Nouveau Roman - littérature.
Publié le 28/04/2013
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6 L’INTRIGUE
Le Nouveau Roman n’a donc plus vocation à raconter une histoire, « Assez vite […] j’ai été frappé par l’opposition, l’incompatibilité même, qu’il y a entre la discontinuité du monde perçu et la continuité de l’écriture » explique Claude Simon dans une
interview en 1972.
L’intrigue est ainsi mise à mal dans sa définition traditionnelle et se limite pour Nathalie Sarraute à « ces moments indéfinissables qui glissent très rapidement aux limites de notre conscience ; ils sont à l’origine de nos gestes, de
nos paroles, des sentiments que nous manifestons, que nous croyons éprouver.
» (le Langage dans l'art du roman) .
Tantôt, l’intrigue se brouille avant de disparaître (les Gommes), tantôt, elle se fait puzzle du souvenir (la Route des Flandres de Claude Simon).
Claude Simon explique à ce sujet : « ce que vous appelez puzzle naît d’une certaine vision des choses… il
me semble qu’à partir de quelques éléments du souvenir, de ce dont on peut savoir de la vie des autres, il est possible de reconstituer un ensemble de choses vécues senties » car « dans la mémoire tout se situe sur le même plan : le dialogue,
l’émotion, la vision coexistent », in le Monde , 1960.
L’intrigue peut également être l’expression du subconscient : « Une fois venu le moment de la rédaction, c’est en toute conscience que je déclenche le mécanisme ou si l’on veut, que j’ouvre le
robinet du subconscient, disons de la sensation.
[…] Une manière presque d’écriture automatique en pleine conscience, c’est-à-dire avec filtrage immédiat des possibles, de ce qui pourrait être développé, et dont je m’efforce de développer une minime
partie malgré mon dégoût de tout développement, et du roman en particulier.
», explique Robert Pinget(« Pseudo-principes d'esthétique » in Nouveau roman : hier, aujourd'hui, 1972).
Bien que s’épanouissant sous diverses formes, le Nouveau Roman
se caractérise donc, de manière générale, par des ellipses temporelles, une simultanéité des informations, un brouillage entre réalité et fantasme, une discontinuité et une subjectivité du récit, un refus de l’omniscience d’un narrateur, allant jusqu’à la
dislocation du sens et de la forme.
7 LA DESCRIPTION ET RÉALISME
L’omniprésence et le réalisme de la description dans certaines œuvres du Nouveau Roman se trouvent déjà chez Gustave Flaubert (importance des objets, prima du visuel), dont les descriptions « froides », sans intérêt psychologique, scandalisent ses
contemporains.
Jean Ricardou condamne la description dans le Nouveau Roman , car « l’effet antiréaliste de la description est double, d’une part elle altère la disposition référentielle du récit (étalant une simultanéité en successivité), d’autre part, elle
empêche par ses interruption intempestives le déroulement référentiel du récit.
» La perception de Claude Simon confirme cette approche de la description : « Je ne vois pas tellement les choses en mouvement, mais plutôt une succession d’images
[…], les images persistent longtemps sur ma rétine.[…] À partir de cette image, je reconstitue ce qui s’est passé avant après.
» (Claude Simon, in le Monde , 26 avril 1967).
Ce dernier cherche par ailleurs à traduire le concret (« Le concret, c’est ce qui
est intéressant, la description d’objets, de paysages, de personnages ou d’actions ; en dehors, c’est du n’importe quoi.
»), tandis que dans le Planétarium (1959) de Nathalie Sarraute, des descriptions itératives (d’une poignée de porte, par exemple)
côtoient la répétition de scènes identiques, présentées du point de vue des différents personnages ; leur pensées et leurs paroles sont retranscrites dans une prose à la fois continue et hachée, rendant compte de ces mouvements presque
imperceptibles qui nous habitent.
La description du Nouveau Roman, et son souci de réalisme, passe par ailleurs par une écriture de la subjectivité, qui refuse catégoriquement l’omniscience d’un narrateur.
Le Nouveau Roman se caractérise donc aussi
par la remise en question de la nécessité du vraisemblable, le refus de ce que Roland Barthes appelle l’« effet de réel ».
8 QUELQUES NOUVEAUX ROMANS
Parmi les autres textes qui se rattachent au Nouveau Roman figurent notamment la Mise en scène (1958, prix Médicis) de Claude Ollier, Portrait d’un inconnu (1948) de Nathalie Sarraute ; Passage de Milan (1954) et l’Emploi du temps (1956) de
Michel Butor ; le Palace (1962) et les Géorgiques (1981), de Claude Simon ; le Voyeur (1955), d’Alain Robbe-Grillet ; ou encore l’Observatoire de Cannes (1961) et la Prise de Constantinople (1965), de Jean Ricardou.
De façon identique, certains
ouvrages de Marguerite Duras ( Moderato cantabile 1958 ; le Ravissement de Lol V.
Stein 1964), ou les premiers récits de Philippe Sollers ( le Parc, 1961), se ressentent incontestablement de l’influence du Nouveau Roman.
9 LE NOUVEAU ROMAN EST-IL MORT ?
« On a toujours contesté son existence, et il est toujours là », déclarait à propos du Nouveau Roman Alain Robbe-Grillet dans une interview au Monde en 1984.
De fait, dès 1958, l’hebdomadaire Art proclame la mort du courant et beaucoup critiquent
l’existence même d’un courant, parlant juste d’un « coup de force éditorial ».
En 1985 également, lorsque Claude Simon reçoit le prix Nobel de littérature, les critiques affirment que la reconnaissance met fin inéluctablement à un mouvement
contestataire.
Quoi qu’il en soit, les écrivains du Nouveau Roman ont pour certains choisi des voies différentes : Michel Butor a abandonné l’écriture romanesque en 1960, Alain Robbe-Grillet s’est quant à lui en partie tourné vers le cinéma.
La plupart
sont également passés du Nouveau Roman à la fiction autobiographique : Enfance de Nathalie Sarraute, Romanesques (1985-1994) d’Alain Robbe-Grillet, l'Acacia de Claude Simon.
Le Nouveau Roman, tel qu’il existait sous l’égide des Éditions de
Minuit, n’est en effet plus, mais ses différentes formes romanesques continuent en partie d’exister chez certains de ses auteurs, et aussi d’influencer de nouvelles générations d’écrivains (notamment Jean Echenoz et Jean-Philippe Toussaint, édités
également aux Éditions de Minuit).
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