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Pierre Boucheron : Histoire du Monde au XVe siècle - Chapitre III : La Méditerranée. Rivalités nouvelles dans les marchés de l'Ancien Monde

Publié le 17/08/2010

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histoire

La Méditerranée ne connait pas, à proprement parler, de souveraineté politique. Elle est un des espaces les plus âprement disputés au cours du Moyen-Âge, à partir de l’irruption de la puissance islamique au VIIe siècle. La Méditerranée apparait à la fois comme un pivot essentiel entre des espaces qu’elle relie entre eux et comme un laboratoire d’expériences nouvelles où s’expérimentent des modes variés de domination de l’espace, de colonisation, d’empires maritimes. Les échanges font intervenir une très grande variété d’acteurs, qui ne sont pas nécessairement liés au pouvoir, mais qui construisent des réseaux aux configurations complexes et mouvantes. On peut aussi noter que cela se fait dans un contexte de compétition politique et, en partie, religieuse, avec l’émergence d’une nouvelle puissance islamique conquérante, les Ottomans.  Les différentes régions riveraines de la Méditerranée ont joué un rôle plus ou moins moteur en raison de modèles politiques différents, mais aussi des vicissitudes de leur vie politique interne.  Le royaume d’Aragon a une politique active expansionniste. C’est à la fois une puissance ibérique et méditerranéenne, depuis l’incorporation de la Sicile à la fin du XIIIe siècle, puis de la Sardaigne en 1324 et enfin du royaume de Naples en 1442, avec une structure politique qui laissait une large autonomie aux différentes composantes de la Couronne. Dans l’ensemble toutefois la Monarchie soutenait les efforts des commerçants par son action diplomatique et son réseau de consulats autour de la Méditerranée.  Au sud des terres catalano-aragonaises, quatre sultanats s’étaient partagé les dépouilles de l’Empire almohade au début du XIIIe siècle. Le XIVe siècle est le siècle de la domination des Hafsides sur la moitié du Maghreb, depuis la Tripolitaine jusqu’à Alger. Ils ne favorisent pas le déplacement de leurs sujets hors des pays de l’Islam. Aussi centrent-ils leur politique sur un contrôle étroit des activités marchandes dans les ports qu’ils dominant, facilitant la venus des navires et des marchands latins. On observe une situation assez semblable dans l’espace mamelouk où le pouvoir ne soutient aucune politique d’expansion maritime.  Cette relative passivité contraste avec la vigoureuse politique des Ottomans qui menace l’empire byzantin mais aussi les positions des puissances occidentales en Orient. Dans les Balkans, l’éclatement politique et les rivalités entre les puissances chrétiennes ne laissent face aux Ottomans que le royaume de Hongrie ainsi que quelques places fortes tenues par Venise. Gênes, Florences, Venise sont très impliquées dans les conflits internes à la péninsule, qui souvent détournent leur attention de la Méditerranée. Le royaume Angevin à la fois provençal et italien, il tente de développer une politique méditerranéenne qui se veut l’héritière des rois de Sicile, mais s’épuise dans de nombreux conflits.  Enfin il faut remarquer que les latins ont depuis le XIIe siècle progressivement étendu leur domination sur la Méditerranée. Au début du XVᵉ, cette suprématie s’appuie sur un contrôle des routes de navigation, mais aussi de possession de territoires, notamment en Méditerranée orientale, qui voient se développer des expériences variées de domination et d’exploitation coloniale.  