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Epicure par Victor Goldschmidt Maître de Conférences à la Faculté des Lettres de Rennes Peu de doctrines autant que l'épicurienne ont fait l'objet d'appréciations aussi divergentes.

Publié le 05/04/2015

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Epicure par Victor Goldschmidt Maître de Conférences à la Faculté des Lettres de Rennes Peu de doctrines autant que l'épicurienne ont fait l'objet d'appréciations aussi divergentes. Le paradoxe n'est pas qu'elle ait provoqué tant d'éloges et de blâmes, mais plutôt qu'elle justifie et les uns et les autres. " On trouve toujours dans cette doctrine, écrit un de ses meilleurs connaisseurs, je ne sais quoi d'étriqué et de mesquin qui arrête l'esprit au moment même où il est le plus disposé à l'admirer. " Ce contraste que V. Brochard découvre au coeur même du système se retrouve jusque dans le détail des thèses. Peut-être pourrait-on trouver dans l'opposition toute formelle entre éléments antiques et traits déjà modernes ce qui donne à l'épicurisme son caractère unique et irréductible. Les philosophes de l'Antiquité ne le prennent pas toujours au sérieux. Quand, vers le milieu du premier siècle avant notre ère, un Académicien s'efforce de mettre fin à l'anarchie et à la lutte des écoles par un syncrétisme largement ouvert, l'épicurisme est exclu de cette tentative de conciliation. En revanche, on a pu faire d'Epicure le précurseur de doctrines spécifiquement modernes, comme l'utilitarisme anglais ou le matérialisme marxiste. Ces rapprochements, jusqu'à un certain point, sont soutenables. Ils ne le sont sûrement pas jusqu'au bout, et en raison précisément de l'idéal antique que se fait Epicure du sage, vivant dans une indépendance entière et, en l'espèce, retiré de la société et se souciant fort peu des déshérités et des pauvres. Un des traits les plus modernes de cette philosophie est une certaine tonalité de bon goût et de raffinement que Nietzsche, qui y a été fort sensible, décrit dans une page qui mérite d'être citée : " L'Épicurien choisit lui-même la situation, les personnes, voire les événements qui conviennent à son caractère intellectuel, irritable à l'extrême ; il renonce à tout le reste, c'est-à-dire à presque tout, car ce serait pour lui une nourriture trop forte et trop lourde. Le Stoïcien, en revanche, s'exerce à avaler pierres et vermines, éclats de verre et scorpions sans faire le dégoûté ; son estomac doit finir par être indifférent à l'égard de tout ce qu'y déverse le hasard de l'existence... Pour des hommes soumis aux improvisations du destin, pour ceux qui vivent dans des époques violentes et qui dépendent de la brusquerie et de l'humeur changeante d'autrui, il se peut que le stoïcisme soit fort à recommander. Mais celui qui croit à peu près savoir que le destin lui permet de filer un long fil, fait bien de s'installer à l'épicurienne ; tous les hommes qui se destinent au travail intellectuel l'ont fait jusqu'ici Pour eux, en effet, ce serait la perte des pertes, que d'échanger l'irritabilité délicate contre la peau dure des Stoïciens, avec ses piquants de hérisson. " Le parallèle est joli, et l'essence intemporelle de l'idéal épicurien ne saurait être mieux vue. On ne chicanera pas sur l'idée de " travail " qui, à travers le stoïcisme, remonte à l'école cynique et qui, s'agissant du travail intellectuel, convient bien mieux aux activités scientifiques des disciples de Chrysippe qu'aux ...
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