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BONNES (les) de Jean Genet (fiche de lecture et critique)

Publié le 15/10/2018

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BONNES (les). Pièce en un acte et en prose de Jean Genet (1910-1986), créée dans une mise en scène de Louis Jouvet à Paris au théâtre de rAthénée en 1947, et publiée à Paris aux Éditions de l'Arbalète la même année.
Madame insulte sa bonne, puis la bonne se révolte contre « Madame » et manque l’étrangler.» mais le réveil sonne. Les deux sœurs, Solange et Claire, Solange qui a joué Claire, et Claire qui a joué Madame, redeviennent deux sœurs, bonnes de Madame. Elles rangent la chambre et se disputent Claire, qui a envoyé à la police des lettres anonymes afin de faire emprisonner Monsieur, l’amant de Madame, reproche à Solange de manquer de courage. Solange s’accuse de n’avoir pas tué Madame, lorsque Monsieur appelle pour informer qu’il est libéré et attendra Madame en ville. Les deux sœurs sont effondrées, s’apercevant que leur stratagème a été inefficace, et peut-être éventé. Claire se promet alors de tuer Madame. Lorsque Madame sonne, les deux sœurs s’entendent : il faudra que Claire mette dix comprimés de gardénal dans le tilleul.


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« peut n'être que du faux et le meurtre au « tillol >>, un avatar d'une représen­ ta tion touj ours reconduite du meurtre de Madame-Claire par Solange.

Huis clos à deux interrompu par l'apparition centrale de Madame, les Bonn es ont pour moteur la fasci na tion­ répulsion : d'une part les bonnes haïs­ sent Madame et ne rêvent que de la détruire en faisant enfermer son amant; d'autre part, elles l'idolâtren t : Madame est pour les deux bonnes comme un totem devant lequel elles se prosternent ou qu'elles souillent.

Il y a dans cette pièce, des traces , des rémi ­ niscences de la cruauté telle que l'a définie Artaud, les bonnes exerçant le sadisme comme l'instrument d'une nécessité qui les dépasse.

Donc le sadique n'est.

pas libre: une dialectique infernale gouverne le rap­ port intersubjectif des deux bonnes, qui, liguées contre Madame, ne par­ viennent jamais à se pardonner l'une à l'autre l'abjection où elles se trouvent.

Lorsque, après la sonnerie du réveil, des moments d'attendrissement entre les sœurs succèdent à la violence rituelle contre Madame, on voit réap­ paraître entre elles deux l'antagonisme qui est le décalque de celui qu'elles entretiennent avec Madame.

Ainsi les personnages principaux sont -ils enfermés dans des mécanismes qui se traduisent jusque dans leurs déplacements à la surface de la scène.

Selon la consigne de Genet lui-même, «les metteurs en scène doivent s'appli­ quer à mettre au point une déambula­ tion qui se sera pas laissée au hasard : les bonnes et Madame se rendent d'un point à un autre de la scène, en dessi­ nant une géométrie qui ait un sens».

D'où l'idée que le sadisme des Bon­ nes n'est au fond que l'express ion de la théâtralité elle-même : la pièce annonce la dramaturgie radicale qui régit les macrocosmes des Nègres (1959) et du Balcon (1960) .

Ainsi la structure de la pièce offre l'image d'un rituel impuissant à neutraliser le réel, et qui , en fin de compte, se retire en lui­ même.

Dans la première partie du conte, les bonnes jouent à Madame et sa bonne ; dans la deuxième, Madame arrive et perturbe l'organisation rituelle .

des deux sœurs : c'est l'exté- .

rieur qui s'engouffre dans la pièce (encore Genet est-il tenté de déréaliser cette entrée finalement si théâtrale puisqu'il précise dans une note : «je .

suggère que les metteurs en scène éventuels remplacent les expressions trop précises ...

par d'autres plus ambi­ guës >>) ; dans la troisième, .

Madame repart et laisse les bonnes à leur échec, sublimé en suicide.

Madame n'est pas l'Irma du Balcon : elle est une vraie Madame qui «ne sait pas jusqu'à quel point elle est bête, à quel point elle joue un rôle» , tandis que les deux sœu rs sont de part en part conscientes qu'elles sont les actrices et les metteurs en scène de leur situation : « Tu ne vo udrais pas qu'on ...

qu'on s'organise dans le noir», confie à Solange Claire, qui semble réticente à nommer ce qu'il nous faut bien appeler jeu.

« Solange, tu me garderas en toi ,.

.

: telle est l'une des dernières phrases des Bonnes dont l'intrigue évolue vers davantage d'enfermement et d'autar­ cie.

La victime adorée et haïe - Madame -ayant disparu, reste aux bourreaux en jupons à se répartir la tâche, l'un restant bourreau, l'autre se muant en victime, pour accomplir l'acte meurtrier et résoudre concurrem­ ment la cérémonie théâtrale.. »

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