Les instruments de la domination commerciale de la Méditerranée par les Latins  La puissance des flottes latine est un instrument essentiel de la conquête et de l’exploitation des possessions coloniales en Orient, principalement dans les îles, mais également de la lutte contre la piraterie, tant islamique que chrétienne. Les grandes nations marchandes mettent en place un réseau de consulats outre-mer. Dans les pays de l’Islam, les marchands résident dans des bâtiments spécialement concédés aux nations chrétiennes, les fondouks. On constata ainsi la création de petites communautés permanentes où résident de manière durable le consul et le chapelain, des notaires, des taverniers et des marchands.  La constitution d’un domaine colonial  Aucune puissance ne parvient à instaurer une vraie souveraineté sur mer, sauf localement. Les modes d’administration des colonies varient sensiblement notamment entre les colonies génoises et vénitiennes mais dans l’ensemble les institutions sont copiées sur celles de la métropole. L’intérêt des possessions, notamment des îles réside d’abord dans le contrôle des routes maritimes qu’elles permettent. La compétition pour le contrôle de ce domaine colonial, comme les routes du grand commerce, est un des facteurs essentiels des luttes entre nations chrétiennes en Méditerranée, notamment dans le bassin oriental. Plusieurs guerres opposent les Génois aux Vénitiens. L’irruption de la puissance ottomane change sensiblement la situation mais de manière contrastée.    L’offensive ottomane en Méditerranée et la fin des rêves de croisades orientale  Durant tout le XVe siècle, on voit se multiplier les projets de croisade, mais ceux-ci ne peuvent empêcher ni la prise de Constantinople par les Ottomans, ni leur avancée dans le bassin oriental de la Méditerranée. L’Egypte mamelouke est alors la puissance islamique de la région qui détient Jérusalem. La Papauté cherche à favoriser l’union de la chrétienté et parvient lors du concile de Florence en 1439 à une union des Eglises orientales et latine. Le Pape échoue à faire renaitre l’esprit de croisade, qui a perdu de son importance parmi les valeurs de la chevalerie chrétienne. En définitive, la défense des lieux saints ne plus guère, et seules sont lancées quelques campagnes navales pour défendre ce qui peut encore l’être des possessions latines en Orient, comme la guerre que mène Venise contre les turcs à partir de 1463 mais qui débouche sur une paix peu glorieuse en 1479. Cela ne peut empêcher l’avancée des Ottomans. A la fin du XVe siècle, il ne reste entre les mains des latins que Chio qui paie tribu au sultan, Chypre, tributaire du Caire jusqu’en 1566, et la Crète vénitienne, qui résiste jusqu’au XVIIe siècle. La puissance navale ottomane est désormais évidente en Méditerranée orientale, et commence à s’affirmer également dans le bassin occidental.  La poussée chrétienne contre l’Islam d’Occident  En Méditerranée occidentale les pressions chrétiennes sur l’Islam se font plus fortes. Les projets de conquête au Maghreb sont anciens, et s’inscrivant dans le prolongement de la Reconquista en péninsule Ibérique, ou de la conquête de la Sicile par les Normands. Les latins pensent que la conquête du Maghreb, en particulier dans sa partie orientale, pourrait aider une attaque contre l’Egypte et donc la prise de Jérusalem, ou au moins faciliter la navigation vers l’Orient. Pourtant une relative stabilité perdure entre l’Islam et la chrétienté en Occident. En effet les grandes puissances sont plus occupées à régler leurs conflits internes. De plus la piraterie s’intensifie en mer et dans certains ports ce qui provoque de nombreuses tensions. Le rachat des captifs devient un enjeu majeur, à la fois économique, humain et spirituel, car il faut éviter les apostasies que pourrait entrainer une longue captivité. Une véritable économie de la rançon se met en place, avec ses règles, ses acteurs privilégiés, marchands ou religieux, et des sommes considérables mises en jeu. Pour lutter contre la piraterie les Etats mettent en place un certain nombre de règles communément admises mais qui ne sont applicables qu’en période de trêves.  