yiddish, littérature.
Publié le 06/05/2013
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1927), Joseph Rolnick (1879-1955), Mani-Leib (1883-1953) délaissent les problèmes sociaux alors au centre de nombreuses œuvres yiddish et s’attachent à promouvoir une esthétique de l’art pour l’art et un lyrisme personnel.
Issus de ce
mouvement, Leivick Halpern, dit H.
Leivick (1888-1962), qui tente à travers son œuvre dramatique (le Golem — Der Goïlem, 1921) et poétique d’insuffler aux jeunes générations le refus du désespoir et de la violence, et Joseph Opatoshu (1886-
1954) qui s’illustre dans le roman historique (Dans les forêts de Pologne — In poylishe velder, 1921 ; Un jour à Regensburg — A tog in Regensburg, 1933) et dans des nouvelles réalistes et drôles ayant pour cadre sa Pologne natale.
Un autre groupe
de poètes et d’écrivains immigrants, les Inzikhist (les « introspectivistes ») parmi lesquels Jacob Glatstein (1896-1971) et A.
Leyeles (pseudonyme de Aaron Glanz, 1889-1966), traitent divers thèmes cosmopolites.
Isaac Bashevis Singer, frère d’Israel Joshuah Singer, est peut-être le plus grand écrivain yiddish contemporain.
Ses romans et nouvelles, parfois fantasques et humoristiques, dans la grande tradition de la littérature yiddish du XIXe siècle, traitent
également de thèmes et de problématiques tout à fait contemporains, abordant avec une égale liberté de ton les problèmes des émigrants juifs aux États-Unis, les drames de la culture et de la foi juives dans la Pologne d’avant la Shoah, son histoire
personnelle à travers la vie affective de ses personnages.
Son humanisme inquiet, son sens de l’humour infaillible et un souffle romanesque peu égalé lui ont valu le prix Nobel de littérature en 1978.
5 POÉSIE, THÉÂTRE ET JOURNALISME
La poésie yiddish n’atteint pas une véritable valeur littéraire avant le XXe siècle.
Tous les grands poètes yiddish sont nés en Europe de l’Est ; la plupart ont émigré vers les États-Unis ou la Palestine.
Les plus remarquables sont Simon Samuel Frug
(1860-1916), auteur de chants exprimant sa nostalgie pour Sion ; Morris Rosenfeld (1862-1923), qui passe la plus grande partie de sa vie dans le Lower East Side de Manhattan, à New York, et s’attache à dépeindre la misère et l’exploitation des
ouvriers juifs, et Haïm Nahman Bialik, le plus grand des poètes modernes de langue hébraïque, qui a également écrit des poèmes en yiddish.
Parmi les principaux poètes écrivant en langue yiddish, il y a Melech Ravitch (1895-1979), établi à Montréal,
et trois écrivains qui ont immigré aux États-Unis : Aaron Zeitlin (1898-1973), Itzik Manger (1901-1969) et Chaim Grade (1910-1982), célèbre pour ses poèmes évoquant l’Holocauste ou les yeshivas (écoles religieuses juives).
Apparu dès l’époque médiévale, le théâtre yiddish s’est constitué sous les influences des troubadours et de leur répertoire (miracle, mystère et moralité), du carnaval puis de la commedia dell’arte.
Des compagnies juives se forment et élaborent leur
propre répertoire et leurs propres personnages, présentés à l’occasion de cérémonies familiales ou publiques, ou de célébrations comme la fête de Pourim.
Au fil des temps, la tradition du pourimshpil (« drame de Pourim »), qui retrace l’histoire de la
reine Esther (Livre d’Esther), se diversifie en introduisant d’autres épisodes bibliques, en recherchant des variantes et en recourant à l’improvisation.
À la fin du XVIII e siècle, les transformations politiques et économiques survenues en Europe orientale
bouleversent la vie des communautés juives ; le théâtre yiddish change de façon radicale.
En 1876, la rencontre à Iaşi, en Roumanie, d’une troupe d’acteurs itinérants (les Broder Zinger) avec le poète Abraham Goldfaden (1840-1908) se traduit par la
fondation du premier théâtre yiddish dont la vocation est d’instruire et de distraire.
Dans le contexte de la Haskala, Salomon Ettinger, Israel Aksenfeld, mais aussi Isaak Baer Levinsohn (1788-1860) ou Abraham Baer Gottlober (1811-1899)
privilégient le genre comique et satirique de dénonciation sociale.
Abraham Goldfaden, quant à lui, crée un théâtre de divertissement, inspiré de la tradition du pourimshpil. Le dernier quart du XIXe siècle en Europe orientale voit une recrudescence de
l’antisémitisme et des pogroms (fermeture des théâtres juifs en Russie en 1883) : avec l’émigration massive des populations juives, le théâtre yiddish essaime dans le monde entier.
Étapes sur la route vers les États-Unis, Londres et Paris accueillent
l’une et l’autre des troupes théâtrales yiddish, New York en devenant la capitale.
Souvent rivales, les troupes installées sur le Lower East End promeuvent un théâtre populaire, notamment grâce à Jacob Gordin (1853-1909) qui, empruntant ses
thèmes à Friedrich von Schiller, William Shakespeare, Victor Hugo et Franz Grillparzer, crée des drames historiques et moralisateurs, à David Pinski (1872-1959) et à Shloime Anski (1863-1920), auteur du Dibbouk (Der Dibek, 1916), légende
dramatique en quatre actes inspirée des légendes médiévales juives.
En Europe orientale, de nombreux théâtres s’établissent au début du XXe siècle, à Riga, Odessa, Vilnius ou Varsovie.
Simultanément victime de persécutions et bénéficiaire, de 1918 à 1948, de l’aide de l’État, le théâtre yiddish d’Union soviétique
(Moskver Yiddish Kunsttheater) acquiert une grande notoriété, notamment à Berlin, grâce au talent de ses acteurs, tels Solomon Mikoels (1890-1948) et de sa direction (Aleksandr Granovsky et Benjamin Zuskin).
Il doit cependant fermer ses portes
en 1948, à la suite de l’interdiction des activités culturelles juives en Union soviétique.
Le journalisme a également un rôle significatif dans le développement de la littérature yiddish.
L’absence de maisons d’édition et la pauvreté économique des lecteurs potentiels limitant la vente de livres, la plupart des écrivains tirent du journalisme
leur subsistance.
Le premier journal yiddish est l’hebdomadaire Kol Mevasser (« la Voix annonciatrice »), fondé à Odessa en 1863.
En 1865, le premier quotidien yiddish, Yiddishes Tageblat, voit le jour à New York.
The Forward, quotidien new-yorkais
créé par l’éditeur et écrivain américain Abraham Cahan en 1897, existe encore en yiddish et en anglais.
6 L’ÉVOLUTION RÉCENTE
La littérature yiddish en provenance des États-Unis a pris une orientation universaliste.
Les principaux interprètes de cette nouvelle culture sont le linguiste Max Weinreich (1894-1969), auteur d’une Histoire de la langue yiddish (History of the Yiddish
Language, 1973), et Haim Greenberg (1889-1953), essayiste et promoteur du sionisme.
La Shoah est évoqué dans d’innombrables témoignages en yiddish, récits du martyre et de l’héroïsme, et enquêtes sur la nature du mal.
De ces œuvres se
détachent la poésie et le théâtre d’Itzhak Katzenelson (1885-1944), qui a participé à l’insurrection du ghetto de Varsovie et a été exécuté dans un camp de concentration.
L’un de ses poèmes, le Chant du peuple juif assassiné (Dos lid fun oïsgehargten
yidishn folk , post.
1945) , composé en 1943-1944, est considéré comme l’une des expressions littéraires les plus fortes de la tragédie de la Shoah.
D’autres témoins de cette tragédie sont Mordecai Gebirtig (1877-1942), Hersh Glik (1922-1944),
Emanuel Ringelblum (1900-1944), l’auteur de Chroniques du ghetto de Varsovie (Notitsn fun Varshever geto, 1952), et Elie Wiesel (né en 1928), auteur de nombreux romans traitant de la Shoah.
Très actif en Israël, le théâtre yiddish connaît à la fin
du XXe siècle un certain regain au Canada, en Argentine, en Australie, en Afrique du Sud et Europe orientale et occidentale.
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