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ARISTOTE

Publié le 02/04/2015

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ARISTOTE

Né en 385 av. J.-C. à Stagire, mort en 322 à Chalcis. Fils d'un médecin du roi de Macédoine, il sera le précepteur d'Alexandre le Grand. Élève de Platon à l'Académie, de 366 jusqu'à la mort de ce dernier, il fonde par la suite sa propre école (le Lycée) qui, à sa mort, perd son importance, concurrencée par les Épicuriens et les Stoïciens. Ce n'est qu'en 60 av. 1-C. qu'Andronicos de Rhodes publie des notes de cours, et rassemble divers traités qui, dans les premiers siècles de l'ère chrétienne, sont l'objet de nombreux commentaires. La décadence de l'Empire romain entraîne une autre éclipse, et c'est vers le milieu du Xllle siècle que la totalité de rceuvre devient accessible en latin, traduite en partie de l'arabe, les textes grecs étant souvent introuvables. Saint Thomas fera de l'aris­totélisme la doctrine officielle de l'Église ; la pensée moderne — Descartes, Galilée — s'établira contre elle.

L'oeuvre d'Aristote touche de nombreux domaines. On a rassemblé les traités qu'il a consacrés à la logique, sous le titre d'Organon (instrument) ; les Catégories concernent les termes, l'Interprétation, la proposition, les Premiers Analytiques, le raisonnement, c'est-à-dire le syllogisme, les Seconds Analytiques, la méthodologie scientifique, les Topiques, les méthodes de discussion et leurs points nodaux ; les Réfutations sophistiques élaborent les moyens de réfuter les faux arguments ou éristiques. La Physique établit les principes généraux de la connaissance des êtres constituant le monde ; l'étude Du Ciel, Des Météores, De la Génération et de la Corruption, Des Parties des animaux, de nombreux petits opuscules sur la biologie, et dans une

certaine mesure, le Traité de l'âme, développent ces recherches. L'Éthique, dite à Nicomaque, la Politique, la Rhétorique, la Poétique,

prennent pour thème l'activité humaine.

1.   Platon établit la certitude de la connaissance en séparant le monde intelligible du monde sensible ; mais si par l'affir­mation d'un monde des idées transcendant, on sépare l'Idée du sensible, comment pourra-t-elle le rejoindre, et par là fournir l'intelligibilité du monde ? Aristote fait l'économie du monde des Idées : l'intelligibilité est immanente au sensible. Le monde est constitué de substances ; est substance, soit la matière, soit la forme, soit le composé des deux. La forme, c'est en chaque être la marque de l'univer­salité (la forme de chien est ce qui fait que tout chien est un chien), la matière, celle de la particularité ; la forme est donc pour chaque être le principe de son intelligibilité.

Il y a une hiérarchie des êtres depuis la matière indiffé­renciée et inconnaissable, parce qu'informelle, jusqu'à Dieu, forme pure ; cette hiérarchie correspond aux différents degrés de l'intelligibilité, c'est-à-dire pour chaque être au rapport de sa forme à sa matière ; seule la forme pure est parfaitement intelligible. La dichotomie platonicienne entre deux mondes extérieurs l'un à l'autre, le sensible et l'intel­ligible, se transforme en une dualité intra-mondaine. Le monde d'ici-bas, ou sublunaire, est composé d'êtres éphémères qui sont à la fois matière et forme ; il est changeant, et les phénomènes s'y succèdent, non selon une nécessité absolue et rationnelle, mais selon une contingence telle que nous ne pouvons connaître que ce qui se passe le plus souvent. En s'élevant depuis la terre, masse sphérique située au centre du monde, vers la voûte céleste, on passe continûment du monde sublunaire au monde supralunaire. Les êtres y comportent moins de matière ; ils n'évoluent pas ; et s'ils se meuvent, c'est selon un mouvement circulaire qui ne les fait pas changer de lieu. A la périphérie du monde, il y a Dieu qui, dans sa perfection, est immobile et éternel ; dépourvu de matière, il est forme pure, c'est-à-dire pure pensée. Dans sa pureté, la pensée ne peut avoir que soi-même pour objet ; Dieu est pensée de la pensée. L'intelligibilité n'est donc pas seulement présente en chaque être, elle est aussi le principe du monde.