Ce n’est qu’à la fin du XVe siècle que le mouvement d’expansion chrétienne reprend en Méditerranée occidentale, sous l’impulsion de l’Espagne des Rois Catholiques. L’achèvement de la Reconquista, par la prise de Grenade en 1492, laissait espérer une poursuite des efforts en direction des côtes africaines, qui étaient perçues comme d’anciennes terres chrétiennes. Ces expéditions sont explicitement présentées par les Rois Catholiques comme des croisades, et se voient reconnaître comme telles par le Pape. Elles permettent de renforcer le contrôle de la navigation et la lutte contre la piraterie islamique mais rapidement les Ottomans parviennent à la fin du XVe siècle à s’emparer en quelques décennies de la majeur parie du littoral maghrébin. Cela consacre l’échec de la politique d’occupation mise en place par la monarchie espagnole en Afrique du Nord.  Le centre de gravité économique se déplace vers l’ouest et en Atlantique. La navigation a bénéficié d’importantes innovations en matière de construction navale dans la seconde moitié du XIIIᵉ et au XIVe siècle. Dans le même temps les assurances maritimes se généralisent et les capacités de défense des navires augmentent. Le grand commerce maritime comprend désormais les produits de luxe (épices, corail, or…), mais aussi des produits de poids et de volumes importants. Les grandes cités européennes s’approvisionnent en blé, huile, sel mais achètent également des matières premières comme le cuir, la laine ou l’alun. En retour, les navires latins servent à la redistribution des produits d’Orient, et surtout à l’exportation des textiles produits en Europe. On observe donc la mise en place d’un échange inégal entre le monde latin et le reste du bassin méditerranéen, échange imposé par l’Europe qui exporte ses productions manufacturées et importe des matières premières ou alimentaires. La Méditerranée apparait donc comme un espace d’échanges essentiel et les marchands latins se révèlent les principaux acteurs, en Méditerranée, de réseaux qui s’étendent à l’ensemble du monde inconnu. Mais ils ne peuvent se fournir directement sur les marchés orientaux, et n’ont jamais réussi à parvenir par le Sahara aux sources de l’or. Ils dépendent donc d’autres réseaux, en arrière de la Méditerranée qui sont tenus par les marchands du monde islamique et c’est ce qui rend le commerce si sensible à la conjoncture internationale, et en particulier à l’état des relations avec le monde islamique. La mer Noire est devenue un lac Ottoman et les possessions latines dans la région tombent les unes après les autres. On constate au XVᵉsiècle un redéploiement des activités et des investissements marchands vers la Méditerranée occidentale avec les Catalans mais aussi les Provençaux, les Italiens. Les ports de l’occident musulman sont désormais intégrés dans des circuits complexes, et surtout des lignes de navigation qui vont de l’Egypte à L’Ecluse ou à Southampton en passant par le détroit de Gibraltar. Les italiens multiplient alors leurs investissements en péninsule ibérique sur le versant méditerranéen aussi bien qu’atlantique.  La découverte de l’Amérique, comme le contournement de l’Afrique par les Portugais achève cette ouverture atlantique, et en même temps réorganise totalement les réseaux qui s’étaient mis en place en Méditerranée, mettant en péril notamment les affaires vénitiennes en Egypte et en Syrie. Dans le même temps, les conquêtes espagnoles au Maghreb ruinent largement le commerce qui s’y déployait et entrainent une réaction ottomane en Méditerranée occidentale, qui redevient un espace de conflit majeur entre Islam et chrétienté. Si les Européens sont maîtres du grand commerce maritime, ils sont loin de dominer l’ensemble de l’espace méditerranéen. C’est pourquoi certains voient en l’Atlantique un moyen de prendre à revers l’ennemi musulman.

