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est-ce parce qu'ils sont ignorants que les hommes ont des croyances ?

Publié le 17/03/2011

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On associe souvent la croyance à l’ignorance. La question nous invite à nous demander si c’est l’ignorance qui explique la croyance. On peut le reformuler par, « est-ce l’absence de connaissances qui explique une adhérence de l’esprit sur une absence de preuves ? ». Il faut bien comprendre que la croyance n’est pas l’absence de savoir ou de connaissance, mais l’absence de preuves sur un sujet donné. La question laisse aussi supposer que l’ignorance est la cause de la croyance. La croyance serait donc l’effet de l’ignorance. Nous allons donc chercher à savoir si ce lien qui unit les notions de l’ignorance et de la croyance est juste et si l’ignorance est vraiment la seule cause de la croyance. Est-ce que c’est l’ignorance seulement qui explique la croyance ? La croyance est-elle un concept de facilité ? Est-ce car les hommes croient, qu’ils sont ignorants ? N’y a-t-il qu’une seule cause à la croyance ? Nous allons voir qu’en premier lieu il y a des croyances qui ignorent qu’elles sont des croyances. On étudiera donc les causes de ce type de croyance, l’ignorance n’est pas la seule source de ce type de croyance, le désir peut aussi rendre des croyances ignorantes d’elles-mêmes. En second lieu, nous verrons que l’individu peut croire et être conscient que ce qu’il croit est simplement une croyance. Dans ce derniers cas, l’individu peut croire dans le but de prévoir et la part de doute nous permet d’avoir la possibilité d’accéder à la vérité. La croyance, effet de l’ignorance Si l’ignorance est la seule source de la croyance alors la croyance est un concept de facilité car pour éviter l’ignorance, on préfère croire. Dans cette conception de la croyance, où l’ignorance serait la seule cause, la croyance est considérée comme une faute intellectuelle. L’homme n’a pas conscience qu’il croit, l’ignorance est donc ignorante d’elle-même.Il peut arriver que l’homme se contente de croire en tout et n’importe quoi, du moment que l’on ne se pose plus de questions. Au lieu de reconnaître son absence de connaissances face au monde, il adopte des croyances pour, croit-il, comprendre le monde. Mais les croyances, vu que ce sont des convictions sans aucunes preuves, donnent une vision erronée du monde à l’individu. Ainsi, si la croyance a pour seul but de combler l’ignorance, en offrant un refuge vain de compréhension ; elle nous éloigne alors de la réalité.Dans cette recherche de savoir, l’homme a une tendance naturelle à se laisser aller, à se complaire dans un état de passivité et ne ressent pas le besoin d’utiliser sa raison. La paresse de l’homme, comme le dénonce Kant dans Qu’est-ce que les Lumières ?, ainsi que sa lâcheté tendent à l’empêcher de rechercher par lui-même le savoir. Mais l’’homme a un désir intarissable de posséder le savoir, et même un besoin d’explications face à des phénomènes qu’il n’arrive pas à comprendre.  De plus, l’individu peut se satisfaire de réponses sans preuves, comme vu çi-dessus. Or dès l’enfance, la culture enracine des croyances dans notre esprit, et lorsque la personne devient adulte, elle peut prendre les croyances, qui lui ont été inculquées enfant par l’éducation, pour des vérités si elle conserve son état de passivité. Ainsi l’homme ne se sert pas de sa raison dans ce cas de figure, il prend des préjugés et des opinions pour des vérités et des savoirs incontestables.La croyance nous permet en outre de combler artificiellement des phénomènes encore inexpliqués par la raison et par les moyens scientifiques de notre époque. Cela est par exemple le cas de la superstition, on se persuade de quelque chose et notre esprit l’accepte sans preuves. En effet, certaines peurs sont à l’origine d’adhérence à des croyances, comme par exemple au Moyen-âge, on croyait que les chats noirs étaient des bêtes du diable. Ainsi la peur du diable, qui en elle-même est déjà une croyance, engendre d’autres croyances et d’autres peurs. La peur ajoutée à l’ignorance peut donc aussi être une source de croyances.Mais malgré les progrès scientifiques très importants de ces derniers siècles et la valorisation de la science dans notre société, certains types de croyance sont toujours d’actualité. Par exemple la croyance religieuse est toujours aussi forte même avec l’évolution rapide des savoirs et des connaissances. Il y a aussi l’astrologie, qui n’est pas une science s’appuyant sur la raison, et pourtant qui est prise très au sérieux par des gens cultivés. Ainsi la cause de la croyance n’est pas seulement l’ignorance, mais on observe aussi une volonté propre à l’homme d’avoir des croyances, croire est même quasiment un besoin pour l’homme. Ce besoin de croire, on le voit chez Teilhard de Chardin, qui tout en étant à la fois un scientifique et un philosophe, croyait en Dieu. La croyance, une volonté immuable de l’Homme La croyance est donc aussi le fruit de la volonté de l’homme. Ainsi la croyance ne peut pas seulement être considérée comme venant seulement d’une faute intellectuelle mais la croyance peut aussi avoir comme cause l’illusion. Ainsi la croyance n’est pas une faute intellectuelle ici, mais une faiblesse de l’esprit. Par exemple certaines personnes qui ont fait des études sur l’évolution de l’homme, qui ne sont donc pas ignorantes, sont aussi croyantes, et refusent de croire la théorie de l’évolution, privilégiant la Genèse sans qu’il y ait aucune preuve qui appui la deuxième théorie