Devoir de Philosophie

Claus Sluter vers 1340-1406 C'est dans le Moyen Âge le plus authentique que l'art de Claus Sluter plonge ses racines.

Publié le 05/04/2015

Extrait du document

Claus Sluter vers 1340-1406 C'est dans le Moyen Âge le plus authentique que l'art de Claus Sluter plonge ses racines. Sculpteur gothique, il l'est au plein sens du terme, et, bien entendu, sculpteur chrétien, homme de foi à l'égal des imagiers d'autrefois, et qui, par la conception religieuse du monde qu'il exprime, n'est pas à l'écart de son temps. Il le domine de sa haute stature, mais il fait corps avec lui. Une époque douloureuse, écartelée, vouée par la guerre à l'excès du malheur, se reconnaît dans ses figures tourmentées et, sur ce Moyen Âge finissant qui ne connaîtra plus la sérénité de naguère, le Calvaire de Champmol, avec son Christ exsangue et ses anges désespérés, se dresse comme un symbole. La valeur éminente, éternelle, de son art est là, dans cet accord profond, et non dans un " modernisme " qui, à vrai dire, n'apparaît pas. Sans doute a-t-il, par son génie, et pour plus de cent ans, redonné vie et élan à la sculpture française, mais il n'a guère innové. Ce qu'il a réussi, avec la maîtrise d'un talent hors de pair, d'autres l'avaient tenté avant lui. Sluter n'est pas de ces artistes qui bousculent une tradition pour ouvrir de nouvelles avenues. Il a seulement, et ce n'est pas diminuer son mérite, exprimé mieux qu'aucun autre, avec plus de force et de lucidité, les tendances de la civilisation de son temps. Il est vain de discuter de la nationalité d'un artiste, en un siècle où l'Europe chrétienne vit encore. Les Hollandais tiennent Sluter pour un des leurs, à juste titre car il est aujourd'hui démontré qu'il était originaire de Haarlem. Mais la France le revendique, non sans raison puisqu'un prince des fleurs de lys a, par sa magnificence, exalté son génie et que ses commandes lui ont donné l'occasion de se réaliser dans son ardente plénitude. A vrai dire, il appartient à cette Europe occidentale du XIVe siècle qui envoie, des pays du Nord où ils sont nés, vers les États capétiens, les meilleurs de ses artistes pour les mettre au service des mécènes les plus dignes d'utiliser leurs talents, Charles V et ses frères. La date de naissance de Claus reste inconnue et nous ignorons quel était son âge lorsqu'il donnait vie à tant de personnages pathétiques. On l'imagine volontiers, sur le chantier dijonnais, dans toute la force de sa maturité, entre quarante et soixante ans ; mais c'est là simple conjecture. Vers 1380, il travaille à Bruxelles, les archives en témoignent, et l'on a déjà mis en lumière le style véritablement slutérien des prophètes qui décoraient jadis le portail de l'hôtel de ville, conservés aujourd'hui au Musée communal. C'est à Bruxelles, sans doute, qu'il se fait remarquer par Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, au moment même où celui-ci hérite de son beau-père, Louis de Mâle, com...

« détruite aujourd'hui ; tournée dans les Flandres en 1395 pour y acquérir la dalle noire du tombeau.

Touché gravement par la maladie en 1399, il se remet pourtant, mais s'associe de plus en plus son neveu Claus de Werwe qu'il a fait venir de Hollande en 1396.

Pour se décharger des soucis matériels, il prend pension en 1404 à l'abbaye de Saint-Etienne, proche de son atelier.

Mais ce n'est pas là retraite d'un homme épuisé : il continue de diriger activement l' œ uvre du tombeau.

Aux derniers jours de janvier 1406, il meurt, suivant de près son maître disparu depuis 1404. La Révolution n'a pas réussi à nous priver de ses œ uvres essentielles.

Dans l'ancienne Chartreuse dévastée, le portail de l'église est encore debout et s'il est, dans sa partie générale, du dessin de l'architecte Drouet de Dammartin, la sculpture tout entière est de Claus Sluter, même la Vierge du trumeau qu'il installe sous un nouveau dais dans le courant de 1391.

Étonnante figure que cette Vierge qui semble, d'un mouvement vif et presque dansant, vouloir échapper au pilier qui la retient.

Mais elle reste dans la tradition du XIV esiècle : son attitude fortement hanchée, sa façon de porter l'Enfant sur la main gauche étendue, de tenir dans la droite une tige de lys aujourd'hui brisée, tout cela est conforme aux habitudes du siècle qui s'achève ; le vêtement même, en dépit d'une ampleur toute nouvelle et singulièrement expressive, s'arrange selon les conventions de l'âge précédent.

La Vierge reçoit l'hommage du duc et de la duchesse agenouillés, présentés par saint Jean-Baptiste et sainte Catherine.

Si grands qu'ils soient dans le monde, les voici l'un et l'autre humbles, à genoux, les mains jointes, et la différence de taille les fait apparaître comme dominés de haut par la sainteté de ceux qui intercèdent en leur faveur.

Et cela encore est d'esprit médiéval.

Les statues de saint Jean et de sainte Catherine, sculptées et mises en place en 1391, peu après celle de la Vierge, définissent la meilleure manière de Sluter : des vêtements épais, taillés dans ces étoffes flamandes, lourdes et opulentes, dont le duc de Bourgogne tirait la meilleure part de sa richesse, confèrent à l' œ uvre sculptée son pouvoir d'expression plus encore que les têtes, d'un caractère pourtant si marqué.

Ce sont les plis du drapé qui expriment la vie en accumulant les ombres dans les fonds, en laissant couler sur leurs multiples arêtes de grandes coulées de lumière.

Là est l'apport personnel de Sluter, et qui passera dans la sculpture française du XV esiècle.

Quant aux deux priants, dont les images étaient prévues dès le temps de Jean de Marville, ils vinrent s'agenouiller au portail en 1390 ou 1393.

Il est précieux pour nous d'avoir, de la main d'un tel sculpteur, le portrait, vers la cinquantaine, du premier duc Valois, du fondateur d'un État qui faillit devenir un royaume, du fils de roi qui gouverna la France pendant la minorité, puis durant la “ frénésie ” de son neveu Charles VI.

Les qualités éminentes de l'homme politique se lisent sur ce masque personnel puissamment modelé, et la fierté du prince qui, toute sa vie, sut imposer le respect dû à sa naissance.

Pour mutilé qu'il soit, le visage de Marguerite de Flandre apparaît de même comme un portrait merveilleusement véridique, celui d'une Flamande dans la plénitude de ses quarante ans, quelque peu épaissie par l'âge et les maternités, mais elle aussi de haut lignage et digne compagne d'un tel prince.

Il va de soi que des portraits qui atteignent à une si exacte ressemblance ne sont point, à cette date, chose nouvelle ; sans remonter jusqu'au gisant de Philippe III à Saint-Denis, rappelons qu'au moment même où Sluter travaillait, ou peu avant, un sculpteur inconnu agenouillait de même, sur le tombeau du cardinal La Grange à Avignon, les statues saisissantes de vie et de vérité du roi Charles VI et de son frère, le jeune duc d'Orléans.

Mais Claus Sluter va plus loin que tout autre dans la compréhension de ses modèles ; ses portraits ad vivum sont les plus pénétrants que le Moyen Âge nous ait laissés.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles