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formations de l'inconscient

Publié le 04/04/2015

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formations de l'inconscient (angl. Unconscious Formations; allem. Bil-dungen des UnbewuBten). Irruptions involontaires dans le discours selon des processus logiques et internes au langage, permettant de repérer le désir.

Le rêve, le mot d'esprit ou le trait d'esprit, le lapsus, l'oubli de nom, l'acte manqué, le symptôme en tant qu'il

relève du signifiant, comme métaphore signifiante, toutes ces formations ont en commun de provenir du même lieu topique, à savoir «cette partie du dis­cours concret en tant que transindivi-duel, qui fait défaut à la disposition du sujet pour rétablir la continuité de son discours conscient« (. Lacan, Écrits, 1965). Il s'agit de «l'Autre, lieu de cette mémoire que Freud a découverte sous le nom d'inconscient «. Il ne s'agit pas de retrouver l'inconscient dans quel­que profondeur mais de le repérer dans sa pluralité formelle, là où, sans l'avoir voulu, quelque chose échappe au sujet, un phonème, un mot, un geste, une souffrance incompréhensible qui le laisse dans l'inter-dit.

Avec le Mot d'esprit dans ses rapports avec l'inconscient (1905), S. Freud, à l'aide de très nombreux exemples, découvre et explicite ces manifestations qui font rupture selon des processus formels. «Ces cas se laissent expliquer par la rencontre, l'interférence des expres­sions verbales de deux intentions Dans certains d'entre eux, une inten­tion en remplace entièrement une autre (substitution), tandis que dans d'autres cas a lieu une déformation ou une modification d'une intention par une autre, avec production de mots mixtes ayant plus ou moins de sens.«

Substitution et déformation, con­densation et déplacement, ces deux mécanismes sont déjà repérés par Freud dans l'Interprétation des rêves en 1900. Dès 1953, dans le Discours de Rome, Lacan présente la métaphore et la métonymie comme les deux pôles fon­damentaux du langage ; il fait une relec­ture du mot d'esprit dans le Séminaire, 1957-58, V, «les Formations de l'inconscient «.

La proposition principale est que l'inconscient est structuré comme un langage : deux exemples de restructu­ration de la chaîne signifiante, considé­rée d'abord du point de vue formel, permettent à Freud de suivre le désir à la trace.

Le premier exemple est celui du trait d'esprit repris d'une histoire de H. Heine : Hirsch-Hyacinthe, collec­teur de loterie, dans une passe difficile, est reçu par S. Rothschild; celui-ci l'au­rait traité «tout à fait d'égal à égal, de façon toute famillionnaire «.

Freud figure son exemple ainsi: FAMIL LI ONNAI RE

FAMI LI                                    ÈRE

MIL LI ONNAIRE.

À la faveur d'une homonymie par­tielle entre « millionnaire « et «fami­lière «, le mécanisme de la condensa­tion fait surgir la technique du signifiant dans ce mot d'esprit. On peut considérer la condensation comme un cas particulier de la substitution, donc de la métaphore, et l'on voit à partir du positionnement des lettres apparaître l'élision, le reste et le surgissement de sens.

L'autre exemple de Freud est celui de l'oubli de nom que l'on peut considérer comme l'autre face du premier exem­ple : ce qui est oublié, un reste en quel­que sorte, va faire surgir toute une chaîne de noms substitutifs. A la place du nom oublié, Signorelli, auteur de fresques illustrant le Jugement dernier, viennent Botticelli, Boltraffio, Trafoi; par l'association libre, Freud retrouve des lieux de voyages, de rencontres; à la fin de la chaîne signifiante, Bosnie, puis Herzégovine lui donnent à enten­dre que sous Signor, le Herr allemand, souvenir de conversations ayant un étroit rapport avec la mort et la sexua­lité, était resté interdit, rejeté (Sur le mécanisme de l'oubli, 1898; trad. fr. in Résultats, Idées, Problèmes I, 1984). La difficulté des définitions rhétoriques de métaphore et métonymie se remarque ici: dans la condensation, une partie tombée dans les oubliettes permet de produire une métaphore métonymi­que; dans la substitution de noms, métaphorique, une chaîne de noms va faire surgir la métonymie, signifiant du désir impossible à dire. Deux axes ont

été nécessaires pour les liaisons de signifiant à signifiant: celui du para­digme, de la substitution, de la méta­phore; celui du syntagme, de la conca­ténation, de la contiguïté, de la métonymie. «C'est en effet une struc­ture unique et homogène que nous ren­controns dans les symptômes, les rêves, les actes manqués, les mots d'es­prit, et les mêmes lois structurales de condensation et de déplacement: un processus « attiré « dans l'inconscient est structuré selon ses lois. Or, ce sont les mêmes lois que l'analyse linguis­tique nous permet de reconnaître com­me les modes d'engendrement du sens par l'agencement du signifiant« (Lacan, le Séminaire V, 1957-58, «les Forma­tions de l'inconscient«).

Quelque chose s'est produit dans l'agencement de ces signifiants posant la question d'un sujet qui fonctionne­rait en dehors d'un couple moi-autre. Pour que le désir atteigne son but, il faut être trois: celui qui parle, celui à qui l'on parle et l'Autre, l'inconscient, qui pour se faire entendre transforme le peu de sens en « pas-de-sens «; l'Autre est donc ce lieu entérinant et compli­quant le message. «Il faut que quelque chose m'ait été étranger dans ma trou­vaille pour que j'y aie mon plaisir, mais [....] il faut qu'il en reste ainsi pour qu'elle porte« (Lacan, Écrits, 1966).

Le désir s'exprime par un reste méto­nymique aliéné dans une demande elle-même matérialisée par la chaîne signifiante qui structure nos besoins. Une nouvelle composition signifiante fait message au lieu du code : le sur­gissement d'un sens nouveau est la dynamique même de la langue.

Cette difficulté du désir à se faire entendre naît du phénomène intersub­jectif, moment où l'enfant a affaire au refoulement originaire, première méta-phorisation puisqu'il doit renoncer à être l'objet du désir de la mère pour advenir comme sujet. «Ainsi le sym­bole se manifeste d'abord comme

meurtre de la chose, et cette mort constitue dans le sujet l'éternisation de son désir« (ibid.).

 

Lacan écrit encore, à propos du symptôme: «Si, pour admettre un symptôme dans la psychopathologie psychanalytique [...], Freud exige le minimum de surdétermination que constitue un double sens, symbole d'un conflit défunt par-delà sa fonction dans un conflit présent non moins symbolique, s'il nous a appris à suivre dans le texte des associations libres la ramification ascendante de cette lignée symbolique, pour y repérer au point où les formes verbales s'en recroisent les noeuds de sa structure, il est déjà tout à fait clair que le symptôme se résout tout entier dans une analyse de lan­gage, parce qu'il est lui-même structuré comme un langage, qu'il est langage dont la parole doit être délivrée«

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