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pas quoi lui offrir, et puis j'ai eu cette idée !

Publié le 06/01/2014

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pas quoi lui offrir, et puis j'ai eu cette idée ! Brillante. J'ai fait nettoyer les lieux avant-hier. J'ai même fait combler la piscine. Trop dangereux pour les enfants. Ma fille est enceinte, vous comprenez, ajouta-t-il le plus naturellement du monde. Et elle adore vos matières et vos coloris, monsieur Gordon. Ce dernier n'en doutait pas mais il s'inquiétait, tout comme Yvan, de connaître les délais. Sir John se racla la gorge. -- La cérémonie nuptiale a lieu dans quinze jours. Est-ce un souci ? C'en était un, et pas des moindres. Quinze jours pour meubler intégralement cinq cents mètres carrés tenait du miracle ou du sadisme, tout dépendait du point de vue. Apparemment, le commanditaire avait le sien. Celui d'un papa qui voulait voir sa fille monter dans un carrosse d'or tiré par douze paires de licornes... Trevor Gordon n'était pas d'accord, mais l'illusion faisait partie de son métier. Il consentit à ce challenge avec un léger rictus. Yvan, lui, était comme anesthésié par l'ampleur du chantier. Mais son rôle l'exposait moins que celui de Gordon. Sir John, satisfait de leur accord, fit un geste à la fois théâtral et militaire. Il ouvrit les bras et harangua la troupe. -- Je n'aurai qu'un mot, messieurs, ou plutôt trois : lumière ! magie ! luxe ! Et ne me parlez pas de budget, s'il vous plaît, je n'ai qu'une fille ! Puis il tourna les talons et disparut dans l'escalier qui menait à l'étage. Yvan et Trevor avaient déjà travaillé pour des excentriques, mais celui-ci avait une notion très personnelle du calendrier. Il leur demandait de livrer pour la veille la commande du lendemain. S'organiser en rapport. Yvan avait son idée pour les tableaux et certains objets qu'il savait disponibles sur le marché. Trevor et lui feraient le point chaque jour, par e-mail ou visioconférence. Yvan réussit même à avancer son vol de retour, impatient qu'il était de regagner Paris où l'attendaient « leurs » recherches. Il s'aperçut qu'il venait d'associer spontanément Marion à son enquête sur les mystères du dossier Salamandre. Car Marion l'attendait aussi. Il n'en doutait pas, et cette idée lui fit esquisser un pas de claquettes dans les galeries du Victoria and Albert Museum qu'il s'était promis de revoir avant son départ. Le surlendemain, alors que les portes de l'ascenseur s'ouvraient à l'étage de son appartement parisien, il trouva sa voisine devant sa porte. Elle aussi était rentrée de voyage. L'octogénaire l'accueillit avec un sourire embarrassé. -- Bonsoir, monsieur Sauvage, encore ce fichu compteur qui fait des siennes... Je me suis permis d'aller sonner chez vous, mais vous n'étiez pas là. Yvan la remercia de s'en être soucié, mais, une fois chez lui, il s'en étonna. Il était donc si discret que son absence ne se remarquait même pas d'un logement mitoyen au sien ? Les cloisons étaient pourtant minces. Ou alors la vieille dame était sourde, mais il ne s'en était pas aperçu dans leurs échanges. * Dans son atelier, Jane sculptait sans parvenir à se concentrer sur son travail. Son regard se portait sans cesse vers la pendule. Le cadran indiquait vingt-trois heures quinze et Marion n'était toujours pas rentrée. Elle ne lui avait pas laissé de mot et le téléphone n'avait pas sonné. Depuis plusieurs jours, Jane la sentait distante. Un certain malaise s'était installé entre elles depuis que Jane avait failli se faire surprendre par sa nièce alors qu'elle se tenait dans sa chambre. Quand le bruit de la porte d'entrée l'avait alertée du retour inopiné de Marion, Jane s'était précipitée vers le couloir et, devant sa nièce, avait prétexté qu'elle avait eu à chercher un vase partout dans la maison. Elle lui avait