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Article de presse: Reagangate, amateurisme et naïveté

Publié le 22/02/2012

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18 novembre 1987 -   " Il est difficile de mettre un prix sur le droit de l'opinion à savoir ", a répondu, le 18 novembre 1987, au soir de la publication de l'enquête parlementaire sur l' " Irangate ", un sénateur à qui l'on demandait si les résultats justifiaient bien dix mois d'une recherche laborieuse, qui a coûté 4 millions de dollars. Tant il est vrai que, fractionnées de mois en mois en un interminable feuilleton largement reproduit par la presse, les révélations sur ce scandale des ventes d'armes à l'Iran restent encore très obscures et incomplètes.    Sur le fond, cette volonté-si volonté concertée il y a eu-d'amorcer une ouverture vers certains éléments " modérés " des sphères dirigeantes iraniennes a été un fiasco dans lequel l'amateurisme l'a disputé à la naïveté. Le président, dans un message télévisé en août dernier, l'avait déjà admis. Aussi le rapport de la commission ne fait-il qu'ajouter quelques précisions plus accablantes encore. C'est ainsi, apprend-on, que certaines armes destinées aux " modérés " auraient fini entre les mains des fractions iraniennes les plus radicales, tandis qu'un des contacts de la Maison Blanche, chargé de négocier les armes en échange des otages américains, aurait été le propre instigateur de l'enlèvement du chef de poste de la CIA à Beyrouth, William Buckey...    Reste la forme, c'est-à-dire la responsabilité de la prise de décision. Et, là, le président est directement mis en cause. Difficile d'imaginer que, sans son consentement, fût-il tacite, un aussi rocambolesque trafic destiné à financer la résistance antisandiniste au Nicaragua au moyen de ces ventes d'armes à l'Iran ait pu être organisé. Si le président Reagan est finalement " blanchi " au bénéfice du doute, son autorité est prise en défaut. Lui dont on vantait encore il n'y a pas si longtemps la " gestion " a contribué, par son laxisme, à encourager ses collaborateurs les moins scrupuleux ou les plus candides à mener une politique au jour le jour, sans autre ligne directrice que le profit immédiat.    On vient d'en constater les effets dans le domaine économique, où l'immobilisme du président est tout aussi fautif. Ce n'est sans doute pas pour rien que le lieutenant-colonel North, le principal protagoniste de l' " Irangate ", est devenu, un temps, un héros populaire. Lui, au moins, obéissait à son credo politique : couper la route au communisme en Amérique centrale. Bush préservé    Les conséquences de ce scandale ? Elles sont déjà passées. Car, quelles que soient les décisions du procureur, tous les acteurs de l' " Irangate " sont sortis de la scène politique, à l'exception du président, mais il est en fin de mandat. Le seul " survivant ", mais aussi le moins incriminé, reste le vice-président Bush qu'un sondage donne toujours en tête des candidats républicains pour la prochaine élection présidentielle.    Ce rapport du Congrès, qui éclaircit bien peu de choses sinon les divisions partisanes de ceux qui l'ont rédigé, ouvrira peut-être les yeux aux Américains un an avant qu'ils ne se rendent aux urnes. Ils pourront enfin réfléchir au fonctionnement de leurs institutions et, au lieu de s'acharner sur la vie privée des futurs candidats, s'intéresser à ce que ces derniers ont à leur dire. BULLETIN Le Monde du 20 novembre 1987

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