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Le clergé en 1789 (Histoire)

Publié le 13/02/2011

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histoire
Le clergé en 1789
 
L'année 1789 a en France, fortement marqué les esprits. Temps fort dans une période de lutte révolutionnaire, elle est le grand ébranlement dont procède toute l'histoire du XIX's. Cette période s'inscrit d'ailleurs elle-même dans un processus de transformation sociétale. Le clergé se trouve au cœur de ces réformes sociales, et pour lui, 1789 en a été l'année. La place de la religion et ses rapports avec la société civile est un des domaines où la Révolution a transformé l'ordre établi de façon irréversible.
 
Les réformes et mesures imposées au clergé tt au long de 89 ont-elles été la césure, la remise en cause des rapports entre l'État et l'Église, et même d'une scission au sein même du clergé ? L'année 89 a-t-elle été, vis à vis du clergé, antireligieuse et/ou anticléricale ?
 
Premier temps.
Dès janvier:
organisation des élections des députés aux États-Généraux. Chaque ordre vote à part pour élire ses représentants lors d'assemblées de paroisses. Le corps électoral du clergé s'est vu grossi de la totalité des curés issus du Tiers-Etats, ce sont eux qui rendront les assemblées du clergé si houleuses de par leur opposition avec les prélats* du haut clergé. Ces assemblées verront l'élection de 200 curés et de 91 prélats.
Parallèlement à ces élections, rédactions de cahiers de paroisses, mis en forme et résumés lors des assemblées qui deviendront des cahiers de doléances. Cahiers (plus de 60 000)en partis rédigés par des curés.
Si des demandes sont communes aux trois ordres, il y en a aussi propres au clergé
→ reproche l'ingérence de Rome dans l'Église de France, et un certain nombre des ses membres trouvent à redire sur le Concordat*
→ le bas clergé souhaite restreindre les pouvoirs de l'épiscopat.
→ aussi des demandes concernant le clergé, dans cahiers du Tiers et de la noblesse : affectation des biens de l'Église à des objets ou œuvres d'utilité publique.
 
4 mai. Procession religieuse du St Sacrement à laquelle tte la cour assiste ainsi que l'ensemble des députés des trois ordres. L'étiquette, de mise pour une telle manifestation, fait ressortir d'autant plus les disparités sociales au sein même du clergé : le haut clergé est aux côtés de la noblesse dorée, tandis que le bas clergé accompagne le tiers état.
Aussi, le clergé a beau être le premier des trois ordres, il ressort dès premiers événements de 89 une fracture intérieure (bas/haut cl) et extérieure (biens)
 
fin mai le Clergé, ainsi que la Noblesse, refusent de siéger avec le Tiers à l'Assemblée nationale.
11 juin une motion est déposée par l'abbé Sieyès, invitant Clergé et Noblesse à rejoindre les députés des Communes. Deux jours plus tard, trois curés du Poitou, puis le 16 juin, dix-neuf ecclésiastiques rejoignent les Communes,
 
Deuxième temps.
nuit du 4 août est une date forte : réponse aux insurrections, à la Grande Peur → abolition des privilèges, destruction du régime féodal. En quelques heures de transe collective, ce sont tous les privilèges de l'aristocratie, de l'Église et des provinces qui sont abolis. Et remplacés par le principe - révolutionnaire, au sens strict du terme - de l'égalité de tous devant la loi.
L'article 5 concerne particulièrement le clergé, constituant une des premières failles entre l'Église et la Révolution : la suppression des dîmes, impôts en faveur du clergé, prive de revenus tous les curées et autres membres du bas-clergé à portion congrue, celle-ci étant payée par les riches décimateurs sur le produit des dîmes. Bien plus, les secours apportés aux indigents par les curés de campagne sur leur pécule sont maintenant difficiles à assurer. C'est pourquoi la suppression des dîmes a été fort défendue, notamment par l'Abbé SIEYES qui pense que la suppression de la dîme se ferait au grand détriment du bas clergé et au bénéfice des propriétaires et non des paysans. Le 10 août, L'abbé clôt son discours contre cette suppression ainsi : \"Ne s'agit-il que de frapper le Clergé ? Pas au prix d'une injustice. Ne faisons pas dire à la France, à l'Europe, que le bien même, nous le faisons mal. Ils veulent être libres et ils ne savent pas être justes !\" Malgré ce discours qui marque l'Assemblée, la dîme est supprimée le lendemain sans indemnité. Sieyès est vivement critiqué par certains députés qui pensent qu'il défend les biens du Clergé, voire même ses biens propres. Mirabeau lui dit alors : \"Mon cher abbé, vous avez déchaîné le taureau, et vous vous plaignez qu'il frappe de la corne\".
La nuit du 4 août et la suite de ses événements sont ainsi donc la première fêlure a se faire jour au sein du clergé, et même entre le clergé et la Révolution.