parlé d'une voix qui n'était pas naturelle et trahissait certainement la gêne qu'elle éprouvait à cet instant, mais Marion n'avait pas relevé. Elle avait regagné sa chambre, refermant la porte derrière elle. La jeune fille avait évité de trop s'interroger sur cet incident. Elle avait une confiance absolue dans sa tante et ne voulait pas qu'un doute s'insinue entre elles. Il n'empêche, elle avait pris davantage de précautions. Elle avait besoin de s'isoler. Ce matin-là, l'amie qui lui avait donné rendez-vous à la fac lui avait appris qu'elle était enceinte. Le bébé devait naître en janvier prochain. Marion était rentrée précipitamment, bouleversée par cette nouvelle. Le bonheur manifesté par la future mère avait rouvert un abîme. Marion essayait d'être une femme normale, et une femme avait la possibilité de donner la vie. Mais elle n'était pas normale. Trop d'angoisses l'inhibaient. Elle était incapable de se projeter au-delà du combat qu'elle menait pour ne pas sombrer. Par moments, exister, simplement exister mobilisait toute son énergie. Elle avait cru trouver le remède au retour de son périple en Amérique latine. Lors d'une soirée dans une villa de Baltimore, des joints avaient circulé, l'alcool coulait à flots, Marion avait fait des mélanges hasardeux. Nauséeuse, elle était sortie respirer dans le jardin. Un garçon l'avait rejointe alors qu'elle était affalée dans l'herbe. Ils avaient bavardé, puis elle lui avait demandé d'aller lui chercher à boire. Il lui avait répondu qu'il avait mieux à lui proposer. Elle avait d'abord dit non, elle n'avait jamais touché à ça. Mais le dealer savait s'y prendre, elle avait fini par céder. Tout était si confus alors dans sa vie ! Elle n'avait pas trouvé ça « divin », comme il le prétendait, mais ça ne lui avait pas déplu. Elle en avait repris, ne consommait que dans ses sorties. La coke la rendait légère sans qu'elle ait besoin de forcer sur l'alcool. Puis elle avait plongé un temps, sa dose quotidienne la gardait en paix. Elle pouvait se la payer sans problème. Jusqu'à ce jour où elle s'était aperçue qu'il lui fallait augmenter, augmenter sans cesse cette dose pour tenir la distance. De perdre ainsi le contrôle d'elle-même l'avait paniquée. À son arrivée à Paris, elle sortait de sa première cure de désintoxication. Elle avait rechuté à la rentrée de Pâques, quelques semaines avant de se présenter à Yvan, à la fin de son cours. Depuis, elle essayait de limiter sa consommation. Mais elle se savait vulnérable, très vulnérable. Et d'apprendre la nouvelle de cette maternité l'avait à nouveau jetée dans le puits... Depuis sa découverte, Jane ne savait plus comment s'y prendre avec sa nièce. Elle se sentait coupable d'avoir violé son intimité et coupable de ne rien faire pour l'aider. Elle se rassurait comme elle le pouvait : Marion ne montrait aucun signe d'accoutumance à cette drogue. Mais Jane était naïve sur ce point. Chez sa nièce, la cocaïne servait d'abord à sauver les apparences. 18 L'achat de matériel photo constituait le premier poste des dépenses dans sa comptabilité. Mais aujourd'hui Eddy Lopez était armé des meilleures optiques, des boîtiers reflex les plus performants du marché, capables d'emprisonner le moindre photon et d'offrir un rendu stupéfiant de précision. Eddy avait ses fournisseurs. C'était un client qui savait ce qu'il voulait et ne regardait pas à la dépense. -- Salut, Eddy, deux fois cette semaine ? Laisse-moi au moins le temps de réceptionner mes commandes ! -- Je te rapporte le 100 Macro 2.8 que j'ai acheté il y a une quinzaine de jours. Je voudrais que tu me fasses une reprise pour passer au modèle supérieur dans sa version L IS. -- Excellent choix. Nos tests l'ont classé en tête des nouveautés du mois. Eddy faisait partie d'un club photo amateur depuis deux ans. Il s'était bâti une solide réputation auprès