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plan monologue rhinocéros

Publié le 01/04/2013

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Plan détaillé : le monologue final de Rhinocéros I. La solitude radicale et tragique de Bérenger a) Un monologue expressif Bérenger est le dernier homme, il n'a plus d'interlocuteur. Un accessoire sur scène souligne cette situation : la glace ; Bérenger se parle donc à lui-même (« il va vers la glace «, « il contemple sa poitrine dans la glace «, « il tourne le dos à la glace «). On retrouve la disposition spécifique du discours théâtral qui confère au public une place particulière et problématique : il est l'ultime destinataire de la parole de Bérenger (et de Ionesco) selon le jeu de la double énonciation. Toutefois celui-ci n'est pas exactement seul sur scène : il est cerné par les rhinocéros, figurés par les têtes accrochées au mur et dont la présence est accentuée par les barrissements. D'ailleurs, à la fin du monologue, Bérenger semble s'adresser à ces rhinocéros, dans une forme de défi final : Il se retourne face au mur du fond [...] tout en criant «. b) Bérenger et les autres Solitude de Bérenger contre tous : on relèvera l'opposition du singulier et du pluriel, et celles entre je et « eux « ( l.3, 5, 19 ), entre « je « et « tout le monde «( l.35, 37). Déplacement de la norme. Comme Bérenger est le dernier de son espèce, il est devenu « l'anormal «, alors que les rhinocéros constituent la norme de référence : il se qualifie de « monstre «l.27 et se compare, à son désavantage, aux rhinocéros Les rhinocéros sont connotés positivement. Le contraste de la beauté et de la laideur (« je ne suis pas beau «l.1, « ce sont eux qui sont beaux «l.3) est développé à travers les oppositions de formes (« corne «l.5, « Front plat «l.6 et « traits tombants «l.7), de texture (« moites «l.11, « rugueuses «l.11 / « flasque «l.13, « dure «l.14 / « sans poils «l.16, « poilu «l.14) ou de couleur (« trop blanc «l.13, « magnifique couleur vert sombre «l.15). Enfin, les barrissements apparaissent comme des « chants «l.17 opposés à la faiblesse de sa propre voix, humaine. On aboutit dès lors à un éloge des rhinocéros qui révèle que la solitude et la différence, c'est-à-dire le simple fait d'être soi, sont difficiles à porter, à assumer. c) L'échec du lien avec l'autre Le sentiment dominant de Bérenger est ici la honte (« j'ai trop honte «l.31, « comme j'ai mauvaise conscience «l.25, « J'ai eu tort «l.4). Le monologue exprime la douleur de Bérenger, qui est d'abord douleur d'être lui-même. Ponctuation expressive : phrases exclamatives, interjections (« hélas ! «l.5 « ah ! «l.14), répétitions désespérées (« jamais, jamais «l.28). Le public lui-même n'est-il pas parmi ces « têtes de rhinocéros « ? Bérenger ne peut pas se joindre avec tous les autres, il ne peut pas devenir rhinocéros. Il tente en vain de leur ressembler « Je n'ai pas de corne, hélas ! «,  « Mais ça ne pousse pas ! «, et de communiquer « Ahh, ahh, brr ! Non, ça n'est pas ça ! «, « Je n'arrive pas à barrir « II. Berenger, un personnage héroïque ? a) La tentation rhinocérite Le souhait de la métamorphose s'exprime fortement dans ce monologue : répétition du verbe vouloir au conditionnel « je voudrais « l.4, l.14, 29 + propositions introduites par « comme « ou par « si «. De même, les formules comparatives révèlent le désir de devenir rhinocéros : « être comme eux «l.5, « faire comme eux « l.19. Enfin, Bérenger tente d'adopter le barrissement (« il essaie de les imiter «l.19 ; « ahh ! ahh ! brr «) l.21, ce qui confère à la scène une véritable dimension de farce tragique. Le discours de Bérenger évolue : le début du passage reste empreint d'un espoir de changement (« ça viendra peut-être «l.l.7), puis après la tentative de barrissement, c'est le constat d'échec : « je ne deviendrai jamais rhinocéros «l.28 .Bérenger ne parvient pas en effet à se transformer en rhinocéros. Le monologue multiplie aussi les aveux directs d'impuissance par l'abondance des phrases négatives : « non, ce n'est pas ça «l.20, « je n'arrive pas à « l.23, « je ne peux plus « l.29, « je ne peux pas «l.30. Le caractère définitif de cette impossibilité à être rhinocéros est enfin souligné par les adverbes « jamais «l.28, « plus « « trop tard «l.26. b) Le dernier homme : une fatalité Si Bérenger reste homme, c'est d'abord non par héroïsme, mais par impossibilité profonde de céder au « charme « (au sens d'envoûtement) des barrissements et de suivre les autres. L'expression « Malheur à celui qui veut conserver son originalité «l.32 est à prendre au sens premier du terme. Sans doute faut-il alors comprendre le mot « originalité « non pas au sens d'anticonformisme, mais au sens premier de celui qui conserve ce qu'il est « à l'origine «, c'est-à-dire ici son humanité cf dénonciation des politiques totalitaires. Bérenger sort dans ses derniers mots de sa léthargie et de ses tentations de céder à la rhinocérite. Ce changement apparaît dans la gestuelle du personnage qui « a un brusque sursaut «l.33 et « se tourne face au mur où sont fixées les têtes « l.36. De même, le futur et les phrases affirmatives semblent marquer le temps de l'engagement : « je me défendrai «l.38, « je le resterai «l.38, « je suis le dernier homme «l.38. Bérenger est le dernier homme, soumis à son destin c) Un dénouement ouvert Les dernières répliques constituent un renversement ultime de situation et renvoient les rhinocéros à leur monstruosité réelle. Cependant le dénouement reste ouvert. Ce monologue ne consacre pas le triomphe de Bérenger et de l'humanité ; l'issue paraît être fatale : « jusqu'au bout « (c'est-à-dire peut-être jusqu'à la mort), même si le futur (« je le resterai «) laisse une petite place à l'espoir. La faillite de l'humanité n'est pas non plus ici totale ; malgré lui, Bérenger dit son sens inné de l'humain et en proclame la dignité. Que va-t-il faire de sa « carabine « ? Va-t-il s'en servir ? Contre qui ? Les rhinocéros ? Lui-même ?

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