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Gautier, le Capitaine Fracasse (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Gautier, le Capitaine Fracasse (extrait). Désorientés par la perte de Matamore, l'un de leurs compagnons mort de froid dans le chapitre précédent, les comédiens de la troupe itinérante cherchent à renflouer leurs finances. Dans cet extrait du chapitre qui donne son nom au roman, le baron de Sigognac, qui les accompagne depuis le début du texte, va se proposer de remplacer Matamore. Abandonnant ainsi son titre de noblesse, le jeune aristocrate amoureux d'Isabelle, la jeune ingénue de la troupe, décide de devenir comédien, et se baptise lui-même du nom de « capitaine Fracasse «. Le Capitaine Fracasse de Théophile Gautier (chapitre 7) « Mais quelle pièce jouerons-nous, dit Scapin, au cas où le village se rencontrerait à propos ? Notre répertoire est fort détraqué. Les tragédies et les tragi-comédies seraient du pur hébreu pour ces rustiques ignorants de l'histoire et de la fable, et n'entendant pas même le beau langage français. Il faudrait quelque bonne farce réjouissante, saupoudrée non de sel attique, mais de sel gris, avec force bastonnades, coups de pied au cul, chutes ridicules et scurrilités bouffonnes à l'italienne. Les Rodomontades du capitaine Matamore eussent merveilleusement convenu. Par malheur Matamore a vécu, et ce n'est plus qu'aux vers qu'il débitera ses tirades. « Lorsque Scapin eut dit, Sigognac fit signe de la main qu'il voulait parler. Une légère rougeur, dernière bouffée envoyée du coeur aux joues par l'orgueil nobiliaire, colorait son visage pâle ordinairement, même sous l'âpre morsure de la bise. Les comédiens restèrent silencieux et dans l'attente. « Si je n'ai pas le talent de ce pauvre Matamore, j'en ai presque la maigreur. Je prendrai son emploi et le remplacerai de mon mieux. Je suis votre camarade et veux l'être tout à fait. Aussi bien j'ai honte d'avoir profité de votre bonne fortune et de vous être inutile en l'adversité. D'ailleurs, qui se soucie des Sigognac au monde ? Mon manoir croule en ruine sur la tombe de mes aïeux. L'oubli recouvre mon nom jadis glorieux, et le lierre efface mon blason sur mon porche désert. Peut-être un jour les trois cigognes secoueront-elles joyeusement leurs ailes argentées et la vie reviendra-t-elle avec le bonheur à cette triste masure où se consumait ma jeunesse sans espoir. En attendant, vous qui m'avez tendu la main pour sortir de ce caveau, acceptez-moi franchement pour l'un des vôtres. Je ne m'appelle plus Sigognac. « Isabelle posa sa main sur le bras du Baron comme pour l'interrompre ; mais Sigognac ne prit pas garde à l'air suppliant de la jeune fille et il continua : « Je plie mon titre de baron et le mets au fond de mon portemanteau, comme un vêtement qui n'est plus de mise. Ne me le donnez plus. Nous verrons si, déguisé de la sorte, je serai reconnu par le malheur. Donc je succède à Matamore et prends pour nom de guerre : le capitaine Fracasse ! -- Vive le capitaine Fracasse ! s'écria toute la troupe en signe d'acceptation, que les applaudissements le suivent partout ! « Source : Gautier (Théophile), le Capitaine Fracasse, 1863. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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