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aggripa d'aubigne les tragiques

Publié le 24/06/2016

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aubigne

Séquence 4 : Poésie et quête de sens : les pouvoirs du poète, le poète et le pouvoir Séance 1 : Agrippa d'aubigné: la poésie engagée au XVIème siècle Les tragiques est un récit en Alexandrins composé de 12 livres, fini en 1616 c'est à dire au début du XVIIème siècle, à la suite de l’assassinat du roi Henry IV, protestant converti au catholicisme pour des raisons politiques et assassiné par un fanatique Catholique (Ravaillac) pour avoir permis aux minorités religieuses protestantes une liberté de culte lors de l'édit de Nantes promulgué en 1598. La forme en alexandrins et la structuration en chant s'inspire des grandes épopées de l'antiquité (récit poétique d'action guerrière qui peut faire intervenir le surnaturel. Exemple : l'Iliade et l'Odyssée d'Homère) Le poète humaniste s'inspire donc de la culture antique pour construire un tableau tragique et épique de l'époque des guerres de religion auxquelles il a participé. Alors que le livre I (Misère) ouvre le poème narratif sur un tableau pathétique de la France déchirée par la guerre civile, le livre II (Prince. voire polycopié) dénonce par la satyre les responsables de la situation les chefs Catholiques (les fils de François Premier : Charles IX, François II et Henry III mais aussi le duc de guise chef de la ligue Catholique). Dans le premier livre, le poète annonce son projet. Dans les vers 97 à 130 : il développe une métaphore biblique qui se réfère à l'Ancien Testament : Esaü et Jacob sont les fils d'Isaac (roi aveugle) et de Rebecca : alors qu'Esaü a le droit d’aînesse, la mère a une préférence pour le cadet Jacob. Un jour qu'il avait faim, Esaü échange son droit d'aînesse à son cadet contre un plat de lentilles, mais il change d'avis une fois satisfait. En l'absence d'Esaü, Jacob, déguisé par sa mère, trompe son père et reçoit son pouvoir : il s’exile alors et aura 12 enfants. Comment le poète, tout en construisant un tableau pathétique et tragique de la France des guerres de religion de la deuxième moitié du XVIème siècle, parvient-il à dénoncer de manière engagée la violence et la responsabilité des Catholiques et de leur chef ? Nous étudierons tout d'abord ce poème comme un récit épique et tragique représentant l'engrenage de la violence. Ensuite, nous étudierons l'engagement du poète dans une parabole biblique qui évolue vers un apologue politique. A. Du récit épique au tableau tragique Un récit qui donne à voire et à entendre L'alexandrin renvoi à l'épopée et à la tragédie On observe de nombreuses accumulations afin de donner au récit un rythme haletant, notamment avec l'usage des virgules. Ce rythme permet de donner la violence du combat. Des rejets et des contre-rejets (vers 4 et 5). Les engendrements, ils permettent d'accélérer le rythme et d'exprimer la violence du combat. Accumulation de verbes de combats. Jeu sur les sons, les allitérations. Récit au présent : plus vivant La structure du récit : montrer la progression d'un engrenage Vers 1 à 2 : vue d'ensemble. Vers 3 à 11 : le regard se recentre sur l'attaque de l'aîné. Vers 12 à 15 : la révolte du cadet, son Jacob. Vers 16 à 22 : la violence conduit à l'aveuglement (l'aveuglement tragique d’Œdipe), retournement de situation, catastrophe. Vers 23 à la fin : dénouement, agonie, échec de la mère à protéger son enfant. Le récit est structuré en 5 étapes comme une tragédie, il est structuré aussi par des connecteurs de cause et de conséquences qui montrent les différentes étapes de progression de la violence. Registre pathétique qui est marqué par l'anaphore de ni, ni au vers 17. Un dénouement tragique : la malédiction et la prosopopée (C'est lorsqu'une idée ou une allégorie prend la parole). Le registre pathétique : les frères ennemis sont victimes de leur propre violence et n'ont plus maître de leur volonté. Au vers 19 il y a une double proposition, la même structure est répétée. Ils sont donc des victimes de leur propre violence qui les conduit à l'aveuglement. Le discours final peut être lu comme un épilogue, une conclusion. Cela se termine sur une accusation, les deux frères ennemis sont réunis dans la même accusation. Synecdoque : le sein qui vous nourrit. On a un récit qui conduit le regard du lecteur d'un tableau d'ensemble vers chaque responsable, d'abord l’aîné puis le cadet, puis les deux et enfin la victime : la mère. Cela permet de montrer l'engrenage de la violence tout en montrant la responsabilité de chacun. On peut discerné un parti pris. B. Une parabole religieuse au service de la dénonciation morale et politiques La parabole religieuse : le poète comme « prophète » de son temps Une parabole est une forme d'apologue présent dans les textes sacrés : c'est un récit symbolique ou les personnages incarnent des idées, afin de transmettre un message. La référence à un épisode de l'Ancien Testament situe l'histoire contemporaine dans une distance qui permet la réflexion en même temps que l'émotion ; le dieu de l'Ancien Testament, contrairement au dieu du nouveau testament, n'est pas un dieu de pardon mais un dieu vengeur et impitoyable : le mythe des