histoire

« sultan, Chypre, tributaire du Caire jusqu'en 1566, et la Crète vénitienne, qui résiste jusqu'au XVIIe siècle.

La puissance navaleottomane est désormais évidente en Méditerranée orientale, et commence à s'affirmer également dans le bassin occidental.La poussée chrétienne contre l'Islam d'OccidentEn Méditerranée occidentale les pressions chrétiennes sur l'Islam se font plus fortes.

Les projets de conquête au Maghreb sontanciens, et s'inscrivant dans le prolongement de la Reconquista en péninsule Ibérique, ou de la conquête de la Sicile par lesNormands.

Les latins pensent que la conquête du Maghreb, en particulier dans sa partie orientale, pourrait aider une attaquecontre l'Egypte et donc la prise de Jérusalem, ou au moins faciliter la navigation vers l'Orient.

Pourtant une relative stabilitéperdure entre l'Islam et la chrétienté en Occident.

En effet les grandes puissances sont plus occupées à régler leurs conflitsinternes.

De plus la piraterie s'intensifie en mer et dans certains ports ce qui provoque de nombreuses tensions.

Le rachat descaptifs devient un enjeu majeur, à la fois économique, humain et spirituel, car il faut éviter les apostasies que pourrait entrainer unelongue captivité.

Une véritable économie de la rançon se met en place, avec ses règles, ses acteurs privilégiés, marchands oureligieux, et des sommes considérables mises en jeu.

Pour lutter contre la piraterie les Etats mettent en place un certain nombre derègles communément admises mais qui ne sont applicables qu'en période de trêves.Ce n'est qu'à la fin du XVe siècle que le mouvement d'expansion chrétienne reprend en Méditerranée occidentale, sousl'impulsion de l'Espagne des Rois Catholiques.

L'achèvement de la Reconquista, par la prise de Grenade en 1492, laissait espérerune poursuite des efforts en direction des côtes africaines, qui étaient perçues comme d'anciennes terres chrétiennes.

Cesexpéditions sont explicitement présentées par les Rois Catholiques comme des croisades, et se voient reconnaître comme tellespar le Pape.

Elles permettent de renforcer le contrôle de la navigation et la lutte contre la piraterie islamique mais rapidement lesOttomans parviennent à la fin du XVe siècle à s'emparer en quelques décennies de la majeur parie du littoral maghrébin.

Celaconsacre l'échec de la politique d'occupation mise en place par la monarchie espagnole en Afrique du Nord.Le centre de gravité économique se déplace vers l'ouest et en Atlantique.

La navigation a bénéficié d'importantes innovations enmatière de construction navale dans la seconde moitié du XIII ᵉ et au XIVe siècle.

Dans le même temps les assurances maritimesse généralisent et les capacités de défense des navires augmentent.

Le grand commerce maritime comprend désormais lesproduits de luxe (épices, corail, or…), mais aussi des produits de poids et de volumes importants.

Les grandes cités européenness'approvisionnent en blé, huile, sel mais achètent également des matières premières comme le cuir, la laine ou l'alun.

En retour, lesnavires latins servent à la redistribution des produits d'Orient, et surtout à l'exportation des textiles produits en Europe.

Onobserve donc la mise en place d'un échange inégal entre le monde latin et le reste du bassin méditerranéen, échange imposé parl'Europe qui exporte ses productions manufacturées et importe des matières premières ou alimentaires.

La Méditerranée apparaitdonc comme un espace d'échanges essentiel et les marchands latins se révèlent les principaux acteurs, en Méditerranée, deréseaux qui s'étendent à l'ensemble du monde inconnu.

Mais ils ne peuvent se fournir directement sur les marchés orientaux, etn'ont jamais réussi à parvenir par le Sahara aux sources de l'or.

Ils dépendent donc d'autres réseaux, en arrière de laMéditerranée qui sont tenus par les marchands du monde islamique et c'est ce qui rend le commerce si sensible à la conjonctureinternationale, et en particulier à l'état des relations avec le monde islamique.

La mer Noire est devenue un lac Ottoman et lespossessions latines dans la région tombent les unes après les autres.

On constate au XV ᵉsiècle un redéploiement des activités etdes investissements marchands vers la Méditerranée occidentale avec les Catalans mais aussi les Provençaux, les Italiens.

Lesports de l'occident musulman sont désormais intégrés dans des circuits complexes, et surtout des lignes de navigation qui vont del'Egypte à L'Ecluse ou à Southampton en passant par le détroit de Gibraltar.

Les italiens multiplient alors leurs investissements enpéninsule ibérique sur le versant méditerranéen aussi bien qu'atlantique.La découverte de l'Amérique, comme le contournement de l'Afrique par les Portugais achève cette ouverture atlantique, et enmême temps réorganise totalement les réseaux qui s'étaient mis en place en Méditerranée, mettant en péril notamment les affairesvénitiennes en Egypte et en Syrie.

Dans le même temps, les conquêtes espagnoles au Maghreb ruinent largement le commerce quis'y déployait et entrainent une réaction ottomane en Méditerranée occidentale, qui redevient un espace de conflit majeur entreIslam et chrétienté.

Si les Européens sont maîtres du grand commerce maritime, ils sont loin de dominer l'ensemble de l'espaceméditerranéen.

C'est pourquoi certains voient en l'Atlantique un moyen de prendre à revers l'ennemi musulman.. »

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