Peut on accréditer l'idée d'un mal absolu ?
Publié le 05/12/2005
Extrait du document
1 Illogisme et passions
Texte
NIETZSCHE
Au
nombre des choses qui peuvent porter un penseur au désespoir se
trouve d'avoir reconnu que l'illogique est nécessaire à l'homme,
et qu'il en naît beaucoup de bien. L'illogique tient si
solidement au fond des passions, du langage, de l'art, de la
religion, et généralement de tout ce qui confère quelque valeur
à la vie, que l'on ne saurait l'en arracher sans par là même
gâter ces belles choses irréparablement. Ce sont les hommes par
trop naïfs qui peuvent seuls croire à la possibilité de
transformer la nature humaine en nature purement logique ; mais
s'il devait y avoir des degrés pour approcher ce but, que ne
faudrait-il pas laisser perdre chemin faisant ! Même l'être le
plus raisonnable a de temps en temps besoin de retrouver la
nature, c'est-à-dire le fond illogique de sa relation avec
toutes choses.
2
La volonté bonne
Texte
Emmanuel KANT, Fondements de la métaphysique des moeurs,
Première section,"Passage de la connaissance rationnelle commune
de la moralité à la connaissance philosophique".
De tout ce qu'il est possible de concevoir dans le monde, et
même en général hors du monde, il n'est rien qui puisse sans
restriction être tenu pour bon, si ce n'est seulement une
VOLONTÉ BONNE. L'intelligence, la finesse, la faculté de juger,
et les autres talents de l'esprit, de quelque nom qu'on les
désigne, ou bien le courage, la décision, la persévérance dans
les desseins, comme qualités du tempérament, sont sans
aucun doute à bien des égards choses bonnes et désirables ; mais
ces dons de la nature peuvent devenir aussi extrêmement mauvais
et funestes si la volonté qui doit en faire usage, et dont les
dispositions propres s'appellent pour cela caractère,
n'est point bonne. Il en est de même des dons de la fortune.
Le pouvoir, la richesse, la considération, même la santé ainsi
que le bien-être complet et le contentement de son état, ce
qu'on nomme le bonheur, engendrent une confiance en soi
qui souvent aussi se convertit en présomption, dès qu'il n'y a
pas une volonté bonne pour redresser et tourner vers des fins
universelles l'influence que ces avantages ont sur l'âme, et du
même coup tout le principe de l'action ; sans compter qu'un
spectateur raisonnable et impartial ne saurait jamais éprouver
de satisfaction à voir que tout réussisse perpétuellement à un
être que ne relève aucun trait de pure et bonne volonté, et
qu'ainsi la volonté bonne paraît constituer la condition
indispensable même de la dignité à être heureux.
Il y a, bien plus, des qualités qui sont favorables à cette
volonté bonne même et qui peuvent rendre son oeuvre beaucoup plus
aisée, mais qui malgré cela n'ont pas de valeur interne et
inconditionnée, et qui au contraire supposent toujours encore
une volonté bonne. C'est là une condition qui limite la haute
estime qu'on leur témoigne du reste avec raison, et qui ne
permet pas de les tenir pour bonnes absolument.
Rendre crédible signifie autoriser, permettre, rendre plausible. Accréditer quelque chose signifie y croire aussi. L'idée d'un mal absolu est complexe à saisir car il nous faut déjà comprendre ce qu'est le mal, les différentes figures du mal et l'existence même d'un tel mal. Un mal absolu serait le degré le plus haut du mal, s'il y avait toutefois une échelle pour le mesurer. Peut-on alors accréditer l'idée d'un mal absolu ? Le mal est ce qui cause de la douleur, ce qui est pénible, ce qui fait souffrir fait mal. Il y aurait alors une sorte de mal absolu au auquel il faudrait se rallier et qu'il faudrait même légitimer ?
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