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Quelles peuvent être les justifications de l'exercice de l'autorité aujourd'hui en démocratie ?

Publié le 05/12/2010

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  1. Introduction

 

La démocratie (du grec dêmokratia, dêmos, « peuple « ; kratein, « gouverner «), est un système politique dans lequel le peuple exerce lui-même sa souveraineté. Bien que la démocratie tire ses origines des cité-Etats de la Grèce classique, la démocratie moderne telle que nous la connaissons est née de la « révolution anglaise « (1642-1649), de la philosophie du siècle des lumières (XVIIIe siècle), de la guerre d’indépendance des Etats-Unis (1775-1783) et de la révolution française (1789). D’après l’O.N.U, le nombre de pays qui ont adopté les caractéristiques clefs de la démocratie est passé de moins de 60 en 1985 à plus de 140 en 2007.

La citoyenneté accordée aux autochtones masculins majeurs et non esclaves dans la Grèce classique, s’est élargie généralement à l’ensemble de personnes majeures, naturalisées ou non étrangères, hommes ou femmes  (en France, les femmes ont le droit de vote à partir de 1944). Cette élargissement confère notamment au gouvernement une plus grande légitimité tant à l’élaboration des lois, qu’à leur exécution. Si la citoyenneté représente aujourd’hui la majorité de la population, et si la démocratie est comme le dit Abraham Lincoln «  le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple «, l’autorité et, qui plus est son exercice, ont-elles encore une raison d’être ?   L’exercice de l’autorité n’est-elle pas contraire au principe de liberté engendré par la démocratie ?  Ceux qui exercent l’autorité sont-ils toujours égaux aux autres citoyens ?

Nous réfléchirons d’abord sur la possibilité de l’autorité de compenser les faiblesses de la démocratie. Nous étudierons ensuite l’exercice de l’autorité afin de protéger la démocratie. Nous démontrerons finalement que l’autorité est le fondement même de la démocratie.

 

   2. Développement

 

L’exercice de l’autorité comble l’imperfection de la démocratie

Seul un état aux mœurs simples, à l’égalité parfaite entre les citoyens et où chaque citoyen se consacre pleinement aux intérêts de l’état pourrait se justifier d’une démocratie parfaite.

La démocratie n’est pas l’œuvre de tous mais d’une minorité d’élue

 grande échelle, la démocratie directe, où le pouvoir serait exercé directement par les citoyens, est inconcevable. On ne peut imaginer une population entière constamment occupée aux affaires publiques. Cela impliquerait l’impossibilité d’exercer d’autres métiers et  l’Etat s’effondrerait de lui-même. D’où à l’échelle d’un Etat, la démocratie indirecte est privilégiée, c’est-à-dire le pouvoir est exercé par des représentants choisis par le peuple.  Ainsi une minorité d’élus, votent des mesures (lois et budgets) qu’ils estiment bonnes pour la communauté et qui s’appliqueront sur la majorité de la population. Mais ces mesures n’ont pas étaient choisies directement par le peuple, et le gouvernement devra vérifier l’exécution de celles-ci grâce à son autorité, même si la majorité n’y voie pas immédiatement son intérêt. Par exemple, l’autorité du gouvernement se manifeste particulièrement lors de conflit, comme en avril 2008 avec le renforcement des troupes françaises en Afghanistan.

Beaucoup de minorités aux mœurs différentes (-> différence entre la volonté de tous et la volonté générale)

Plus les mœurs sont multiples et complexes,  plus les difficultés sont nombreuses et plus les solutions sont complexes. Dans ce cas, les risques de conflits pour les intérêts particuliers sont grands. La volonté générale disparait devant la volonté de tous, ou plutôt la volonté de chacun. Il sera d’autant plus aisé de dégager l’expression de la volonté générale que les intérêts particuliers seront limités. En cela, un Etat aux mœurs simples est nécessaire. Dans le cas contraire le gouvernement doit imposer par son autorité l’intérêt général aux intérêts particuliers, qu’ils soient majoritaires ou minoritaires. C’est le cas en France, lorsque que le gouvernement engage sa responsabilité pour l’amendement d’une loi.    

 Egalité de rang et de richesse

Pour que la démocratie existe, il faut qu’il y ait des débats. Et pour qu’il y ait de véritables débats, il faut que les interventions de chaque citoyen aient autant de valeurs les unes par rapport aux autres, c’est-à-dire  qu’aucun ne puisse exercer une quelconque influence de part son rang, sa richesse, ou son statut. Chacun doit pouvoir s’exprimer sans retenue et être libre de toute autorité directe des autres. Ceci implique également une égalité parfaite de fortune et de position pour que la raison ne se perde pas dans le désir et la convoitise, et que la démocratie ne sombre pas dans la démagogie. L’égalité absolue n’existant pas, l’Etat est garant de l’intégrité de ses représentants et de ses élus et se doit d’exercer son autorité à la conserver. A l’heure où les médias sont si nombreux et réactifs, le moindre écart d’éthique entraine l’opprobre sur la classe politique, et l’autorité de l’Etat ne s’en trouve qu’amoindrit.

La démocratie reste donc un idéal qui ne peut être atteint mais vers lequel on doit converger notamment à l’aide de l’exercice de l’autorité.

 

L’exercice de l’autorité protège la démocratie

La démocratie se doit de garantir l’égalité politique,  les libertés de chacun et d’assurer une justice unique et respectée par le peuple et par le gouvernement.

Egalité politique

La démocratie doit garantir l’égalité politique de chaque individu titulaire de ses droits civiques. A un citoyen, une voix. Ainsi tous les individus sont dotés du même pouvoir de décisions sur des questions publiques lors de référendum ou lors d’élections de représentants. La voix du chef de l’Etat a la même valeur que n’importe quelle autre voix. 

