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mène ou, pour mieux dire, de l'objectité adéquate de la volonté ; elle exprime ce qu'il y a de métaphysique dans le monde physique, la chose en soi de chaque phénomène.

Publié le 23/10/2012

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physique
mène ou, pour mieux dire, de l'objectité adéquate de la volonté ; elle exprime ce qu'il y a de métaphysique dans le monde physique, la chose en soi de chaque phénomène. En conséquence, le monde pourrait être appelé une incarnation de la musique tout aussi bien qu'une incarnation de la volonté; nous comprenons désormais comment il se fait que la musique donne directement à tout tableau, à toute scène de la vie ou du monde réel, un sens plus élevé... Il y a dans la musique quelque chose d'ineffable et d'intime ; aussi passe-t-elle près de nous semblable à l'image d'un paradis familier quoique éternellement inaccessible ; elle est pour nous à la fois parfaitement intelligible et tout à fait inexplicable ; cela tient à ce qu'elle nous montre tous les mouvements de notre être, même les plus cachés, délivrés désormais de cette réalité qui les déforme et les altère. (Monde, I, 273-6.) V L'ART EST LA FLORAISON DE LA VIE Mais je ne veux pas prolonger davantage cette étude ; car, au gré du lecteur, peut-être ce troisième livre est-il déjà trop long, peut-être suis-je entré dans des détails trop minutieux. Cependant mon but m'y invitait, et l'on sera d'autant plus porté à m'excuser que l'on saisira mieux l'importance souvent méconnue et la haute dignité de l'art : n'oublions pas que, selon notre système, le monde tout entier n'est que l'objectivation, le miroir de la volonté, qu'il accompagne celle-ci pour l'amener à se connaître soi-même, pour lui donner, comme nous le verrons, une possibilité de salut ; n'oublions pas non plus que, d'autre part, le monde considéré comme représentation, quand on le contemple isolé, quand on s'affranchit soi-même de la volonté, quand on abandonne sa conscience tout entière à la représentation, devient la consolation et le seul côté innocent de la vie. Alors nécessairement, nous en arrivons à considérer l'art comme l'épanouissement suprême et achevé de tout ce qui existe, puisque par essence il nous procure la même chose que ce que nous montre le monde visible, mais plus condensé plus achevé, avec choix et réflexion, et que par suite nous pouvons l'appeler la floraison de la vie, dans toute l'acception du mot... Le plaisir esthétique, la consolation par l'art, l'enthousiasme artistique qui efface les peines de la vie, ce privilège spécial du génie qui le dédommage des douleurs dont il souffre davantage à mesure que sa conscience est plus dis- tincte, qui le fortifie contre la solitude accablante à laquelle il est condamné au sein d'une multiplicité hétérogène, — tout cela vient de ce que, comme nous le montrerons plus loin, d'une part, « l'essence « de la vie, la volonté, l'existence elle-même est une douleur constante, tantôt lamentable et tantôt terrible ; et de ce que, d'autre part, tout cela, envisagé dans la représentation pure ou dans les oeuvres d'art, est affranchi de toute douleur et présente un imposant spectacle. Ce côté purement connaissable du monde, sa reproduction par l'art sous une forme quelconque, est la matière sur laquelle travaille l'artiste. Il est captivé par la contemplation de la volonté dans son objectivation ; il s'arrête devant ce spectacle, ne se lassant pas de l'admirer et de le reproduire, mais, pendant ce temps, c'est lui-même qui fait les frais de la représentation ; en d'autres termes, il est lui-même cette volonté qui s'objective et qui reste seule avec son éternelle douleur. Cette connaissance pure, profonde et vraie de la nature du monde devient elle-même le but de l'artiste de génie : il ne va pas plus loin. Aussi ne devient-elle pas, comme il arrive pour le saint, parvenu à la résignation, et que nous considérerons dans le livre suivant, un « calmant « de la volonté ; elle ne l'affranchit pas définitivement de la vie, elle ne l'en délivre que pour quelques instants bien courts : ce n'est pas encore la voie qui mène hors de la vie. Elle n'est qu'une consolation provisoire pendant la vie, jusqu'à ce qu'enfin, sentant sa force augmentée et, d'autre part, lassé de ce jeu, il en vienne aux choses sérieuses. La Sainte Cécile de Raphaël peut être prise comme symbole de ce changement. Et nous aussi maintenant, dans le livre suivant, nous allons nous tourner vers le sérieux. (Monde, I, 278-9.)

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