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La Morte Amoureuse - Le Cimetiere

Publié le 24/09/2010

Extrait du document

 

1) La première ligne du texte commence avec la parole de l'abbé Sérapion: "C'est bien ici" : cela annonce une scène, comme dans un film ou l'on entendrait la voix avant de voir l'action. Mais c'est aussi une preuve de la domination de Sérapion dans l'extrait, c'est lui qui guide l'action, et accomplie chaque geste, alors que bizarrement Romuald ne fait que le regarder creuser, et ouvrir la tombe, bien que cette action semble difficile à accomplir. 

Dans les premières lignes les actions de l’abbé s’enchaine, vues par Romuald « il glissa la pince dans l’interstice «, « il se mit à l’ouvrage avec la pioche «. Ensuite, Romuald décrit sa position à lui : « Moi, je le regardais faire, plus noir et plus silencieux que la nuit elle-même «. Le narrateur nous décrit d'abord Sérapion à l'oeuvre, avant de nous dévoiler ses propres pensées. Ensuite il décrit le cimetière autour : nous avons l'impression de suivre sa vision, se posant sur les choses qui l'entourent, et les pensées qui en découlent. Ces pensées sont d'ailleurs interrompus par l'abbé heurtant le cerceuil de Clarimonde , " enfin ". Il enlève le couvercle et laisse voir la "pauvre" courtisane au yeux de son amant et du lecteur. Mais cette vision fait entrer l'abbé "en fureur" : "ah! te voilà, démon, courtisane impudique, buveuse de sang et d'or!" : l'abbé est le seul dans cette scène à s'exprimer au discours direct, et de manière général dans la nouvelle, les voix de Clarimonde et Sérapion sont exprimées alors que nous n'avons jamais que les pensées du narrateur : il est passif, le terrain d'un duel entre les forces du mal et du bien, entre Clarimonde et Serapion, bien que ces notions soit ici tout à fait ambigues. Ensuite, Sérapion s'adresse à Romuald, lui faisant la moral, mais surtout pour exprimer sa victoire, celle de la religion "Voilà votre maitresse, seigneur Romuald, dit l'inexorable prètre en me montrant ces tristes dépouilles, serez-vous encore tenté d'aller vous promener au Lido et à Fusine avec votre beauté?" : Sérapion est sarcastique, il est dans une attitude de défi et de fierté personnelle : il a vaincu Clarimonde. Pourtant c'est bien la une victoire qui relève de l'égo du prètre, puisque Romuald ne semble pas s'en porter beaucoup mieux. 

 

2) En 1836 est publié La Morte amoureuse de Théophile Gautier, une nouvelle fantastique qui raconte la vie bicéphale d’un jeune prêtre, Romuald : après avoir croisé les yeux de la belle et diabolique Clarimonde le jour de son ordination, il rêve chaque nuit une vie de fête, d’excès et d’amour, très loin de la réalité austère de la vie de l’homme d’église qu’il est la journée. 

Dans l’extrait que nous allons étudier, Romuald et l’abbé Sérapion se trouve au cimetière ou est enterré la dépouille de Clarimonde. Sérapion a en effet 

convaincue Romuald de l’accompagner déterrer le corps de sa bien aimée, afin de lui révéler la laideur de cette dernière, morte depuis un certain temps, et ainsi défaire Romuald de son emprise. Cependant nous savons que Romuald va regretter cette vie de possesion, et sa narration nous fait sentir qu'au lieu de se sentir soulagé il est nostalgique:  Comment l'auteur a t il representé ici l'inversion des valeurs du bien et du mal, la limite confuse entre dieu et le diable ? Nous verrons en premier l'inversion dans le couple Sérapion/Clarimonde, puis le point de vue du narrateur, lui aussi incohérent, qui montre l'avis de l'auteur sur la scène, et enfin le traitement fantastique du texte accentuant le côté sinistre de la scène,qui est pourtant censé être le sauvetage du prêtre. 

 

Dans La Morte amoureuse, le personnage de l’abbé Sérapion peut être vue comme le double austère de Clarimonde : il incarne la religion mortifère, qui a pour but de détourner ses hommes des plaisirs tentateurs, il intervient pour remettre Romuald dans le « droit chemin «, celui de Dieu. A l’inverse Clarimonde entraine le prêtre dans ce monde des péchés, elle est la beauté, la jeunesse, le plaisir, incarnés en une personne.  De plus, à chaque apparition de la courtisane Clarimonde, l’abbé apparaît ensuite dans une nouvelle scène pour raisonner Romuald : il agit comme sa mauvaise conscience, moralisatrice et sévère. 

