grands écrivains, Rivarol se demande quelles sont les raisons intrinsèques...

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« 156 SUJETS GtNtRAUX ET PENStBS direct, comme s'il était toute raison.

• Fénelon s'était moqué de la monotonie de la construction française : On voit toujours venir d'abord un nominatif substantif qui mène son adjectif comme par la main; son verbe ne manque pas de marcher der· rière, suivi d'un adverbe qui ne souffre rien entre eux, et le régime appelle aussitôt un accusatif, qui ne peut jamais se déplacer'.

Grâce aux désinences et aux inversions, les autres langues peuvent suivre l'ordre des sensations et des sentiments; la nôtre suit nécessairement l'ordre logique; elle règle et conduit la pensée.

Inférieur dans la poésie, le français triomphera dans la prose, qui est le langage de la raison.

2: A la discipline classique et au fravail de nos écrivains, qui, suivant les préceptes codifiés, mais non inventés par Boileau subordonnent tout au bon sens et à la raison.

D'Alembert prétend même qu'aucune langue, sans exception, n'est plus sujette à l'obscurité que la nôtre et ne demande dans ceux qui en font l'usage plus de précautions minutieuses pour être entendus 2 • Mais que cela soit dû au génie même de la langue ou à celui de nos écrivains, il est certain qu'au xvm• siècle, on n'écrit que pour être entendu, et non pour se libérer et exprimer les mouvements désordonnés de son âme.

Ce qui n'est pas clair n'est pas français.

3.

En est-il encore de même maintenant? La langue française s'est beaucoup modifiée depuis Rousseau et les Romantiques.

Elle s'est chargée de couleur et de passion.

Elle a voulu exprimer l'individuel et l'inexprimable.

Le voca­ bulaire s'est étendu : mots pittoresques, mots techniques, empruntés aux arts et aux sciences, etc.

Entre les mains des poètes, ils sont devenus non plus des signes conventionnels d'idées abstraites, mais surtout des moyens propres à toucher directement l'imagination et la sensibilité du lecteur.

La syntaxe s'est assouplie, suivant la logique du sentiment ou l'ordre des sensations.

Une nouvelle langue poétique s'est formée, très riche, très libre, très hardie.

Encore les Roman­ tiques et les Parnassiens ont-ils toujours eu le respect de la langue.

Mais Mallarmé, Claudel, Valéry? Dirons-nous qu'ils 1.

Lettre à l'Académie,· édit.

Cahen (Hachette), p.

65, 2.

Rivarol, édit.

Hervier (Delagrave), p.

90 (nole).. »

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