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Le grand rationalisme par Maurice Merleau-Ponty Professeur au Collège de France Il faudrait appeler " petit rationalisme " celui qu'on professait ou qu'on discutait en 1900, et qui était l'explication de l'Être par la science.

Publié le 05/04/2015

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Le grand rationalisme par Maurice Merleau-Ponty Professeur au Collège de France Il faudrait appeler " petit rationalisme " celui qu'on professait ou qu'on discutait en 1900, et qui était l'explication de l'Être par la science. Il supposait une immense Science déjà faite dans les choses, que la science effective rejoindrait au jour de son achèvement, et qui ne nous laisserait plus rien à demander, toute question sensée ayant reçu sa réponse. Il nous est bien difficile de revivre cet état de la pensée, pourtant si proche. Mais c'est un fait qu'on a rêvé d'un moment où l'esprit, ayant enfermé dans un réseau de relations " la totalité du réel ", et comme en état de réplétion, demeurerait désormais en repos, ou n'aurait plus qu'à tirer les conséquences d'un savoir définitif, et à parer, par quelque application des mêmes principes, aux derniers soubresauts de l'imprévisible. Ce " rationalisme " nous paraît plein de mythes : mythe des lois de la nature situées vaguement à mi-chemin des normes et des faits, et selon lesquelles, pensait-on, ce monde pourtant aveugle s'est construit ; mythe de l'explication scientifique, comme si la connaissance des relations, même étendue à tout l'observable, pouvait un jour transformer en une proposition identique et qui va de soi l'existence même d'un monde. A ceux-là, il faudrait ajouter tous les mythes annexes qui proliféraient aux limites de la science, par exemple autour des notions de vie et de mort. C'était le temps où l'on se demandait avec enthousiasme ou avec angoisse si l'homme pourrait créer de la vie au laboratoire, et où les orateurs rationalistes parlaient volontiers du " néant " comme d'un autre et plus calme milieu de vie, qu'ils se flattaient de " rejoindre ", après celle-ci, comme on rejoint une destinée suprasensible. Mais on ne pensait pas céder à une mythologie. On croyait parler au nom de la raison. La raison se confondait avec la connaissance des conditions ou des causes : partout où un conditionnement était dévoilé, on pensait avoir fait taire toute question, résolu le problème de l'essence avec celui de l'origine, ramené le fait sous l'obédience de sa cause. La question entre science et métaphysique était seulement de savoir si le monde est un seul grand Processus soumis à un seul " axiome générateur ", dont il ne resterait plus, à la fin des temps, qu'à répéter la mystique formule, ou s'il y a, par exemple au point où surgit la vie, des lacunes, des discontinuités où l'on puisse loger la puissance antagoniste de l'esprit. Chaque conquête du déterminisme était une défaite du sens métaphysique, dont la victoire exigeait la " faillite de la science ". Si ce rationalisme-là est pour nous difficile à penser, c'est qu'il était, défiguré, méconnaissable, un h&...
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