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Le Règlement Rome et les autres normes

Publié le 02/09/2012

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On l’a déjà relevé, le Règlement offre donc la possibilité aux parties de faire référence dans leur contrat à un droit non étatique ou à une convention internationale, dans son considérant 13. Cependant les considérants n’ont aucune valeur normative. On peut se demander comment sera interprété ce considérant. Peut-être faudrait-il revenir au système de la Convention de Rome en assimilant la référence faite à un droit non étatique à un défaut de choix. Cela relèvera de la compétence de la CJCE qui devra certainement interpréter cette règle.   Ce considérant soulève un risque, celui que soit invalidé, devant un juge étatique, le choix d’un droit non étatique. Mais il en sera, à l’inverse, tenu compte devant un juge arbitral puisque l’arbitre est tenu de respecter la volonté des parties et les termes de se mission. La sentence arbitrale doit être reconnue par une juridiction étatique pour avoir force exécutoire. La reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales ne sont pas subordonnées à un contrôle de la loi applicable[15]. La Cour de Cassation a, en effet déclaré : « que l'arrêt relève exactement qu'en se référant aux “principes généraux des obligations généralement applicables dans le commerce international”, les arbitres n'ont fait que se conformer à l'obligation qu'ils avaient, en vertu de l'article 8 de l'acte de mission, de définir le droit applicable à l'accord conclu[16] «. Peuvent donc être indirectement validés des contrats sans loi.   Le considérant 13 du Règlement pourrait donc trouver sa pleine efficacité lorsque les parties décident de soumettre leur contrat, dans lequel elles ont fait référence à un droit non étatique, à un juge arbitral. Sinon, son efficacité serait réduite puisqu’il faudrait se référer à la loi applicable à défaut de choix des parties pour savoir quel rôle cette loi accorde à ce droit non étatique.   Le Règlement n’interdit pas aux parties de se soumettre à un éventuel instrument communautaire de droit matériel des contrats, si cet instrument prévoit une telle possibilité. En effet, le considérant 14 du Règlement dispose que « si la Communauté adopte dans un instrument juridique spécifique des règles matérielles du droit des contrats, y compris des conditions générales et clauses types, cet instrument peut prévoir que les parties peuvent choisir d’appliquer ces règles «. En l’état actuel des choses, « l’instrument communautaire en question semble prendre la forme du Cadre commun de référence «.

« l'application des dispositions qui, dans des matières particulières, règlent les conflits de lois en matière d'obligations contractuelles et qui sont ou seront contenuesdans les actes émanant des institutions des Communautés européennes ou dans les législations nationales harmonisées en exécution de ces actes ».

Il était alorsacquis, avant même l'adoption du Règlement Rome I, que les dispositions communautaires spéciales édictant des règles de conflit, telles que les règlements etdirectives ainsi que les législations harmonisées en exécution des directives, prévalaient en toute situation.La proposition de règlement 2005 avait maintenu une règle identique en l'étoffant de certaines précisions concernant, notamment, les directives concernées.

Quant au Règlement Rome I, dans sa version finale, il comporte un article 22, qui dispose qu'à « l'exception de l'article 7, le présent règlement n'affecte pasl'application des dispositions de droit communautaire qui, dans des domaines particuliers, règlent les conflits de lois en matière d'obligations contractuelles ».

Ainsi,mis à part le domaine spécifique du droit des assurances, objet de l'article 7 cité, le Règlement s'efface devant les règles de conflit intéressant les obligationscontractuelles contenues dans des dispositions communautaires.

On en revient donc à ce qui existait déjà sous l'empire de la Convention de Rome.

La règle de l'article 22 est légitime en ce qu'elle est l'illustration du principe specialia generalibus derogant, à savoir le principe selon lequel la loi spéciale,représentée par les différentes règles de conflit que l'on peut trouver dans d'autres textes communautaires, déroge à la loi générale, le Règlement Rome I.

Alors que ce dernier affiche un objectif de sécurité juridique, cet aboutissement est donc mis à mal par la présence de règles de conflit éparses contenues dansd'autres règlements ou dans certaines directives, primant alors le Règlement, et donnant lieu à un droit qui a pu être qualifié de « droit extrêmement complexe, dequalité souvent médiocre, pas même en harmonie avec d'autres instruments communautaires »[5].Le considérant 40 du Règlement aborde explicitement ce danger en disposant qu'il « convient d'éviter une situation où les règles de conflit de lois seraient disperséesentre de multiples instruments et où il existerait des incohérences entre ces règles ».

Le texte ajoute : « toutefois, le présent règlement n'exclut pas la possibilitéd'insérer des règles de conflit de lois en matière d'obligations contractuelles dans les dispositions de droit communautaire concernant des matières particulières.

Leprésent règlement ne devrait pas affecter l'application d'autres instruments fixant des dispositions destinées à favoriser le bon fonctionnement du marché intérieur,dans la mesure où ces dispositions ne peuvent s'appliquer conjointement avec la loi désignée par les règles du présent règlement.

L'application des dispositions de laloi applicable désignée par les règles du présent règlement ne devrait pas restreindre la libre circulation des biens et des services telle qu'elle est réglementée par lesinstruments communautaires ».Ce texte paraît donc assez ambigu : d'un côté, il note le problème qui pourrait résulter d'un éparpillement des règles de conflit en matière contractuelle, pour ensuitepréciser que le Règlement ne peut empêcher ce phénomène, essentiellement, si les règles extérieures à celui-ci permettent de protéger la libre circulation des biens etservices.

