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Le Cumul des mandat sous la Véme République

Publié le 30/10/2013

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Le cumul des mandats sous la Ve République Le cumul des mandats, ou cumul des fonctions électives est une pratique courante, tout particulièrement le cumul du mandat parlementaire et de fonctions exécutives locales. Toutefois, Bernard Chantebout souligne que ce phénomène est considéré par la doctrine comme une « tare majeure « de notre système. Il s'est progressivement enraciné dans les structures républicaines, mais il n'a jamais été aussi important. Même s'il existait sous la IIIe République (35,7% des parlementaires avaient un autre mandat) et la IVe (42%), il s'amplifie sous la Vème (85%). Ainsi, en 1958, à peine 63% des députés exerçaient un second mandat ; en 1973, déjà 75% des députés étaient concernés. Pendant la Xe législature (de 1993 à 1997), 523 députés étaient en situation de cumul de mandats, soit 91% de l'effectif total. Actuellement, ce taux s'élève à peu près à 85%, à l'Assemblée nationale (dont 47% des députés-maires) comme au Sénat (dont 36% de sénateurs-maires). Ce phénomène est d'autant plus paradoxal qu'un certain nombre de lois ont été adoptées dans le but de le limiter. Quelques chiffres du cumul des mandats au Parlement Février 2007 Assemblée nationale (577 députés) Sénat (331 sénateurs) Membres d'un conseil municipal 66% (380 dont 269 maires) 60% (200 dont 120 maires) Membres d'un conseil général 25% (142 dont 16 présidents) 34% (112) Membres d'un conseil régional 12% (67 dont 6 présidents) 8% (24) Titulaires d'un mandat communal et d'un mandat départemental 11% (66) 20% (65) Titulaires d'un mandat communal et d'un mandat régional 2% (14) 2% (7) Membres sans aucun mandat 12% (68) 21% (68) Un cumul des mandats critiquable Le cumul des mandats a deux conséquences principales : 1)Le manque de renouvellement du personnel politique : un cumulant (des hommes en majorité) a deux fois plus de chances d'être réélu qu'un non-cumulant, donc peu de renouvellement des investitures, surtout au détriment des femmes. Le pouvoir est capté par un groupe restreint d'élus. 2)L'absentéisme à l'Assemblée nationale : généralement, les députés remplissant une fonction exécutive locale ne vont à l'Assemblée nationale qu'un ou deux jours par semaine. 3)Le mépris pour les électeurs : ces derniers peuvent se sentir en quelque sorte trompés dans la mesure où ils votent pour un candidat qui ensuite se retire, bien souvent au profit d'un inconnu. La législation La loi définit le régime des incompatibilités, c'est-à-dire l'interdiction d'occuper deux fonctions incompatibles afin d'assurer l'indépendance des représentants de la nation face à d'éventuelles pressions ou tentations. On distingue les règles relatives aux incompatibilités entre fonctions électives, et celles relatives aux incompatibilités entre fonctions électives et fonctions non électives. Le candidat élu doit alors choisir entre son mandat et l'exercice des fonctions incompatibles. Jusqu'en 1985, aucune règle spécifique ne régissait le cumul des mandats. En effet, la Constitution de 1958 n'avait prévu qu'une seule situation d'incompatibilité : celle entre le mandat de parlementaire et l'appartenance au gouvernement. En 1985 et 2000, deux lois organiques sont adoptées afin de renforcer le régime des incompatibilités, et par là même tenter de réduire le cumul des mandats. ? Députés et sénateurs Le cumul entre mandats parlementaires Le cumul des mandats de député et de sénateur est interdit et depuis la loi organique du 5 avril 2000 un député ou un sénateur ne peut pas non plus cumuler son mandat de parlementaire national avec celui de représentant au Parlement européen. Ces incompatibilités ont un effet immédiat, c'est-à-dire que si un député est élu sénateur, et vice versa, il cesse immédiatement d'appartenir à la première assemblée ; et si un député ou un sénateur est élu au Parlement européen, il cesse immédiatement d'exercer son mandat national. Il en est de même pour un membre du Parlement européen élu député ou sénateur. Le cumul du mandat parlementaire avec d'autres mandats électifs L'exercice d'un mandat parlementaire et l'exercice de plus d'un mandat local sont également interdits. La loi organique du 30 décembre 1985 met fin au cumul illimité des mandats. Les parlementaires ne peuvent désormais détenir qu'un seul autre mandat électif. La loi organique du 5 avril 2000 (loi organique nº2000-294 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux), impulsée par Lionel Jospin, alors premier ministre, rend plus rigoureux le régime des incompatibilités entre les fonctions de parlementaires et l'exercice de mandats locaux. Cependant, à la vue des ambitions initiales, cette loi peut paraître décevante. En effet, les deux assemblées se sont opposées à la disposition interdisant le cumul d'un mandat parlementaire et d'une fonction exécutive locale (maire, président de conseil général, président de conseil régional). L'argument selon lequel un député a besoin d'un ancrage local a