Pourtant, la figure du prêtre est ambiguë, et la façon dont il est présenté le fait souvent paraître sombre et inquiétant. En effet, l’auteur n’approuve pas cette religion, qui ressemble plus ici à une prison, et fait en sorte que le lecteur penche en la faveur de Clarimonde. `

Dans cet extrait Gautier dit clairement que Sérapion, occupé à profaner la tombe de la morte amoureuse,  ressemble plus à un démon qu’à un ange, les efforts physique qu’il déploie pour ouvrir le tombeau sont décrits par la narration subjective de Romuald qui ressent cet acte comme un « abominable sacrilège «, il décrit l’abbé comme haletant et ruisselant de sueur, et note que son souffle ressemblait « à un rale d’agonisant «. Son zèle à accomplir la tache a quelque chose « de dur et de sauvage «: l'abbé est apparenté à une bête/  De plus le contexte du cimetière en pleine nuit lui rend tout effrayant, la lumière de la lanterne découpe le visage de Sérapion, « aux grands traits austère «, de manière très peu rassurante. Il travaille avec rage, et entre « en fureur « en apercevant le corps de Clarimonde, sur lequel il renverse l’eau bénite. Son portrait et son comportement font donc peu penser au calme et à la beauté divine , ils sont loin d'être angelique, l'abbé déploie trop de haine pour détruire le règne de Clarimonde sur son prètre pour que cela ne soit pas suspect. 

 

Le narrateur et l’auteur partage le même respect et amour de la beauté : elle est ici violer, puisque la sublime Clarimonde va être reduite en cendre par Sérapion. C’est ce dernier qui commet un péché ici, une hérésie envers la religion qu’est la beauté pour Gautier, il est donc montré comme un démon a l’œuvre plus que comme le sauveur des âmes. Romuald lui de son côté est 

 

désespéré du « spectacle « auquel il semble assister malgré lui, c’est l’abbé qui accomplie toute l’entreprise tandis que le prêtre le regarde, la mort dans l’âme : dans les premières lignes les actions de l’abbé s’enchaine, vues par Romuald « il glissa la pince dans l’interstice «, « il se mit à l’ouvrage avec la pioche «. L’extrait commence ainsi : « « C’est bien ici « dit Sérapion « : c’est bien lui qui guide l’action. Ensuite, Romuald décrit sa position à lui : « Moi, je le regardais faire, plus noir et plus silencieux que la nuit elle-même «. Romuald dit voir la scène comme un "abominable sacrilège", et souhaite que sorte des nuages « un triangle de feu qui le réduisit en poussière « : les valeurs sont inversées, le prêtre souhaite que la punition divine s’abatte sur l’abbé, alors qu’il est en train de travailler pour son salut en voulant  le délivrer de la possession de Clarimonde. Cette dernière est appelé « la pauvre Clarimonde « et il est dit que « son beau corps tomba en poussière «, ne laissant que des « tristes dépouilles « : ces adjectifs nous inspire de la pitié pour elle. Romuald qui devrait être soulagé et terriblement affligé de la disparition de la courtisane, à l’instant ou elle devient cendre « une grande ruine « se fait en lui, loin d’être sauvé il n’est que plus malheureux, l’amour et la beauté sont donc plus forts et réels en lui que la religion et Dieu, qui pourtant finis par triompher grâce à la volonté de l’abbé.

 

Le fantastique, qui est le style général de la nouvelle, est ici particulièrement présent dans l’atmosphère. La scène se déroule en effet au cimetière, et l’auteur se sert largement de ce décor pour renforcer le côté sinistre de ce qui s’y passe : Romuald pense que dans ce contexte les deux personnages ressemblent plus à des « profanateurs et des voleurs de linceuls, que pour des prêtre de Dieu «: la nuit déforme tout et trouble les frontières du bien et du mal.

 Il se sent couvert « d’une sueur glaciale «, et dit que ses cheveux « se dressent douloureusement sur sa tête «, comme s’il était devant une scène d’horreur, tellement le fait dont il est témoin s’y apparent à ses yeux, alors qu'elle devrait être sa redemption. 

L’auteur utilise des éléments fréquemment liés au mystère et à la peur,  ayant une lourde symbolique: les cypres symbolisent la vie éternelle, ils sont appelés « l’arbre des cimetières «, et son associés à la mort, car ils sont généralement présents dans les cimetières. Dessus sont perchés «, les « hiboux «, oiseaux de nuit, dont l’image est liée au surnaturel, à la magie noire, ici ils sont « inquiétés « par la lumière de la lanterne et viennent « fouetter lourdement la vitre avec leurs ailes poussiereuses «, accompagnés de « gémissements plaintifs « , les renards "glapissaient dans le lointain" et "milles bruits sinistres se dégageaint du silence" : tout ces mots font partie du champ sémantique de l'etrange, du bizarre, comme les « sombres nuages « qui roulent « pesamment «, mais aussi tout le portrait de l'abbé, "agonisant", "démon", ...

 

Nous pouvons donc voir que l'auteur se sert de son écriture pour montrer sa vision de la religion, et son amour de la beauté : si cela est vraie dans toute la nouvelle, c'est particulièrement voyant ici. Ce passage qui est censé mener à la délivrance du prètre, etre representé comme son contraire: loin d'être un soulagement la scène est une torture pour Romuald, le diable incarné en Clarimonde nous inspire de la peine, alors que l'homme de Dieu, Sérapion, nous semble terrifiant et bizarre.

 

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