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David Hume, Enquête sur l’entendement humain (1748)

Publié le 08/01/2014

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Anne Sophie FABRE Devoir maison n°2 TS8 David Hume, Enquête sur l'entendement humain (1748) La plupart des hommes sont engoncés dans un dogmatisme féroce. Il n'y a pas pour eux place au doute qui les embarrasse et ils n'ont de cesse d'évacuer cette gêne  par l'affirmation forte de leurs convictions et principes. Mais est-ce que le dogmatisme est utile pour la construction d'une pensée ? Ce dogmatisme ne les enferme-t-il pas dans un carcan duquel il devient difficile de s'échapper ? Leurs certitudes ne leur confèrent t'elles pas un tel sentiment de supériorité vis-à-vis de ceux qui prôneraient d'autres thèses qu'ils en perdent ainsi tout esprit critique et leur capacité de se remettre en question? C'est l'intuition de ce danger qu'a eu David Hume vers le milieu du 18e siècle. Dans ce texte qui porte sur le thème de la nature humaine, et plus précisément qui traite de l'opposition entre la croyance et la raison, il montre justement que certains, forts de leur convictions inébranlables et imbues de leur personnes se privent eux même par aveuglement dogmatique d'une part importante de liberté en refusant de voir les choses et les faits autrement qu'à travers le prisme réducteur de leur croyance. Dans un premier temps, Hume évoque les caractéristiques de cet aveuglement dogmatique à savoir son côté obtus et son intolérance. Il montre ensuite la faiblesse qui découle d'un tel dogmatisme avec l'embarras que procure à leurs adeptes toute hésitation ou remise en cause de leurs certitudes ce qui les pousse jusqu'à l'obstination. Enfin l'auteur explique ce que les raisonneurs dogmatiques gagneraient à douter de la supériorité systématique de leurs affirmations et donc à perdre de leur suffisance. Ils y gagneraient la perte de leurs préjugés vis-à-vis de leurs adversaires et par là même, une plus grande liberté de pensée et un raisonnement plus fin par la faculté retrouvée d'analyser les choses et les faits sous tous les angles possibles. « Les hommes pour la plupart? » : Hume est clair dès le début, il ne s'agit pas selon lui de tout le genre humain mais d'une majorité. Hume distingue les dogmatiques et les autres. « ? naturellement portés à être affirmatifs et dogmatiques » C'est une spéculation intellectuelle qui souligne cette tendance au dogmatisme pour la plupart des hommes. Le mot naturellement peut signifier deux choses : l'instinctivité ou la spontanéité. Hume parle lui de la spontanéité humaine puisque le dogmatisme ne touche pas tout le monde, mais « la plupart ». Dans l'histoire, à travers diverses époques (et le moyen âge en est un exemple), les idées furent bien souvent imposées, en particulier par la religion. Et il ne fallait en aucun cas tenter de justifier ces idées, mais les croire, les admettre, avoir la foi. Autrement dit il y avait une incitation forte à suivre une pensée commune sur bien des choses, mais ce que Hume veut dire c'est que, la plupart des hommes sont naturellement enclin à accepter cette forme 'd'éducation'. Pour lui les hommes sont donc responsables de leur dogmatisme. Hume va montrer que ce dogmatisme devient un carcan voire une prison qui conduit ceux qui s'y complaise à voir « les objets d'un seul côté » et à n'avoir « aucune idée des arguments qui servent de contrepoids ». Etre dogmatique c'est de ne douter de rien. Il y a deux manières d'adhérer à quelque chose : soit croire, soit savoir. Savoir veut dire qu'on a des preuves tandis que croire signifie avoir la foi et il est difficile de remettre en cause cette croyance. Ainsi le raisonnement peut s'en trouver corrompu car comme le souligne Hume, les hommes dogmatiques « se jettent précipitamment dans les principes vers lesquels ils penchent » et « n'ont aucune indulgence vers ceux qui entretiennent des sentiments opposés ». On pourrait presque parler d'une forme d'ostracisme vis-à-vis de ceux qui penseraient différemment. Hume s'attache ensuite à montrer le côté particulièrement embarrassant d'un excès de dogmatisme. « Hésiter, balancer embarrasse leur entendement, bloque leur passion et suspend leur action ». On voit là à quel point le raisonnement peut être altéré par le refus de voir les