2.   Pour Platon, l'âme est ce qui permet la connaissance ; elle garde ce rôle pour Aristote, mais se trouve définie autrement. Elle est le principe des vivants ; simplement végétative, elle explique la nature des plantes ; si de plus elle est sensitive, celle des animaux ; si elle est intellective, celle de l'homme. Il n'y a pas d'âme sans corps, seule cette partie de l'âme humaine qui constitue l'intellect est peut-être éternelle ; l'âme correspond à une fonction organique, elle est la forme d'un corps vivant.

L'intellect humain est apte à recevoir la forme des choses que lui transmet l'âme sensitive ; qui ne sent rien ne peut penser, et on ne pense pas sans contact avec le monde (1). L'ordre dans lequel les choses viennent à notre connaissance n'est pourtant pas l'ordre du réel. Nous commençons dans la confusion du pluralisme des individus; pour saisir l'universel par induction, nous remontons des effets aux causes. Mais on ne connaît vraiment que lorsque l'on sait l'enchaînement et la nécessité des causes, que reproduit le raisonnement en enchaînant les syllogismes d'après Jes premiers principes. L'ordre des sciences est celui de l'Etre, c'est une suite de matières comme une suite de raisons. Il y a trois types de science : théorique, pratique et poétique ; le premier (théologie, physique et mathématiques) est pure contem­plation ; le second (éthique, politique) vise l'activité humaine dans la mesure où les causes sont inhérentes à l'homme et ont pour but la perfection de l'agent ; le troisième traite aussi de l'activité humaine, dans la mesure où il s'agit d'une production d'objets externes par l'art.

3. Les êtres physiques (naturels) sont les êtres qui ont en eux-mêmes le principe de leur changement ; le changement peut affecter la qualité, la quantité, le lieu, voire l'être lui-même (génération et corruption). Tout changement se fait à partir de quelque chose vers quelque chose, et suppose un sujet qui demeure identique ; il a donc trois principes : la propriété initiale (ex. : le blanc), la propriété finale (ex. : le rouge), et la matière qui reçoit ces propriétés (ex. : l'homme blanc qui devient rouge). La matière qui possède une forme a une propriété, mais pour changer, elle doit être apte à en recevoir une autre ; Aristote dit que cette dernière est en puissance dans la matière avant d'être en acte. La matière est donc puissance, et la forme acte (c'est pourquoi Dieu est dit « acte pur «), et le changement est « l'acte de ce qui est en puissance en tant que tel «.

Le changement de lieu ne s'effectue pas dans un espace et un temps homogènes : l'espace n'est que la limite externe du corps, son lieu, il n'existe qu'avec lui, et le temps n'est que la mesure du mouvement selon l'antériorité et la posté­riorité. Aristote ne peut donc jamais poser le concept de vitesse, v = e/t, il est obligé de comparer des mouvements de durées égales sur des espaces inégaux ou de durées inégales sur des espaces égaux, pour dire quel est le plus lent ou le plus rapide. Sa physique est entièrement qualitative (2), non mathématisée ; ses deux principales lois sont : la force doit être supérieure à la résistance, et la rapidité d'un mouvement est proportionnelle à la force et inversement proportionnelle à la résistance du milieu.

Les corps ont des lieux correspondant à leur nature : le centre du monde (la terre) pour les corps lourds, le ciel pour les légers ; tout mouvement qui tend a écarter un corps de son lieu naturel est forcé ou contre nature. Le mouvement doit avoir une cause : le « moteur « est la cause du mou‑

vement du mobile. En cherchant la cause de chaque mou­vement, on est conduit dans une régression qui ne peut prendre fin que par la position d'un premier moteur, immobile : la physique donne lieu à une preuve cosmolo­gique de l'existence de Dieu.

