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Article de presse: Un lourd héritage

Publié le 22/02/2012

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20 janvier 1989 -   La douche apparaîtra glacée aux Américains. Des taxes supplémentaires, un alourdissement de l'impôt sur le revenu des gros contribuables, vont être nécessaires pour limiter un déficit budgétaire qui n'avait pourtant cessé de se réduire depuis 1985 mais qui prend maintenant des allures d'incendie.    Les chiffres sont inquiétants, même pour les esprits les plus blasés.    Le déficit budgétaire, qui avait culminé en 1986 à 221 milliards de dollars puis était revenu en 1989 à 152 milliards de dollars, pourrait atteindre 195 milliards de dollars ( 1 000 milliards de francs environ) cette année et, dans le pire des cas, 294 milliards l'année prochaine. Cela en dépit de la loi votée en 1986 puis modifiée en 1987, connue sous le nom de loi Gramm-Rudman-Hollings, qui fixait pour objectif un déficit de 100 milliards en 1991. Rapportée à la richesse nationale, la situation apparaît un peu moins sombre : le déficit, qui représentait 6,2 % du produit national brut ( PNB) en 1983 et encore 5,4 % en 1985, reviendrait à 3,9 % en 1991 après 3,5 % en 1990.    Un piège mortel se dissimule pourtant sous ces chiffres. L'essentiel du déséquilibre des comptes de l'Etat a pour origine les intérêts à payer chaque année sur une énorme dette publique accumulée à partir de 1982, avec l'apparition de déficits considérables qu'il a fallu financer par des emprunts croissants. Alors qu'en 1979-1980, c'est-à-dire à la fin de la présidence Carter, le déficit fédéral était inférieur à 60 milliards de dollars par an, il atteignait 128 milliards en 1982, 208 milliards en 1983, 185 milliards en 1984 et 212 milliards en 1985.    Il faut voir là les effets de la grave récession qui frappe les Etats-Unis en 1981 et 1982 puis le monde tout entier. Les recettes fiscales se tarissent parce que l'activité recule et que le pays s'appauvrit. Mais il faut y voir aussi les retombées de la politique menée tambour battant par Ronald Reagan dès son arrivée à la Maison Blanche. C'est en effet dès février 1981 qu'est présenté au Congrès un plan visant à réduire sur trois ans les impôts de l'Etat et les charges publiques, à l'exception des dépenses militaires : le déficit budgétaire devait disparaître dès 1984. En même temps, une politique monétaire très dure était menée par la Réserve fédérale.    Au lieu d'augmenter de 9 % par an comme prévu entre 1982 et 1985, les recettes fiscales ne croissent que de 6 % alors que, dans le même temps, les dépenses progressent de 9 % l'an au lieu des 6,5 % prévus.    Le déficit des comptes de l'Etat s'envole.    On a peu parlé à l'époque de cet échec parce que les Etats-Unis commençaient à savourer la prospérité retrouvée. Il n'empêche que s'accumula alors une énorme dette d'Etat qui, en 1985, finit par atteindre 43 % de la richesse nationale ( exprimée en termes de PNB) contre 26 % en 1981. C'est cette dette, ou plutôt les intérêts de cette dette, qui pèse maintenant très lourd chaque année sur le budget, d'autant plus lourd que le loyer de l'argent est élevé. ALAIN VERNHOLES Le Monde du 3 octobre 1990

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