contrairement à la première. Nous allons donc essayer d’expliquer comment cet enfermement de l’esprit est possible.Dans ce cas de figure, l’homme a des désirs, et vivre dans un monde où ses désirs sont satisfaits est une idée séductrice ; un monde qui fonctionne selon ses désirs, et non pas selon la raison. La croyance a donc aussi comme source l’illusion qui relève en grande partie du désir.Ce type de croyance rend le monde et la réalité erronés, les transforme selon les désirs du croyant. Il vit dans un monde différent de la réalité. Le croyant refuse donc la réalité et préfère croire en ses désirs. L’individu peut donc désirer une certaine réalité, et ainsi privilégier certaines croyances par rapport à d’autres, et les prendre pour des vérités. Le désir de l’homme module donc sa façon de penser, de voir le monde, et crée des illusions qu’il prend pour la réalité. La croyance en Dieu en est un parfait exemple, on désire que Dieu existe, on s’oblige à le croire vu qu’il n’y a pas de preuves de son existence, puis on peut ensuite prendre son existence pour la réalité.Ce refus de la réalité rencontré dans ce second type de croyance peut s’expliquer par une peur de l’inconnu, un refus de certaines vérités que nous ne voulons pas accepter, un refus de certaines vérités pouvant être blessantes…etc. Mais l’individu n’a pas conscience que sa croyance est une croyance.L’illusion rend donc cette forme de croyance beaucoup plus difficile à éradiquer par la science, car ici cette croyance ne se fonde pas à partir d’absences de savoir, mais sur une volonté immuable de l’homme, sur ses illusions qui elles-mêmes sont le fruit des désirs de l’individu. Il faudrait donc s’attaquer aux désirs de l’homme pour éliminer les illusions et donc ensuite ce type de croyance. Mais même si cette croyance vient d’une volonté de l’homme de croire, nous n’avons pas conscience des illusions que nous avons  car cela est pour nous la réalité. Ainsi il est quasi impossible de lutter contre ce type de croyance, car il faudrait éradiquer nos désirs pour ne pas avoir d’illusions et donc ne pas croire, sans le savoir, nos illusions. Or les désirs n’appartiennent pas à notre propre volonté ; on ne choisit pas de tomber amoureux par exemple. Les deux premières causes de la croyance font d’elle une notion de substitution au savoir et à la vérité. Mais la croyance a aussi une utilité pour raisonner. Si l’on est conscient de croire, la croyance peut avoir un côté positif, c’est un outil pour arriver à une fin. On admet temporairement une croyance pour arriver plus tard à la vérité. Par exemple, dans son Discours sur la méthode où il cherche la véritable morale, Descartes invente et utilise une « croyance rationnelle ». N’ayant pas la connaissance de la « vraie morale », Descartes va suivre une morale provisoire en attendant d’avoir découvert la « vraie morale ». Dans ce cas précis, Descartes est conscient de croire. Cette croyance a reçu un examen approfondi pour qu’elle ressemble le plus à la « vraie morale », Descartes a utilisé sa raison pour chercher la « vraie morale » mais ne l’ayant pas encore trouvée, il s’oblige à suivre la morale qu’il juge la plus proche de la vraie. On a donc ici une croyance voulue et choisie, dont on a conscience.Mais les croyances peuvent aussi être bâties sur des hypothèses dans le but d’être démontrées et donc qu’elles deviennent par la suite des vérités. Dans le domaine de la science par exemple, on fait des expériences pour démontrer des hypothèses et donc transformer une croyance qui a une valeur de possibilité en une vérité. On peut donc être à la fois « croyant » et à la fois « savant », c'est-à-dire ne pas être ignorant, si on sait que nos croyances sont des croyances, ou que l’on utilise la croyance comme une probabilité, dans le but de prévoir, d’envisager des hypothèses possibles. Ainsi le plus de croyances possibles est envisagé, pour ensuite éliminer celles qui sont erronées et donc se rapprocher le plus possible de la réalité ou accéder à de nouveaux savoirs.Cela nous montre donc que la croyance a une utilité dans la découverte de nouvelles connaissances. Ce progrès des connaissances permet aussi de rendre certaines croyances invalides grâce à de nouveaux savoirs acquis qui permettent de rendre rationnelles des choses qui n’étaient que des croyances, mais considérées comme allant de soit et donc comme des vérités fondamentales. La lunette astronomique a, par exemple, permis à Galilée de démontrer que la Terre tournait autour du soleil, chose que l’on n’aurait jamais imaginé avant, et que Galilée n’a pas réussi à faire accepter tout de suite. Il l’a démontré scientifiquement, en utilisant sa raison, ses connaissances et grâce aux progrès de la science, en particulier la lunette astronomique sans laquelle Galilée n’aurait jamais réussi.Ce dernier type de croyance est donc totalement différent de ceux ayants comme cause l’ignorance ou l’illusion. C’est la conscience de la croyance qui la rend si opposée aux deux autres sources de croyance. Celle-ci ne refuse pas la réalité mais l’accepte. Conclusion : Il faut bien comprendre qu’il y a plusieurs sources à la croyance.Le critère de séparation entre croyance et savoir est le critère de « vérité ». Dans notre deuxième conception, comme c’est la faiblesse qui est à l’origine de la croyance, on abolit la différence entre savoir et croyance : il y a de bonnes et mauvaises croyances : les bonnes trouvent leur source dans la lucidité face à la réalité, les mauvaises dans le déni de la réalité.

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