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Lettres de Saint-Évremond

Publié le 10/04/2013

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Charles de Marguetel de Saint-Denis, seigneur de Saint-Évremond (1614-1703), s'illustra d'abord dans le métier des armes. Contraint à l'exil (1661) pour avoir critiqué la politique de Mazarin, il ne put jamais revenir en France, où ses écrits (essais, traités, poésies, lettres) étaient très appréciés.

« Il n'est pas toujours besoin de la jouissance des plaisirs : si on fait un bon usage de la privation des douleurs, on rend sa condition assez heureuse. « Saint-Évremond, Sur ma vieillesse

« EXTRAITS~~~~~~~~ Badinage Comme nous arrivâmes à une rivière, dont les eaux se débordaient par l'abondance de la pluie qui était tombée, je lui représentai la facilité qu'il aurait de satisfaire à ce que les vers de Mademoiselle de la Roche dé­ siraient de son amour ; ce n'était que de chercher à mourir, pour se donner la gloire des héros amoureux, et en même temps finir ses peines.

Si j'avais, me dit-il, une passion sale et vi­ laine pour Mademoiselle de Beurevel,je ne refuserais pas de me noyer dans une eau si trouble; mais tous mes désirs sont honnêtes, et méritent bien que je me noie dans une belle eau, claire, nette et digne de la pureté de mes pensées.

Vivez, repris-je, vivez, Monsieur l' Ambassadeur : s'il vous faut pour vous noyer une eau aussi nette que la lumière de votre jugement, vous ne vous noierez de longtemps.

Maximes On aime ce qui plaît, et non point ce qui est permis.

De toute philosophie,je n'aime que celle qui peut nous faire vivre avec plus de raison et moins de chagrin.

Je ne trouve rien de plus injuste que de persécuter un homme pour sa créance, mais je ne vois rien de plus fou que des' attirer la persécution.

On ne connaît bien le prix des choses qu'après les avoir perdues.

Je n'ai pas en vue la réputation (.

..

) ; je regarde une chose plus essentielle : c'est la vie, dont huit jours valent mieux que huit siècles de gloire après la mort.

Contre la vie monastique (Saint-Évremond dissuade la duchesse Mazarin d'entrer dans un couvent) C'est au milieu de l'univers que la contem ­ plation des merveilles de la nature vous fera connaître celui dont elle dépend.

La vue du soleil vous fera comprendre la grandeur et la magnificence de celui qui l'a f armé ; cet ordre si merveilleux et si juste, cet ordre qui lie et entretient toutes choses, vous donnera la connaissance de sa sagesse.

Enfin, Madame, dans ce monde que vous quittez, Dieu est tout ouvert et tout expliqué à nos pensées.

Il est si resserré dans les monas­ tères, qu'il se cache au lieu de se découvrir; si déguisé par les basses et indignes figures qu'on lui donne, que les plus éclairés ont de la peine à le reconnaître.

Cependant une vieille supérieure ne vous parlera que de lui et ne connaîtra rien moins ; elle vous commandera des sottises, et une exacte obéissance suivra toujours le ' commandement, quelque ridicule qu'il puisse être.

Le directeur ne pren­ dra pas moins d'ascendant sur vous, et votre raison humiliée se verra soumise à une ignorance présomptueuse.

La raison, ce ca­ ractère secret, cette image de Dieu que nous portons en nos âmes, vous fera passer pour rebelle, si vous ne révérez l'imbécillité de la nature humaine en ce directeur.

Des bonnes sœurs trop simples vous dégoûteront ; des libertines vous donneront du scandale ; vous verrez là les crimes du monde ; hélas, vous en aurez quitté les plaisirs.

NOTES DE L'ÉDITEUR «A bien des égards, Saint-Évremond représente le type même du libertin agnostique que Pascal aurait souhaité convertir : fin, spirituel, ouvert, conscient de l'extrême diversité des attitudes qu 'on peut adopter devant la vie, et doué d'un tact social exquis.

Malheureusement, dans sa tentative de conversion, le janséniste se serait heurté à une difficulté insurmontable : le goût marqué de notre épicurien pour les divertissements, et sa conception radicalement différente de leur nature.

( ...

) Saint-Évremond ne croit pas que les divertissements détournent l'homme de l'essentiel , à savoir son salut.

Pour notre honnête homme, l'essentiel est ailleurs.

Il réside dans les ressources internes de son être que la pratique des divertissements permet d'exploiter au maximum.» Léonard A.

Rosmarin, Saint-Évremond, artiste del' euphorie, Summa Publications, Birmingham , Alabama.

humaine pour ce qu'elle vaut.

L'honnête homme peut trouver des plaisirs parmi ses égaux, sans être extrêmement vertueux ni extrêmement vicieux, sans essayer de changer la nature humaine dans ce qu'elle a de fondamental.

Mais il existe un moyen de changer, de civiliser, d'adoucir les hommes et la société.( ...

) L'amitié, vertu cardinale, occupe donc une place centrale, étant réglée d'une part par la sagesse -en tant que plaisir -et d'autre part par l'honnêteté -en tant que vertu sociale.

» H.

T.

Barnwell, «Saint-Évremond n'ayant une opin ion ni très haute ni très basse de la société et des hommes qui la composent accepte la nature 1 Roger-Viollet 2, 3, 4 , 5 vignettes gravées par L.

Perrichon, C.

Aveline éditeur, Paris, 1926 / B.N.

Les Idées morales et critiques de Saint-Évremond, P.U.F., Paris, 1957.

SAINT-ÉVREMOND 02. »

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