4. L'éthique comme science repose sur la différence entre la pratique (praxis) et la poétique (poiêsis). Mais la distinction est assez floue, et Aristote use d'exemples techniques (méde­cine, navigation, etc.) pour faire comprendre que chaque activité tend vers un bien qui est sa fin ; ces biens sont divers : la santé pour la médecine, le vaisseau pour la construction navale, etc. Le problème est alors de déterminer la fin dernière de l'homme, celle par rapport à laquelle toutes les autres fins seraient des moyens.

L'unité des fins humaines, c'est le bonheur. L'homme heureux sera celui, qui, semblable à Dieu, se suffit à soi-même, à qui il ne manque rien ; mais le bonheur dépend aussi des conditions externes : le pauvre ou le laid ne peuvent être ni complètement heureux ni tout à fait vertueux. La vertu est une disposition stable et acquise de la volonté ; elle est définie objectivement comme milieu entre un excès et un défaut (le courage est le milieu entre la lâcheté et la témérité), mais la détermination de ce milieu est subjective (ce qui est courage, pour quelqu'un, dans telle circonstance, est témérité pour un autre, dans d'autres circonstances). Le bonheur humain n'est pas seulement question de vertu individuelle ; l'homme est un animal poli­tique ou communautaire : la cité est pour l'homme une exigence inscrite dans son essence ; sa fin n'est pas de vivre, mais de bien vivre, c'est-à-dire de mener une vie parfaite. La morale aristotélicienne ne peut donc s'achever que dans la théorie politique de cette vertu qu'est la justice ; coextensive à l'amitié qui, si elle n'est pas vertu, ne va pas sans vertu, la justice est à la fois l'excellence de l'homme et l'excellence des relations interhumaines.

·      L'oeuvre d'Aristote n'est pas séparable d'une tentative de totalisation du savoir ; puisant à toutes les sources — étant par là le premier historien de la pensée — il accomplit une synthèse délimitant les thèmes et fixant le vocabulaire de la philosophie. Cette dernière est conçue comme la connais­sance vraie du monde lui-même ; toute science, définie par un certain objet, c'est-à-dire un certain type d'être situé en un lieu du monde, est une partie de la philosophie. De même qu'il y a une hiérarchie des êtres, il y a une hiérarchie des sciences ; la physique par exemple n'est qu'une philosophie seconde. Qu'est-ce donc que la philosophie première ? L'éditeur d'Aristote a groupe, sous le titre de Métaphysique, parce que dans l'ordre d'édition ils sont situés après la physique (méta = après), un ensemble de traités consacrés à cette question. La philosophie première cependant n'est pas

bien déterminée ; Aristote en parle comme d'une science « désirée « ou « recherchée «. Il la définit parfois comme la science des premières causes et des premiers principes ; Dieu étant le premier principe, elle est aussi théologie. Parfois, il affirme qu'elle est la science de « l'Être en tant qu'Être « ; elle serait ontologie. Mais l'Être se dit de façons multiples ; dans les Catégories, Aristote montre que l'Être peut se dire de la substance, mais aussi de la quantité, de la qualité, etc., c'est-à-dire de tous ces prédicats les plus généraux qui constituent les genres suprêmes. Dans ces conditions, comment peut-il y avoir une science unique de l'Être ? Pour Heidegger, Aristote hésite entre deux positions : faire de la métaphysique la connaissance de la totalité de ce qui est (l'étant) ou en faire la connaissance de ce qui en chaque Être fait qu'il est un Etre. Le problème de savoir ce qu'est la métaphysique pose celui de l'unité et de la cohérence de l'aristotélisme et, de façon générale, celui de la définition de la philosophie.

1. Voir empirisme.

 

2. Voir Gaulée.

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