Garantir les libertés

La démocratie repose essentiellement sur la notion de liberté, et plus particulièrement les libertés fondamentales telles que la liberté de penser, la liberté d’expression, la liberté d’aller ou la liberté de réunion. Car c’est justement de ces libertés que nait la réflexion, préambule au débat. Voltaire résume parfaitement l’idée de liberté d’expression en démocratie par la phrase suivante : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous puissiez le dire «. L’exercice de l’autorité est justifié pour garantir la liberté à chaque opinion de pouvoir être exprimée ainsi que la liberté de se former et de s’informer.

Système judiciaire établie par le peuple et respecté par tous, y compris par le gouvernement

La démocratie doit enfin garantir l’égalité de chaque citoyen devant la justice. Ceci implique que le système judiciaire soit également respecté par le gouvernement. Le gouvernement et les parlements étant nommés directement ou indirectement par le peuple, ils doivent rendre compte au peuple et prouver leur intégrité. La fonction qui leur a été confié ne garantie pas d’indemnité. Ainsi la démocratie permet au simple citoyen ou à un ensemble de citoyen de poursuivre en justice le gouvernement, comme lors de l’affaire du sang contaminé (1991).

La préservation des grands principes de la démocratie justifie ici pleinement l’exercice de l’autorité, qui n’apparaît plus sécurisant que contraignant.

 

L’autorité et son exercice sont les fondements même de la démocratie

La démocratie, c’est la victoire de l’autorité sur l’autoritarisme. En mettant en avant les personnalités ayant un fort charisme, l’exercice du pouvoir est ressenti comme légitime et les représentants de l’Etat trouve leur autorité renforcée. 

Autorité : exercice d’un pouvoir ressenti comme légitime qui s’oppose à la soumission du peuple par la force ou la contrainte

Certes l’autorité exerce un pouvoir, mais ce pouvoir est ressenti comme légitime et n’est lié à aucune force, menace ou peur qui motiverait l’obéissance. Elle implique une hiérarchie admise qui n’est pas ressentie comme une oppression. Elle s’oppose ainsi à l’autoritarisme qui n’est que la volonté de soumettre et de dominer la population. En choisissant ses représentants et en participant au débat public, le peuple obéit naturellement au gouvernement et aux parlements tout en conservant son sentiment de liberté.

Capital d’autorité supérieur à celui obtenu grâce aux capacités personnels

Cette autorité s’accompagne ainsi de la confiance obtenue par le peuple et de la reconnaissance par les autres de la supériorité de ceux qui détienne cette autorité, c’est-à-dire le pouvoir. Inversement les personnes (fonctionnaires…) de part leur statut ou leur place dans l’institution inspire le respect et sont elles-mêmes reconnue comme légitimes. Ainsi l’autorité obtenue est également légitime, et l’exercice de cette autorité qu’implique leur fonction est supérieur à celle qu’ils auraient obtenue par leurs propres capacités, ou s’ils étaient imposés.

Autorité naturelle des leaders politiques : le charisme

Enfin, le fonctionnement même de la démocratie met en avant les personnalités fortes, celles qui ont un fort charisme, celles qui ont une autorité naturelle. Chacun connaît ses leaders : ce vieil homme que l’on écoute respectueusement, ou ce chef que l’on suit aveuglement dans ses projets…  Leur communication, leurs choix et leurs convictions les rendent d’autant plus apte à convaincre et à entraîner la population dans leurs réformes. 

La démocratie n’est pas autoritaire, dans le sens où elle n’impose pas son autorité. La démocratie a besoin d’exercer son autorité mais c’est le peuple qui possède le choix de cette autorité.

 

   3. Conclusion

 

      A. « La démocratie, plus qu’aucun autre régime, exige l’exercice de l’autorité « Saint-John Perse dit Alexis Léger, Diplomate et poète français (1887-1975)

Pour le diplomate et poète français Saint-John Perse (1887-1975), « la démocratie, plus qu’aucun autre régime, exige l’exercice de l’autorité «. Elle l’exige pour tendre vers une démocratie idéale ; elle l’exige pour garantir la pérennité de ses principes ; enfin elle l’exige pour s’opposer à toute forme d’autoritarisme.

      B. La démocratie reste une notion et son interprétation reste libre

Cependant, la démocratie n’est qu’une notion et son interprétation reste libre. Les pays du bloc de l’Est avant 1989, les pays européens colonisateurs   ou les Etats-Unis esclavagistes se proclamaient démocratiques. Pendant la guerre froide, le principe de liberté prévalait pour le bloc Ouest alors que c’était l’égalité, le principe maître pour le bloc Est. Chacun réfutait le caractère démocratique de l’adversaire. L’exercice de l’autorité s’en trouve évidemment profondément changé : l’autorité de la Chine, qui se dit démocratique, sur le peuple choque les pays occidentaux, comme le prouve les manifestations lors des Jeux Olympiques de Pékin.

      C. Comment remédier à la crise de l’autorité aujourd’hui dans nos démocraties ?

Enfin les progrès de la démocratie ont amené les sociétés modernes à remettre en cause les fondements de la hiérarchie, entraînant ainsi une crise de l’autorité : toute autorité est perçue comme domination et soumission ; les débats politiques n’attire plus que quelques passionnés ; l’homme politique est condamné pour se faire élire à de la démagogie et perd ainsi la confiance de ses électeurs ; par son impuissance politique, le gouvernement devient le bouc émissaire de la réalité sur l’idéal promis. Plus aucune hiérarchie ne nous semble naturelle, ni incontestable. Aujourd’hui se pose donc la question du remède face à la crise de l’autorité dans nos démocraties.

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