notamment été utilisé pour refuser cette réforme. L'exercice d'un mandat local, limité à un seul, reste donc compatible avec la fonction parlementaire, dans des conditions toutefois plus restreintes. Selon l'article L.O. 141 du code électoral, « le mandat de député est incompatible avec l'exercice de plus d'un des mandats énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à l'Assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal d'une commune d'un moins 3500 habitants. «. Les 34 000 communes de moins de 3500 habitants sont par conséquent exclues du dispositif. Désormais, un député peut exercer un mandat de conseiller régional ou général, tout en restant conseiller municipal d'une commune de moins de 3500 habitants. Avant, ce même député pouvait également être maire d'une commune de moins de 20 000 habitants ou adjoint au maire d'une commune de moins de 100 000 habitants, autre que Paris. Par conséquent, il est possible pour un parlementaire d'être également titulaire d'un mandat départemental ou régional et d'un mandat municipal dans une commune de moins de 3500 habitants. ? Élus locaux et parlementaires européens La loi du 5 avril 2000 a renforcé les incompatibilités entre mandat de représentant au Parlement européen et mandats locaux. En effet, elle prévoit qu'un parlementaire européen non seulement ne peut pas exercer un mandat parlementaire national, mais ne peut pas non plus exercer plus d'un mandat électoral parmi les mandats de conseiller régional, conseiller à l'Assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris ou conseiller municipal. La loi interdit en outre à un député européen d'être à la tête d'un exécutif local. Toutefois, la loi du 11 avril 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen a rétabli la possibilité du cumul entre le mandat de représentant au Parlement européen et la fonction exécutive locale. Ainsi, un parlementaire européen peut à nouveau exercer une des fonctions exécutives suivantes : président du conseil régional, président du conseil général (ou président du conseil exécutif de Corse), ou maire. En cas d'incompatibilité des mandats, l'élu dispose d'un délai de trente jours à compter de la date de l'élection pour régulariser sa situation, c'est-à-dire démissionner de l'un des mandats qu'il exerçait auparavant. De même, si un parlementaire européen acquiert un troisième mandat local, ce qui est prohibé, il doit conserver les mandats de son choix dans un délai de trente jours. ? Fonctions exécutives locales Un élu local ne peut être titulaire de plus de deux mandats électoraux parmi les suivants : conseiller régional, conseiller à l'Assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris et conseiller municipal. Cependant, les fonctions de chefs d'exécutifs locaux sont strictement incompatibles entre elles. Une législation critiquable La législation actuelle relative au régime des incompatibilités présente plusieurs inconvénients : Elle est peu déchiffrable et peu lisible pour les citoyens et les novices. Elle est peu efficace, car elle n'atteint pas le c?ur du système (cumul des fonctions parlementaires et locales). Elle laisse de côté la question du cumul en grappe, c'est-à-dire quand un leader contrôle un territoire par la présence de personnes interposées. Elle maintient la règle de mise à jour d'incompatibilité après l'acquisition d'un nouveau mandat. Les candidats sont ainsi dans une optique de recherche de multipositionnalité optimale (recherche du cumul le plus favorable). Un titulaire de deux mandats compatibles peut postuler à un troisième mandat à condition d'en quitter un des trois après l'élection. L'obligation de quitter un mandat avant de se présenter à un troisième serait un frein au cumul des mandats. Elle maintient un système injuste au profit des parlementaires : pourquoi est-il plus normal d'être parlementaire et maire que maire et président du conseil régional ? Elle laisse de côté les institutions intercommunales. Bien que l'interdiction du cumul des mandats est un thème récurrent dans la communauté politique, et notamment sur les programmes électoraux de nombreux partis politiques, elle semble pour l'instant compromise. L'argument principalement utilisé pour maintenir cette situation est le fait que le Sénat, représentant des collectivités locales, est opposé à la prohibition du cumul des mandats. Or, selon Bernard Chantebout, ce n'est qu'un prétexte dans la mesure où il est tout à fait possible d'élaborer un régime différent entre le Sénat et l'Assemblée nationale, ou encore de faire appel à l'arbitrage populaire par le biais d'un référendum. En réalité, ce qui dérange le plus est le fait que ces deux dernières solutions nécessiteraient un réexamen en profondeur du statut des élus. L'accueil de la proposition du rapport Balladur d'interdire totalement le cumul des mandats est particulièrement significatif. Bernard Accoyer, l'actuel président de l'Assemblée nationale, s'est immédiatement déclaré hostile à cette idée. Par conséquent, cette proposition a peu de chance d'être retenue.

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