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FLAUBERT: la fonction des Comices agricoles dans Madame Bovary.

Publié le 11/09/2006

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Le roman de Gustave Flaubert, Madame Bovary, est arrivé sur la scène littéraire française à l’apogée du mouvement romantique à laquelle l’auteur « a participé et qu’il a incarné « (Collas 1985:11). Loin d’être un roman typique romantique pourtant, Flaubert lui-même l’a décrit comme une « œuvre thérapeutique « (Dousteyssier-Khoze 2010), un remède au romantisme. En fait, Madame Bovary occupe une position historique entre deux mouvements, le Romantisme et le Réalisme, ce qui se manifeste au cours du roman et qui est un trait particulièrement caractéristique de la scène des comices agricoles. Il faut comprendre les comices agricoles dans le contexte plus large du roman. On se trouve au cœur de l’histoire d’Emma Bovary après que le lecteur a fait témoin des déceptions et souffrances initiales d’une vie qui l’ennuie si intensément. Sa première liaison inassouvie avec Léon est pour l’instant terminée et dans son état déprimé Emma, rencontre Rodolphe Boulanger «vaniteux, vain et très sur de lui-même « (Pedraz 2001: 228) qui affirme dès leur premier réunion, que « je l’ [Emma] aurais ! «(p.134). Aux comices on verra principalement le commencement de leur intrigue. Le passage - dont Flaubert lui-même était très fière - est remarquable grâce à son structure extraordinaire et symphonique. D’ailleurs la scène des comices est une « représentation de la structure sociale « (Fairlie:1962:30) qui permet à Flaubert d’élargir l’échelle de son œuvre car tous les personnages y figurent et donc elle est en plus un moyen pour l’auteur de situer l’histoire dans un contexte réel pour son public du dix-neuvième siècle. On pourrait soutenir que les comices agricoles ont trois fonctions dans Madame Bovary. Ils fonctionnent comme une étape importante dans le développement du personnage d’Emma, comme une représentation de la société contemporaine et au niveau structural du roman comme un axe crucial. Dans cette dissertation je vais analyser de près ces trois fonctions afin de comprendre l’importance primordiale des comices agricoles dans l’œuvre. La première fonction que je considérai sera le rôle des comices agricoles en ce qui concerne le déroulement de l’histoire personnelle d’Emma Bovary et en particulier leur signifiance par rapport à la création d’une juxtaposition frappante des concepts du réalisme et romantisme. « A l’origine [le chapitre] est inventé comme une occasion de rencontre entre Rodolphe et Emma… une péripétie utile au récit. « (Gothot-Mersch 1966 :132). Le passage fournit de façon importante le prétexte pour Rodolphe de commencer à séduire Emma. Il faut insister sur la valeur de l’alternance entre cette tentative de séduction et les discours officiels qui se passent à l’arrière-plan. L’apposition des idées est caractéristique de Flaubert et donne à son écriture une richesse et une complexité unique. Le contraste aux comices entre le discours verbaux de M. Lieuvain et les déclarations également verbeuses de Rodolphe sont tous les deux discrédités par leur « proximité mutuelle «. (Defaye 1998:49) Cette juxtaposition est manifestement un exemple de l’ironie verbale où Flaubert fait la satire du thème du romantisme. Pendant que M. Lieuvain parle de la communauté et leurs responsabilités morales, Rodolphe se prononce à Emma comme un exposant d’une moralité et d’un amour qui sont plus nobles que les mœurs communes, malgré le fait qu’il encourage l’adultère. Ses idées affectées sur le bonheur et l’amour tentent aux rêves idéalistes d’Emma et sont d’autant plus fausses car le discours officiel « semble fournir à Rodolphe ses thèmes « (Riegert 1992:65). Quand le conseiller parle des « devoirs « Rodolphe