Plus encore, la Déclaration des droits de l'Homme du 26 août rallie une partie des prêtres contre la Révolution par sa philosophie égalitaire et l'affirmation de la liberté individuelle : « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses.. » (art 10)
 
Troisième temps.
Automne 79. le principal problème qui se trouve maintenant posé à la Nation concerne l'effondrement des recettes fiscales. Les moyens classiques comme l'emprunt ou la contribution patriotique ne ramenant à rien, il a fallu se résoudre à des mesures révolutionnaires. Il fallait donc prendre l'argent là où il se trouvait en quantité, c'est à dire dans les coffres du clergé. En effet, les biens du clergé étaient évalués à quelques 2 milliards de livres et représentaient environ 12% du territoire. Ces revenus annuels se montaient à environ 200 millions de livres (120 millions de dîme et 80 millions de revenu immobilier). La répartition de ces revenus entre les différents membres était par contre en désaccord complet avec les évangiles puisqu'un curé congruiste ne disposait que très rarement de plus de 500 livres annuelles alors qu'un haut dignitaire disposait lui de plusieurs centaines de milliers de livres.
Entre alors l'évêque et député TALLEYRAND en scène! 10 octobre, il propose la nationalisation des biens du clergé. En contrepartie, la prise en charge salariale des ecclésiastiques et la détermination du nombre total de ceux ci seront définis par la Nation. La proposition de Talleyrand va être âprement débattue trois semaines durant. Combattue d'un côté par l'abbé Maury, Malouet et Sieyès sur des critères mettant en cause le droit de propriété transgressé par la Nation lorsqu'elle s'approprie les biens d'autrui. Soutenue par ailleurs par Mirabeau ou Thouret lorsqu'ils précisent que ces biens n'appartiennent pas au clergé mais à la masse des fidèles qui leur en ont fait don, donc à la Nation. Le clergé se divise également sur la question. Tout d'abord surpris par la proposition de Talleyrand, les curés se joignent finalement à elle. D'une part la proposition précise que le salaire versé par la Nation ne pourrait être inférieur à 1200 livres annuel soit plus du double que ce dont ils disposent, et d'autre part si la Nation restreint le nombre d'ecclésiastique ce sera la catégorie des prélats et des hauts dignitaires qui en souffrira et non les simples curés.
Le 2 novembre, la loi est votée par 508 voix contre 346. Cette motion précise d'une part que les biens ecclésiastiques seront mis à disposition de l'Etat et d'autre part que tout curé recevra au moins 1200 livres, soit la fin des motions congrus pour le bas clergé. Les prêtres sont donc à ce jour fonctionnaires.
 
Dans l'immédiat, la loi du 19 décembre décide de l'émission d'assignats gagés sur les biens de l'Église réquisitionnés par la Nation. Le capital de 400 millions de livres, la valeur de l'émission est de 1000 livres par bon portant intérêt à 5%. Ce qui aurait pu être une bonne opération, au plan tant économique que politique, va se révéler un désastre : à cause du manque de rigueur dans la mise en place de l'entreprise et de la rapide dépréciation du nouveau papier monnaie, la confiance des investisseurs et des créanciers de l'État s'est effondrée.
 
 
On peut ainsi dire que l'Église catho est la plus grande perdante des réformes de l'été et de l'automne 89. Les Français, qui n'étaient pas spécialement anticléricaux et nullement antireligieux dans l'ensemble ont fait d'une pierre deux coups, en résolvant le problème de la dette publique en dépossédant un des ordres privilégiés de l'Ancien Régime. La masse du clergé et des fidèles a épousé finalement épousé la cause des patriotes. Ni la suppression de la dîme, ni nationalisation des biens n'a profondément affecté l'enthousiasme général, ou mis en cause les rapports de l'Église et de l'État. Le clergé est resté fidèle au rôle national qu'il avait joué au printemps précédent, lors de la réunion des Ordres. Cependant, si jusqu'à la fin de la monarchie, le clergé fut considéré comme le premier ordre de l'État, et les exemptions dont il avait conservé la jouissance lui attirèrent une bonne partie des attaques dirigées contre les privilégiés au moment de la Révolution. Si les révolutionnaires ont voulu régénérer l'Église, c'est qu'ils méconnaissaient la constitution propre de la société religieuse et leur initiative ne pouvait conduire qu'à une rupture. La constitution civile du clergé comportait certes des dispositions inacceptables parce qu'elles portaient atteinte à la structure hiérarchique de l'Église et aux liens entre l'Église gallicane et Rome. Quoi qu'il en soit, la rupture a eu des conséquences incalculables sur la Révolution même, puisque les catho ont été rejetés en bloc dans le camp de la contre-révolution alors que le bas clergé avait apporté au tiers un appoint très précieux et que l'alliance du tiers et du clergé avait permis la révolution.
 
Les conséquences à long terme ont dépassé la période révolutionnaire puisque le conflit entre la Révolution et l'Église catholique pèsera un siècle et demi sur l'Europe entière : c'est le divorce entre la France chrétienne du passé et la France nouvelle. Désormais, le clergé et la religion perdent le soutien séculaire de tout un ensemble d'habitudes, de sentiments et de contraintes collectives.
 
 
 
Prélat haut dignitaire ecclésiastique
Concordat en matière politico-religieuse, un concordat est un traité signé entre le Saint-Siège et un État particulier (ou entre un souverain et le pape pour l'Europe pré-moderne) dans le but de définir les domaines respectifs et clarifier les relations entre l'Eglise et les autorités civiles du pays signataire (ou concordataire). 

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