Avec ce régime complexe, il convient alors, en présence d'un contrat communautaire, de compléter le raisonnement conflictuel, parfois tortueux, d'ultimesvérifications propres à s'assurer du respect des exigences communautaires.

En outre, il convient de prendre en compte des mécanismes correcteurs tels quel'exception d'ordre public ou la fraude à la loi.Une fois la loi, sous laquelle un contrat sera régi, désignée, il convient donc de vérifier tous les éléments qui font le droit communautaire tel qu'on le connaîtaujourd'hui afin de voir si cette loi ne déroge pas à des instruments communautaires ayant une valeur supérieure, ce qui revient à fournir un travail incommensurable.

Une ambiguïté réside, qui plus est, quant à la notion de « dispositions de droit communautaire qui règlent les conflits de lois en matière d'obligationscontractuelles »[6], notion mentionnée par le Règlement mais non explicitée.

En effet, on ne sait pas encore réellement s'ils'agit des instruments communautaires qui contiennent une règle de conflit stricto sensu ou si cela concerne les règles de délimitation unilatérale du champd'application du droit communautaire.La réponse à cette question sera certainement apportée par la jurisprudence à venir de la CJCE.

Une partie de la doctrine pense déjà, cela dit, que la secondeinterprétation devrait logiquement l'emporter, ce qui reviendrait à faire primer des règles de compétence du droit communautaire sur de vraies règles de conflit, ce quine nous dicte pas la marche à suivre si deux règles peuvent être applicables pour une même situation.

L'adoption du Règlement va alors nécessairement créer de nombreuses difficultés en droit communautaire mais il en ira certainement de même lorsqu'on devraarticuler ce texte avec les conventions internationales existantes ou à venir.

II – L'articulation latente du Règlement Rome I avec les conventions internationales On l'a déjà relevé, le règlement Rome I ne fait pas exception à la question désormais récurrente du droit international, à savoir comment résoudre « les conflits deconventions ».

En effet, le Règlement n'étant pas supérieur aux Conventions internationales, il va nécessairement falloir faire face aux difficultés d'articulation entrece Règlement et ces textes interétatiques auxquels sont ou pourront être parties les Etats membres.

Pour tenter d'y répondre, il est alors essentiel de dissocier entre lesconventions internationales existantes, pour lesquelles l'articulation avec le Règlement Rome I est apparemment résolue (A) et les Conventions internationalespostérieures dont la ratification semble désormais limitée par le règlement (B).

A – L'articulation apparemment résolue entre le Règlement Rome I et les Conventions internationales existantes Selon l'article 25.1 du Règlement de Rome I, « le présent règlement n'affecte pas l'application des conventions internationales auxquelles un ou plusieurs Etatsmembres sont parties lors de l'adoption du présent règlement et qui règlent les conflits de loi en matière d'obligations contractuelles ».

De manière résumée, il fautcomprendre, à la lecture de cet article, que les conventions internationales, déjà conclues et visant à régler des conflits de loi en matière contractuelle, sont toujoursapplicables.Sont ainsi principalement visées les Conventions de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d'objets mobiliers corporels etdu 14 mars 1978 sur la loi applicable aux contrats d'intermédiaires et à la représentation.

Ainsi, malgré la proposition de texte de 2005 qui avait établi une règle deprévalence du Règlement sur les deux conventions de La Haye « lorsque tous les éléments pertinents de la situation sont localisés au moment de la conclusion ducontrat dans un ou plusieurs Etats membres »[7], la règle n'a pas été reprise à la lettre dans la version finale du Règlement.

Toutefois, si le règlement Rome I ne prévaut pas sur les conventions internationales, il est à noté qu'il n'en n'est pas de même lorsque la convention concerneexclusivement des Etats membres.

En effet, l'article 25.2 prévoit que « le règlement prévaut entre les Etats membres sur les conventions conclues exclusivement entredeux ou plusieurs d'entre eux dans la mesure où elles concernent des matières réglées par le présent règlement ».

Ainsi le règlement Rome I est amené à régir toutesles situations intracommunautaires en matière de droit des obligations.L'article 26 du Règlement oblige quant à lui les Etats membres dans un délai d'un an à communiquer « à la Commission les conventions visées à l'article 25,paragraphe 1 » et ce, afin de les rendre accessibles.

La liste des conventions concernées devra ainsi être publiée par la Commission au journal officiel de l'UnionEuropéenne, sur informations transmises par les Etats membres[8].

Par conséquent si le Règlement n'empêche pas l'application des conventions internationales, il se retrouvera nécessairement à l'origine de contradiction avec cesdernières.

Il est alors intéressant de se pencher sur l'articulation du Règlement avec quelques unes des principales conventions intéressant le droit des obligations.

Concernant la Convention de la Haye de 1955 sur la loi applicable au contrat de vente, il est à noter que celle-ci ne devrait à priori poser aucun problème particulier.En effet, les règles de cette dernière sont dans l'ensemble relativement similaires à celles que le règlement adopte en matière de vente.Toutefois il existe une réelle différence au sujet de la protection internationale des consommateurs.

Dans ce domaine la Convention ne prévoit rien, et l'usage voulaitalors que l'on applique l'article 5 de la Convention de Rome.

Dès lors, on peut légitimement se demander s'il faudra à l'avenir appliquer l'article 6 du Règlement,reprenant l'article 5 de la Convention de Rome, à la place de la Convention de 1955.

Cette question pourrait faire apparaître une difficulté d'application duRèglement que devra alors résoudre la jurisprudence à venir.

Cependant pour appuyer ce raisonnement on peut d'ores et déjà invoquer la déclaration solennelle de la. »

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