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Lecture analytique : L'esclave vieil homme et le molosse de P. Chamoiseau

Publié le 09/11/2011

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Introduction :

 

« L'Esclave vieil homme et le molosse » est un roman écrit, publié en 1997 par Chamoiseau, dont l'oeuvre est un dessein de la culture populaire en Martinique et du combat des petites gens. Ainsi, nous allons étudier l'extrait d'un plaidoyer contre l'esclavagisme dans cette région. Ce passage conte la fuite d'un vieil esclave de la maison de son maître, qui se fait poursuivre par leur chien dans la jungle martiniquaise. En quoi cet extrait nous montre-t-il que la mort est le prix à payer pour la liberté d'un esclave ? Dans un premier temps, nous étudierons le sentiment de liberté qu'éprouve le narrateur lorsqu'il fuit, puis nous montrerons qu'il accepte son prix, la mort.

 

  1. La liberté retrouvée d'un esclave :

 

Dans cet extrait, nous retrouvons une grande liste de sentiments, de sensations éprouvées par un vieil esclave qui n'a vécu que le travail forcé, les interdictions, les ordres. Ses émotions ressortent principalement par des pleurs : en effet, le verbe « pleurer », à l'infinitif ou sous la forme « je pleurais » puisque le narrateur est interne, est répété six fois, dans un seul et même paragraphe (Lignes 1, 2, 3, 5, 8 et 9). Ajoutons le nom « larmes » (ligne 2), qui souligne ce champ lexical des pleurs. Il s'agit de toute évidence de larmes de joie qui montrent le bonheur qu'éprouve l'esclave après s'être échappé : « Je pleurais aussi sur cette vie retrouvée qui m'enivrait les jambes » (ligne 3) ; « Je pleurais cette fraîcheur découverte dans mes chairs, cette magie de mes yeux qui enchantait le monde » (lignes 5, 6) ; « Et je pleurais tout cela, sans tristesse ni souffrance ». Le vieil homme découvre le monde, notamment les sens avec la vue : « cette magie de mes yeux qui enchantait le monde »,le goût « cette bouche où explosaient les goûts », le toucher « le sensible de mes mains et du reste de mon corps. » (lignes 5 à 7). Cette liberté est aussi signe d'une nouvelle jeunesse chez l'homme. Il affronte sans peur, malgré son âge, la férocité d'un molosse. Il retrouve une nouvelle énergie : « ce vieux coeur qui brûlait chaque seconde mille ans d'existence » (ligne 4).

 

        II. Le prix à payer pour cette liberté

 

Mais l'esclave a beau avoir retrouvé cette liberté, il n'en connaît pas moins le prix à payer. La course folle devant ce molosse enragé lui permet seulement de goûter un peu plus longtemps à ce qu'il a tant désiré. Ce qui l'attend à la fin de cette fuite, c'est la mort. L'homme en est conscient et il l'accepte. Ainsi, il montre qu'il préfère mourir en ayant pu éprouver le sentiment de liberté, ne serait-ce que le temps de cette course, que de mourir de vieillesse sans avoir pu s'offrir ce plaisir. Au sein même de ses paroles heureuses face à la liberté, il revient toujours à la réalité sans souffrir pour autant : « le malheur de ce chien qui allait me détruire » (ligne 2) ; « J'étais en appétit, et j'étais déjà mort » (ligne 7). En effet, il découvrait la vie, tout en sachant qu'elle allait s'arrêter net. Ainsi les larmes de vie sont mélangées à celles de la mort : pour lui, « pleurer, c'était vivre et mourir en même temps » (ligne 9). Il franchit les obstacles mais la fin du texte nous emmène vers sa mort. Effectivement, nous ressentons sa force au début de l'extrait, mais le deuxième paragraphe conduit à la fatalité du destin de l'homme. « Je voyais clair, mais j'avançais moins vite. Etait-ce la fatigue ou l'amas des obstacles ? » (lignes 11 et 12). Ces obstacles sont énoncés sous la forme de trois phrases courtes, sans sujet, sans verbe conjugué, ne comportant qu'un ou deux groupes nominaux et un verbe à l'infinitif : « Se détourner des troncs. Ecarter les broussailles. Rompre l'amarrée des lianes et le vrac des branches mortes. » (Lignes 13 et 14). Les blessures sont énumérées, dans des phrases, si on peut les appeler ainsi, qui ne comportent qu'un mot : « Grafigné. Griji. Ecorché. Froixé. Tuméfié. Zié Boy. Blesses. » (ligne 14). De plus, l'allitération du 'r' en fin de texte montre la fatigue qu'engendrent les obstacles, la dureté de l'effort : « Se détourner des troncs. Ecarter les broussailles. Rompre l'amarrée des lianes et le vrac des branches mortes. » ; « Grafigné. Griji. Ecorché. Froixé. ».

 

Conclusion :

 

Nous remarquons donc dans ce texte, au travers de la tournure de ses phrases, de ses champs lexicaux, des procédés littéraires, une opposition entre une liberté gagnée par cet esclave qui en rêvait et qui laisse exploser ses émotions, et la mort à laquelle le vieil homme sait qu'il est destiné, et vers laquelle il se dirige. Sa course folle vers la liberté devient une course folle vers la mort, qui est donc bien le prix a payer pour cela.

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