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psychologie collective

Publié le 07/04/2015

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psychologie collective (angl. Group Psychology; allem. Massen-psychologie). Étude rationnelle des rapports sociaux, en tant qu'ils sont déterminés par des facteurs psy­chiques.

Les rapports de l'individuel et du col­lectif (du «social«) constituent un des objets triviaux de l'épistémologie des sciences humaines. Il faut admettre que ce thème suscite des controverses généralement assez stériles, surtout lorsqu'on cherche à faire valoir la préé­minence d'une approche psycholo­gique ou celle d'une approche sociologique des faits humains.

La psychanalyse est d'une certaine façon plus radicale. Selon elle, le collectif et l'individuel obéissent aux mêmes lois, sont produits par des mécanismes identiques, même si cela ne peut être encore démontré que dans un nombre réduit d'exemples.

Qu'il y ait continuité entre le collec­tif et l'individuel, cela se conçoit, dès lors qu'on note, avec Freud, «qu'autrui joue toujours dans la vie de l'individu le rôle d'un modèle, d'un objet, d'un asso­cié ou d'un adversaire «. Ainsi «la psy­chologie individuelle se présente dès le début comme étant en même temps, par un certain côté, une psychologie sociale, dans le sens élargi, mais pleine­ment justifié, du mot« («Psychologie collective et analyse du moi «, 1921, in Essais de psychanalyse). J. Lacan plus tard fera valoir que l'inconscient est formé de ce qui n'a pu être dit dans un discours adressé à l'Autre* ou entendu dans un discours venant de l'Autre. L'inconscient est constitué par la partie manquante d'un discours transindivi-duel. Il comporte ainsi d'emblée une référence à une instance sociale.

De quels phénomènes collectifs, cependant, la psychanalyse est-elle le plus à même de rendre compte ? Freud a consacré de nombreuses pages à la constitution de ces groupes liés par un idéal commun, au fonctionnement de ces « foules « souvent conduites par un meneur incontesté. Ainsi emprunte-t-il à Gustave Le Bon (Psychologie des foules) la description d'une foule «impulsive,

mobile, et irritable«, «portée à tous les extrêmes «, influençable et versatile. Et il en propose une théorisation rigou­reuse en mettant en série l'état amou­reux, l'hypnose et la foule. Dans l'hypnose, comme dans l'état amou­reux, l'objet a pris la place de l'idéal du moi et devient ainsi le seul objet digne d'attention (même si par ailleurs «l'hypnose se distingue [...] de l'état amoureux par l'absence de tendances sexuelles directes «). D'un autre côté, l'hypnose est si proche de la foule (avec la fascination par le meneur) qu'on peut dire qu'elle constitue une «forma­tion collective à deux «. Freud va dès lors présenter ce qui se passe dans la foule à l'aide d'un schéma (bas de la page).

Ce schéma permet de faire valoir qu'« une foule primaire se présente comme une réunion d'individus ayant tous remplacé leur idéal du moi par le même objet, ce qui a eu pour consé­quence l'identification de leur propre mot «.

Cette étude est écrite en 1921. On peut estimer qu'outre sa portée géné­rale elle donne à l'avance quelques élé­ments qui permettront de saisir ce qui pourra réunir les foules fanatisées du nazisme, quelques années plus tard. En ce sens elle est prolongée par ce qui constitue sans doute un des meilleurs livres de W. Reich : la Psychologie de masse du fascisme (1933). Reich resitue

l'amour du chef (der Führer) dans le cadre plus général de la famille patriar­cale. Il montre comment les pulsions sexuelles, détournées de leur but, peuvent aisément se transformer en sadisme; et comment elles peuvent en même temps être projetées sur l'autre, l'étranger accusé de contaminer la «mère Allemagne« (l'assimilation du juif à la maladie vénérienne est lisible dans de nombreux textes nazis).

 

On peut regretter que la psychana­lyse contemporaine ne fasse pas une plus large part à ce type de recherches. Un auteur comme Lacan, cependant, a pu fournir, avec sa théorie des «dis­cours «, quelques éléments théoriques nouveaux qui pourraient favoriser ces recherches.

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