déclare « Ah ! Encore […] Toujours les devoirs « (p.148). L’ironie de la scène des comices a en effet une fonction à double emploi. Non seulement serve-t-elle comme une occasion signifiante pour Flaubert de critiquer le romantisme et les clichés, mais aussi l’apposition des mots séduisants de Rodolphe et du thème quasi animal et donc violent d’agricole, prédit la souffrance potentielle qui résiderait pour Emma dans une liaison avec Rodolphe. Guy Riegert (1992) explique ; « les…expressions ridicules du discours officiels semblent dévoiler la face cachée du discours amoureux et le réduire à ce qu’il est : l’instrument grossier d’une cynique entreprise de séduction « (66). Flaubert introduit ici une nouvelle nuance ironique définie par Gothot-Mersch (1971) dans l’introduction de son édition du roman « Rodolphe n’est pas dupe ; s’il exprime en idées reçues, c’est par stratégie consciente «. (60) Rodolphe lui –même contribue à la dérision du romantisme d’Emma et comprend qu’il pourrait l’utiliser à son avantage. Il et significatif aussi qu’une liaison qui satisfera Emma par gratification jouisseuse serait basée sur une séduction associée au monde physique surtout contrairement à la future relation plus sentimentale et romantique avec Léon. La deuxième fonction cruciale des comices agricoles est de représenter un thème importante du roman - la satire des mœurs de province et par parenthèse une critique de la bourgeoisie. Au cours du roman, Yonville et ses « paysage[s] sans caractère « (p.72) sont éclipsés par les grandes villes Rouen et Paris qui représentent l’évasion et la prospérité. La campagne en revanche symbolise la conformité et la médiocrité, les caractéristiques qui sont satirisées dans cet extrait. En quelque sorte le passage, fonctionne comme un point culminant de tous ces critiques de la province ressassée. Les critiques proviennent de plusieurs sources, au début de Madame Lefrançois assombrie par la jubilation, de Rodolphe qui demande à Emma « Est-ce que cette conjuration du monde ne vous révolte pas ?« (p.150), puis de l’auteur : « Tous ces gens-là se ressemblaient « (p144) et d’Emma par son désintérêt constant. En outre au début du chapitre, « tout en se moquant des comices « (p.141) Rodolphe contribue à la satire de la petite bourgeoisie en faisant « les plaisanteries des dames d’Yonville « (p.141) qui ne s’intéressent qu’à une discussion sur leur toilette. Dans l’extrait Flaubert approfondie sa dérision de la vie provinciale en présentant les habitants de Yonville « comme autant de pantins ridicules « (Riegert 1992:37) et ils sont souvent comparés aux mêmes animaux qu’ils sont en train de juger. En plus, le déroulement des comices est raillé, comme A. Fairlie souligne (1962) « C’est typique de la province insatisfaisante que le préfet…envoie au dernier moment un remplaçant et que les feux d’artifice… sont humides. « (31). Le discours routinier et peu vivant de M. Lieuvain évoque une ambiance de l’ennui aux comices qui est renforcé par le détachement et le désintérêt supérieur d’Emma et Rodolphe qui sont bien enlevés des événements. Bien qu’il ridiculise les paysans, c’est la classe moyenne au cours du passage qui est la cible la plus évidente de la satire. La classe moyenne au village de Yonville est composée de petits bourgeois et « le cadre étriqué d’Yonville « démontré aux comices agricoles, donne à tous « un caractère de médiocrité « (Gothot-Mersch 1966:227). Au cours du roman l’épitomé de la bourgeoisie et par conséquent la bêtise humaine est indéniablement Homais, qui est tourné en ridicule au début du chapitre à cause de son enthousiasme pour les comices. Puis à la fin, bien qu’ils soient enfin évidemment un échec, Homais –qui a encore une fois tort- affirme très ardemment dans son reportage pour le journal local, qu’ils étaient un triomphe. Les