frères ennemis trouve aussi un écho dans d'autres cultures antiques (Romulus et Remus), le poète actualise se mythe et s'inspire aussi de la mythologie antique : alors qu’Isaac est aveugle dans l'Ancien Testament, les deux frères s'aveuglent mutuellement comme un châtiment involontaire qui rappel le mythe d’œdipe : cet aveuglement physique est une métaphore de l'aveuglement moral et intellectuel des combattants aliénés par leur haine et désir de vengeance. Les deux frères Esaü et Jacob personnifient à la fois les minorités Catholiques (plus anciennes sur la terre de France) et les minorités protestantes (plus jeune sur le territoire) ; les deux frères font aussi écho aux deux branches de la dynastie royale : dans le mythe biblique, l'aîné cède son pouvoir au cadet avant de vouloir le récupérer, comme durant les guerres de religions, la dynastie des Valois, sans descendants après la mort par assassinat d’Henry III a cédé le pouvoir à la branche des Bourbons représentés par Henry de Navarre (futur Henry IV) qui a comme Henry de Navarre ayant accepter l'abandon de sa religion pour le pouvoir. L'assassinat d'Henry IV (1610) qui avait ramené la paix dans le royaume provoque donc un retour en arrière : la ligue Catholique (appartenant à la branche des Valois) veut récupérer le pouvoir. L'allégorie de la France actualise le mythe biblique : elle remplace la reine Rebecca, or à ce moment la France est dirigée par une femme (Marie de Médicis, veuve d'Henry IV et mère de Louis XIII). D'Aubigné opère donc un mélange entre le mythe biblique, des références à la tragédie antique et l'actualité : en s'appuyant sur le passé pour évoquer le présent il acquière une autorité morale et religieuse au delà du temps, comme les prophètes de l'Ancien Testament (prophètes de la catastrophe). Les marques d'un engagement : le poète soldat Le poète s'engage et s'exprime dans l'énonciation de son poème (« je veux peindre » vers 1). Il s'engage aussi par des termes évaluatifs qui marquent sa préférence en tant que protestant. (« orgueilleux » un des 7 péchés capitaux). La périphrase de substitut vers 7 : « Ce voleur acharné », le camp Catholique veut monopoliser la France pour lui tout seul. « Presser d'avoir jeûner meshui ». Une répétition de l’adjectif qualificatif juste. « sa juste colère », « la juste querelle ». A travers ce récit qui montre les conséquences tragiques d'un conflit violent dans lesquels Catholiques et protestants sont coupables de ravager leur pays et désigne un coupable majeur. Des arguments précis à travers le récit et le discours : le poète comme juge A travers ce récit, des arguments implicites apparaissent : Vers 4 à 11, la branche Catholique de la population et des Valois sont les responsables originels de la guerre civile qui met en péril le pays tout entier. Vers 12 à 16, la révolte des protestants est donc justifiée. Vers 17 à 22, ils ne sont plus maîtres de leurs actions : les deux camps deviennent les instruments de leur haine sans se rendre compte que la victime principale reste leur pays. Dans le discours direct final (la prosopopée) on observe une double énonciation (deux voix s'expriment : celle de l'auteur à travers son personnage) : la deuxième personne du pluriel peut désigner les frères, les Français et le lecteur. Le je désigne dans un premier temps la France, mais aussi peut désigner le poète, comme si le poète s'identifiait à la France et maudissait ceux qui rallument le feux de la guerre civile (ceux qui soutiennent l'assassinat d'Henry IV). Cet épilogue peut donc aussi être lu comme un avertissement : ceux qui reprennent les guerres de religion vont à nouveau provoquer une tragédie nationale. Conclusion : (voire page 44) Le poète engagé au XVIème siècle utilise des références antiques pour transmettre un message collectif : ceci lui donne une autorité morale qui permet aussi une distance et un recul pour faire réfléchir le lecteur sur l'actualité contemporaine. Le poète humaniste met donc son art au service de principes humanistes en utilisant en utilisant les humanités (les cultures de l'antiquité) pour réfléchir sur la nature humaine. Le pouvoir du poète est ainsi renouvelé : en provoquant l'émotion du lecteur, il le persuade et transmet un message de paix : au XVIème siècle, le poète engagé se fait donc prophète et juge par l'arme de l'écriture (et non plus par le sang comme le faisait d'Aubigné dans son engagement passé). Dans le camp Catholique, des poètes ont aussi adressé des poèmes au pouvoir royale en utilisant les mêmes procédés allégoriques, comme Ronsard avec le « Discours des misères de ce temps » adressé en 1562 à Catherine de Médicis (reine ultra-catholique) pour appeler à la paix civile. La poésie baroque utilise beaucoup l'allégorie, les références mythologiques, les métaphores guerrières et le feu pour exprimer et représenter des sentiments extrême dans le domaine politique comme dans le domaine amoureux : d'Aubigné dans Hécatombe à Diane (1572) utilise par exemple des métaphores guerrières dans ses sonnets pour exprimer les désordres de la passion amoureuse : la « guerre civile » est alors une métaphore de l'esprit et du cœur déchiré par les sentiments.

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