choses différemment, ce qui conduit à placer les sujets dans une situation d'inconfort total, de doute forcé et involontaire par la nécessité de faire un choix. Ils n'aspirent qu'à s'échapper le plus vite et le plus loin possible « Ils sont donc impatients de s'évader d'un état qui leur est aussi désagréable ». Cela les conduit aussitôt à se réfugier dans le monde rassurant de « l'obstination de leurs croyances ». C'est une forme d'échappatoire pour les hommes faibles. L'auteur utilise des mots forts comme « violence » qui symbolise le danger et « croyance » pour rappeler le 'non-savoir' du dogmatisme qui ne peut être vérité puisque absence de preuve. On constate donc ici une forme d'infirmité, liée au dogmatisme et basée sur l'incapacité d'une remise en question de soi. De nombreux leaders à travers l'histoire ont utilisé à bon et mauvais escients, cette incapacité de beaucoup à penser par eux-mêmes. Les exemples de l'histoire pourraient être considérés comme des cas particuliers, sans rigueur scientifique. Mais aujourd'hui encore et pour certains, les choses sont et restent telles qu'on leur a toujours enseigné. Ils se conforment aux dogmes fixés par leur entourage ou la société. Il en est ainsi dans les domaines de la politique, de l'économie, des religions. Les valeurs familiales et sociales influent fortement, pouvant transformer des doctrines en dogmes et limitant ainsi la capacité de réflexion par soi-même. Hume fait état de cette infirmité « prendre conscience des étranges infirmités de l'esprit humain », et ce même pour le cerveau le plus brillant « même dans son état de plus grande perfection? le plus précis et le plus prudent dans ses décisions ». Il imagine que « si de tels raisonneurs dogmatiques » prenaient conscience de cette infirmité, cela leur ouvrirait des horizons nouveaux, car plus modestes et avec moins de préjugés ils deviendraient capables d'accepter de nouvelles idées, venant d'autres personnes « adversaires ». Et de ce fait il gagnerait en autonomie et liberté de penser, ils découvriraient le doute méthodique ou volontaire. Qui dit 'doute' dit 'absence de certitude' et absence 'de préjugé fort', et donc capacité de remise en cause, à tout moment même devant des faits et causes qui puissent paraître évidents. Cela devient l'apanage de l'homme qui raisonne sensément.   C'est ce qu'exprime Hume dans la dernière partie du texte, lorsqu'il écrit que »l'homme qui raisonne correctement » doit généralement faire preuve de « modestie » et de « prudence » « dans les enquêtes et les décisions de tout genre ». Toutefois il faut prendre garde de ne pas opposer systématiquement dogmatisme et raisonnement, ou croire et savoir. Croire c'est admettre une vérité sans démonstration préalable, alors que la raison est associée au bon sens et à la sagesse. Mais il y a différentes raisons. La raison dogmatique qui se conforme à la majorité, et où les choses sont admises et il n'est pas raisonnable de penser autrement (axiomes indémontrables en mathématiques, l'infinité de l'univers?), la raison scientifique basée sur des preuves et sur l'expérimentation, mais aussi la raison empirique basée elle sur l'expérience de la vie (le vécu qui permet de justifier des idées, de donner des conseils). On voit donc que l'on peut très bien par exemple confondre du dogmatisme et un raisonnement construit sur de l'empirisme et par la même murement réfléchi. Le principal intérêt de ce texte de David Hume c'est qu'il permet de réfléchir sur le dogmatisme ses caractéristiques, ses avantages dans le sens qu'il peut rassurer dans certains cas par le fait qu'il évite de se remettre en cause et ses faiblesses particulièrement soulignées par l'auteur. L'auteur insinue que les dogmatiques devraient prendre conscience de l'importance du doute méthodique dans la construction d'un raisonnement cohérent. Ce qui leur permettrait une plus grande liberté de penser. Toutefois, l'auteur oppose indirectement (dans le texte) les concepts savoir et croire. Mais il convient de ne pas perdre de vue, que le raisonnement dogmatique (choses admises) est inévitable dans bien des cas ne serait-ce que parce que tout ne peut être parfaitement démontré. Dogmatisme et raisonnement comme croyance et savoir sont et resteront intimement liés.

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