comices servent aussi à évoquer les différences et entre la bourgeoisie et les paysans. Les bourgeois à cette époque essayaient de définir leur position dans la société en évolution. Ainsi dans le roman leur désir de s’établir et la fixation sur la prospérité sont critiqués à plusieurs reprises. Les comices agissent comme un moyen de critiquer les inégalités sociales et de montrer clairement ceux qui bénéficient de la structure sociale comme par exemple Homais et Lheuruex, et ceux qui sont désavantagés comme Catherine Leroux. En plus le discours officiel flagorneur est en effet condescendant envers les paysans car l’éloge des ouvriers est énormément exagéré. On pourrait constater que la paysanne vertueuse mais parfaitement abasourdie par les éventements - Catherine Leroux - en recevant une médaille d’argent aux comices est représentative des insuffisances du régime. Sa soumission et complaisance automatique « démontre la vide de… [la] rhétorique « (Green 2009:165) Finalement, à propos de la fonction des comices agricoles_ _comme une marque de la structure formelle du roman. L’œuvre est devisé en trois parties et au centre de chaque partie il existe « une relatif symétrie autour d’un axe central « (Defaye 1992:45). Les sections au milieu de chaque partie sont les suivants; la noce qui est un symbole des espoirs initiales d’Emma, puis l’adultère aux comices qui a été provoqué par les déceptions du mariage et finalement ces liaisons échouées et inachevées conduisent Emma vers la mort - qui se trouve au centre de la troisième partie. Grace à sa position centrale dans la partie au milieu du livre le chapitre des comices fonctionne comme un axe crucial du roman autour duquel l’œuvre entièrese tourne. En conclusion, le chapitre central des comices agricoles a une fonction primordiale dans Madame Bovary plus que tous autres passages symphoniques ou complexes comme la noce ou le bal Vaubyessard. Au sein du chapitre presque tous les thèmes importants dans le livre se dégagent. Flaubert réussit à évoquer avec tant de comique et d’ironie la bêtise des bourgeois, la conformité des paysans, les insuffisances de la structure sociale et encore plus importante, renforce-t-il aux comices la futilité d’une vie menée à travers du romantisme. Bibliographie :

Flaubert Gustave (1971) _Madame Bovary - Mœurs de Province, Sommaire biographique, introduction, not bibliographique, relevé des variantes et notes par Claudine Gothot-Mersch_, Paris : Éditions Garnier Frères Brombert, Victor H (1966)_The novels of Flaubert: a study of themes and techniques_, Princeton: Princeton University Press - pp.57-69 Collas, Ion K (1985) _Madame Bovary: a psychoanalytic reading_, Genève: Droz Defaye, Thomas (1998) Gustave Flaubert, « Madame Bovary «, Paris: Bréal Éditions Fairlie, Alison (1962) Flaubert: Madame Bovary, London: Arnold Gothot-Mersch, Claudine (1966) La Genèse de Madame Bovary, Paris: J Corti *Green,* Anne, (2009) Madame Bovary et les savoirs de l’exposition, in Rey, Pierre-Louis & Séginger Gisèle, (eds) Madame Bovary et les savoirs, Paris : Presses Sorbonne Nouvelle, pp 157-165 Heath, Stephen (1992) Gustave Flaubert, Madame Bovary, Cambridge: Cambridge University Press Pedraz, Manuela Ledesma (2001) _Les échos de la fête dans Madame Bovary de Gustave Flaubert _: Universidad de Jaén, Found at URL :http://www.uv.es/dpujante/PDF/CAP1/B/M_Ledesma.pdf (accessed 1/03/2010) Privat, Jean-Marie (1994) Bovary Charivari : essai d’ethno-critique, Paris : CNRS éditions – pp.63-69 Riegert, Guy (1992) Madame Bovary (1856), Flaubert : résumé, personnages, thèmes, Paris : Hatier Zenkine, Serge (1996) Madame Bovary et l’oppression réaliste, Clermont-Ferrand : Association des Publications de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Clermont-Ferrand

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