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Lorenzaccio, Alfred de Musset

Publié le 30/09/2010

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Lorsqu'il aborde la composition de Lorenzaccio, Alfred de Musset a déjà une carrière de poète et même de dramaturge exceptionnellement brillante. Des recueils poétiques, dont en 1829 les Contes d'Espagne et d'Italie, semblent en faire un émule de Victor Hugo avec qui il rivalise dans le vers, tandis qu'il sacrifie à un goût très byronien dans Don Paez et Portia. Il propose à l'Odéon, à la fin de l'année 1830, une première comédie en prose, La Nuit vénitienne, mal accueillie par le public comme par la critique. Il continuera à écrire pour la scène sans se soucier d'être joué, ce qui donnera sans doute à ses oeuvres dramatiques une sorte d'autonomie originale.

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« complexité énigmatique du vécu et son intrigue, jusqu'au dénouement, laissera le spectateur dans le doute sur lesvéritables motifs du meurtre d'Alexandre — motifs vraisemblablement psychologiques autant que politiques. Pas plus que le masque de Brutus libérateur de la patrie, ou celui d'Erostrate — le fou auquel se réfère Lorenzo — lemasque de la débauche n'est facile à emprunter.

On ne badine pas plus avec les masques qu'avec la débauche, et,au jeu du travestissement, Lorenzo risque de perdre son âme.

La conscience qu'il a de sa dégradation n'est pasl'une de ses moindres tortures.

L'extrême lucidité dont il témoigne vis-à-vis de lui-même, comme vis-à-vis de sonentourage, lui a même permis d'analyser sans illusion la situation politique à Florence.

Son action sera inutile et il nese flatte nullement d'en tirer profit ou gloire.

Lorenzo semble donc avoir la modernité des héros de l'absurde : sonpessimisme égale sa lucidité. Lecture politique de Lorenzaccio Le drame de Musset demeure exemplaire sous cet angle également.

Il met en scène un pouvoir autocrate etdécadent soumis aux forces qui le contestent et qui pourraient, dans certaines conditions, l'éliminer. La Florence des Médicis devient par excellence le lieu, l'enjeu, et la représentation symbolique de cet affrontement.Qui vaincra ? Le peuple, révolté, soudoyé, méprisé, renversera-t-il le tyran ? Le parti républicain, en réalité lafaction rivale des Strozzi, arrachera-t-elle son sceptre au débauché qui règne sur Florence ? L'avantage n'irait-il pasplutôt aux Cibo dont l'intrigue progresse dans l'ombre, aux mains machiavéliques du Cardinal ? Le projet solitaire deLorenzo aboutira-t-il le premier ? La structure dramatique de Lorenzaccio, dans sa complexité, répond admirablement à l'enchevêtrement des intrigues multiples au sein de l'intrigue principale.

L'une des originalités de l'oeuvre est la part qu'elle ménage à l'interventiondu peuple dans l'action : neuf scènes lui sont réservées où l'on peut, de l'exposition au dénouement, suivre lesmouvements d'opinion qui animent la cité : mécontentement voire consternation des marchands, tristesse etdéception des bannis, puis manipulation finale qui assure, dans l'indifférence, le couronnement de Côme Ier. Des mises en scène modernes de Lorenzaccio, comme celles de Guy Rétoré au T.E.P., en 1969 et celle, tout à fait originale, de la troupe polonaise d'Otoman Krejca, en 1970, insistent sur le pouvoir de réflexion que Lorenzaccioprojette sur le monde à la lumière de l'Histoire.

Figure emblématique d'une société en déliquescence, rongée par sacorruption, Florence se prête à cette représentation par sa configuration géographique et typographique.

L'image deFlorence que nous renvoie Musset est celle d'une ville intériorisée, livrée à tous les masques d'une absente « vertu »: corruption, viol et violences, intérêts sordides, basses intrigues, tout dans la pièce n'est qu'apparence etsimulacre.

La ville entière est habillée par une obsession qui s'insinue telle une idée fixe : supprimer le tyran pourabattre la tyrannie.

Tour à tour Lorenzo, les Strozzi et la marquise Cibo s'en feront l'écho mais seul Lorenzo mèneraà terme son projet.

Mais en enfermant son personnage dans la volonté absurde et quasi-maniaque du meurtre àaccomplir, Musset prive Florence d'une révolution collective, condition de sa liberté à venir.

La dernière réflexion quenous inspire Lorenzaccio nous renvoie au domaine du spectacle et du spectaculaire.

De l'histoire, le dramaturge a voulu montrer l'aspect théâtralisé et illusoire.

Selon le critique Bernard Dort, on conviendra que Lorenzaccio « ne se termine pas par un constat d'échec puisqu'une vérité y est clairement montrée : le théâtre a remplacé l'action.

». »

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