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Arrêt DE MORT (L') de Maurice Blanchot

Publié le 14/02/2019

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Arrêt DE MORT (L'), récit de Maurice Blanchot (1948). On pourrait mettre en épigraphe de ce bref récit de Blanchot une formule par laquelle l'auteur résume, ailleurs, l'expérience fondamentale à laquelle la littérature moderne essaierait de faire face : « Si Dieu est mort, la mort n'est plus possible. » Conté dans une écriture sans piège et qui surprendra le lecteur tout au plus par sa très classique tenue, ce récit commence dans le monde solide de l'expérience spatio-temporelle commune (les lieux sont connus : Arcachon, Paris ; les dates identifiables : la crise de Munich, les événements de 1940), mais des fissures ne tardent pas à suspendre la confiance engendrée par ces premiers pas réalistes : une porte fermée à clé s'ouvre pourtant à la pression d'une femme inquiète, une malade se fait faire des piqûres par un médecin qui suit Paracelse, plus tard elle meurt mais à l'appel de son ami elle ressuscitera pour un moment. Cependant, s'il échappe au réalisme, c'est moins par son recours, assez discret, aux symboles, allégories et artifices traditionnels au genre fantastique, qu'en raison d'une incapacité qui frappe la parole récitante elle-même : le réel s'évanouit devant la voix qui veut le proférer. Une formule bizarre peut seule décrire adéquatement l'étrange rapport de la parole à son référent narratif : quelque chose n'arrive pas à avoir eu lieu du fait qu'on le raconte ensuite. Comme l'Eurydice du mythe, le réel disparaît à l'instant même où la narration se tourne vers lui. L'étrangeté propre aux récits de Blanchot — et notamment à 1'Arrêt de mort, qui est le plus réussi — ne tient que très peu au caractère surnaturel des événements qui y sont rapportés : elle découle de l'effet déréalisant exercé par le récit lui-même.

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