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Mes poèmes sont tous des poèmes de circonstance... Goethe

Publié le 01/10/2018

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moi avant de l’écrire. Des années de méditation y sont incluses et je m’y suis repris trois ou quatre fois avant de l’amener au point où elle est. » D’autres exemples du même type figurent encore dans les Conversations.

 

L’œuvre demande inspiration — l’esprit démonique, pour parler comme Goethe —, qui vient souvent au terme d’une longue maturation. Elle exige aussi du travail et les derniers mots du texte que nous venons de citer sont significatifs à cet égard. La « circonstance », au sens courant du terme, ne joue en l’occasion que le rôle d’un déclic. Goethe est bien loin, on le voit, d’un poète mondain rédigeant des impromptus pour le plaisir des dames. Simplement, il juge plus important de rendre la substance d’un coin du réel que de faire partager au lecteur les affres de son moi.

 

► Au « poème de circonstance » va être par la suite opposée la « poésie pure » qui tord le cou à la rhétorique et tire ses effets du simple agencement des vocables, mais certains auteurs comme Aragon vont réagir contre cette tendance à couper l’œuvre du réel et se réclameront de Goethe. Dans Chronique du bel canto (1947), Aragon répond à ceux qui se scandalisent d’une intrusion de la circonstance. Pour lui, le poème apparaît « non comme un arrangement arbitraire de mots, mais comme l’expression d’une époque, et d’une sorte d’homme dans cette époque...» D’ailleurs, dit-il, il viendra un jour où un critique nous apprendra que Le Cimetière marin et La Jeune Parque sont en fait des poèmes de circonstance.

 

Aragon va même plus loin, analysant le problème de la circonstance du point de vue du lecteur. Ainsi, un poème sur un homme en prison séparé de celle qu’il aime et obsédé par l’idée de la femme peut perdre de son actualité et donc de sa résonance dans une société paisible. Il se trouvera revivifié à la suite d’un chan-

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« Comme Reverdy le fera plus tard, il réfute la thèse selon laquelle certains sujets ne sont pas poétiques : «Qu'on ne dise pas que la réalité manque d'intérêt poétique; un poète fait ses preuves lorque précisément son esprit sait découvrir dans un sujet banal quelque chose d'intéressant.

La réalité doit fournir le motif,le point de départ, le noyau proprement dit; mais c'est l'affaire du poète d'en former un tout qui soit beau, animé.» ..,..

Ces remarques de Goethe ont suscité des débats qui se sont prolongés jusqu'à nos jours et que nous évoque­ rons plus loin.

Pourtant, quand on examine ces discus­ sions, on se rend compte qu'elles consistent à isoler la phrase étudiée ici de son contexte et à faire dire à Goe­ the autre chose que ce qu'il a vraiment dit.

Une lecture attentive des Conversations mettrait certainement tout le monde d'accord.

Le« poème de circonstance» n'est pas pour Goethe un poème improvisé dans le cadre d'un jeu de salon pour relever un défi ou faire plaisir à un invité.

Il peut arriver à Goethe de pratiquer cet exercice.

Ainsi Eckermann raconte qu'il écrivit deux vers pour remercier une dame qui lui avait apporté des cédrats et souhaitait de sa part un autographe.

Mais, quand il accepte d'agir ainsi, Goethe parle d'une «plaisanterie» et ce n'est pas à ce type de texte qu'il pense quand il parle à Eckermann de «poèmes de circonstance».

Goethe, répondant à Eckermann, pense à l'ensemble de ses œuvres poétiques.

Il veut bien faire comprendre à son interlocuteur la nécessité de garder le contact avec le réel et de se distinguer en cela de certains écrivains romantiques.

Si le poète n'est capable que d'exprimer sa propre subjectivité, il sera semblable à un chanteur n'ayant à sa disposition que quelques notes.

Si, au con­ traire, il est capable de ressentir le réel qui l'entoure et de l'exprimer, il sera pareil à un chanteur ayant à sa. »

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