de ses membres. Il épluchait la presse spécialisée et la documentation technique. Il développait lui-même ses diapos couleur quand il ne travaillait pas en numérique. Il avait racheté les machines à un ancien labo. Le président du club, un instituteur à la retraite qui ne jurait que par l'argentique et le noir et blanc, sollicitait souvent ses conseils. -- Tes portraits et macros sont vraiment exceptionnels, Eddy, lui serinait-il à chaque réunion. C'est quand même dommage que tu ne t'intéresses pas davantage aux paysages. Tu ferais des merveilles. Eddy haussait les épaules. Son sujet favori, c'étaient les natures mortes.   En cette chaude soirée de juin, tandis que ses voisins dînaient dans leur jardin, près du barbecue, Eddy Lopez s'était enfermé dans son garage transformé en studio. Il se régalait d'être seul, tranquille, à trier ses planches et à disposer ses tirages autour de lui. Deux ou trois heures de travail l'attendaient, après quoi il rejoindrait Morphée. Celui-là se faisait souvent attendre. Dans ses insomnies, Eddy laissait défiler des images dans sa tête, en imaginait d'autres, ses fantasmes n'avaient pas de limites. Il se remémorait des scènes, des gestes, des postures, se repassait le film dans un émoi grandissant. Là, les photos de ses victimes s'étalaient à ses pieds. Eddy les sortait de ses classeurs et grinçait de plaisir à chaque redécouverte. Pourtant, il avait l'impression d'avoir fait cent fois le tour de sa collection. Il aimait capter l'effroi et la douleur dans le regard de ses victimes. L'instant où elles se voyaient condamnées à mourir le fascinait. La peur transfigurait leurs visages. Une peur viscérale, animale, qui les liquéfiait. Ça le faisait jouir. Il avait peaufiné le scénario, enregistré les gémissements et les pleurs, et tous ces bruits organiques, cette débâcle qui s'emparait de l'être humain devant sa mort. Mais la pulsion scopique l'emportait. Il lui fallait visualiser les supplices, saisir le reflet du moment crucial. Les albums tirés de l'armoire métallique répandaient leur contenu morbide dans tout le local. Il ouvrit son PC et logea une clé USB dans l'une des sorties. L'imprimante laser se mit à vomir de nouveaux clichés. À genoux, il fouillait maintenant ce fatras pour extraire ses photos préférées, les disposer comme les pièces d'un puzzle géant. Sa respiration s'accélérait, son pouls battait plus fort et ses gestes devenaient convulsifs. Il se couchait alors sur ce monstrueux damier, et, au paroxysme de l'excitation, répandait sa semence sur les visages à l'agonie. Mais ce n'était qu'un exutoire. L'envie le reprenait d'enrichir sa collection de nouveaux trophées, d'explorer la terreur chez des proies toujours plus jeunes et plus tendres. Un flash surgit dans son esprit. La vision fugace de cette petite pute qui l'avait entrepris l'autre jour à Chambord. Ce cou juvénile le faisait baver. Il savait qu'il le reverrait. Un bon plan que lui avait offert son employeur. Servi sur un plateau. Bon, il avait le job à faire, mais personne ne l'empêcherait de prendre sa part s'il le méritait.

« arrivée àParis, ellesortait desapremière curededésintoxication.

Elleavait rechuté àla rentrée de Pâques, quelques semaines avantdeseprésenter àYvan, àla fin de son cours.

Depuis, elleessayait de limiter saconsommation.

Maisellesesavait vulnérable, trèsvulnérable.

Etd’apprendre lanouvelle de cette maternité l’avaitànouveau jetéedans lepuits… Depuis sadécouverte, Janenesavait pluscomment s’yprendre avecsanièce.

Ellesesentait coupable d’avoirviolésonintimité etcoupable denerien faire pour l’aider.

Elleserassurait commeellele pouvait : Marionnemontrait aucunsigned’accoutumance àcette drogue.

MaisJane étaitnaïve surce point.

Chezsanièce, lacocaïne servaitd’abord àsauver lesapparences.. »

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