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Mémoires du comte de ComMINGE (analyse détaillée) Mme de Tencin

Publié le 24/10/2018

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Mémoires du comte de ComMINGE. Roman de Claudine Alexandrine Guérin de Tencin, dite Mme de Tencin (1682-1749), publié à La Haye chez Néaulme en 1735.

 

Par un procédé alors habituel, l'auteur se présente comme le simple éditeur d'un manuscrit authentique recueilli « dans les papiers » d'un dépositaire lui-même disparu. Mais le souci de réalisme compte moins ici que le décalage temporel ainsi suggéré entre la rédaction (fictive) et la publication du texte. En effet, le lecteur de 1735 - heureux bénéficiaire, à l'image de Mme de Tencin elle-même, de la libération des mœurs instaurée par la Régence et les débuts de Louis XV - est invité à situer l'action au siècle précédent. Lequel, en ces temps de dolce vita, est perçu rétrospectivement comme une époque archaïque et austère, mettant à la torture les corps (Comminge évoque le « saint fondateur » de la Trappe, le rigoureux abbé de Rancé, 1625-1700) et les cœurs («Je me trouvais amoureux d'une personne que je ne devais point aimer et cette personne en aimait un autre», voir Androma-que), où de honteuses caricatures du Don Diègue cornélien tentaient d'entraîner leurs fils dans d'absurdes vendettas («Je vous crois assez bien né pour partager mon ressentiment », voir le Cid). Quant au projet du jeune Gabriel de se rendre en Hongrie « au péril de la guerre », il évoque semble-t-il la lutte de Rakoczi contre l'Autriche (1703-1711), contemporaine des dernières et plus sombres années du règne de Louis XIV. Sans être le moins du monde un roman historique, les Mémoires du comte de Comminge, dont Baculard d'Arnaud donnera en 1765 une version théâtrale affadie, les Amants malheureux, n'en racontent pas moins avec précision la naissance, dans le sang et les larmes, d'une société et surtout de valeurs nouvelles : la sensibilité, le droit au bonheur.

 

L’illustre maison de Comminge est déchirée par une querelle d'héritage. Se jugeant victime d’une spoliation, le père du narrateur tente depuis longtemps de faire rendre gorge à son cousin le marquis de Lussan, et les deux hommes se vouent une haine mortelle. Cependant, alors qu’il voyage sous un nom supposé, le jeune Comminge rencontre à Bagnères sa cousine Adélaïde de Lussan, la fille du marquis, en tombe amoureux, se bat en duel pour elle et parvient à s’en faire aimer. Mais quand il révèle sa véritable identité et se flatte d’obtenir le consentement de son père à leur union, Adélaïde ne cache pas son

appréhension. De fart, le vieux comte repousse toute idée d’alliance avec ses « ennemis », et, devant son épouse éplorée, condamne son fils à l’exil. Nouveau voyage, nouvelle rencontre fortuite avec Adélaïde que, cette fois, il sauve, ainsi que sa mère, d’un accident. Aussi affectée que son cousin par la « tyrannie » dont ils sont victimes, elle refuse néanmoins de se rendre « criminelle » en fuyant avec lui. Le père ne désarme pas, et, faute de pouvoir imposer à son fils la femme de son choix, il le déshérite et le fait enfermer. Un jour, le prisonnier reçoit une lettre d’Adélaïde : pour obtenir la libération de son amant et lui prouver en même temps tout son amour, elle a décidé d’épouser le répugnant marquis de Bénavidès. Après quelques mois de chagrin mortel, Comminge se met en quête d’Adélaïde et parvient à se faire engager par le mari en qualité de peintre. Sitôt quelle l’a reconnu, elle semble le fuir, et Comminge se croît trahi en faveur du tendre Gabriel, frère de Bénavidès. Au cours d'une explication avec Adélaïde outrée par ces soupçons, surgit le mari, l’épée à la main. Comminge le blesse grièvement. Gabriel, ému par cet amour malheureux, cache Comminge dans un couvent des environs : il y apprend coup sur coup la guérison du mari et la mort d’Adélaïde, dont Gabriel, qui était devenu son confident, lui révèle toute la passion. Gabriel, qui aimait aussi Adélaïde, part se battre en Hongrie ; Comminge, accablé, se retire à la Trappe. C’est là que trois ans plus tard un religieux agonisant apprend à la communauté qu’il n’est autre qu’A-délaïde : séquestrée par son mari qui l’avait fait passer pour morte, enfin libérée par son veuvage, un « mouvement inconnu » l’avait attirée en ce lieu, et à l’insu de tous elle s’était depuis lors attachée aux pas de son amant. Au désespoir, Comminge se retire pour le reste de ses jours dans l’ermitage du couvent, après avoir obtenu la promesse du père abbé d’être enterré dans le même tombeau que sa maîtresse.

 

Le vieux Comminge aurait pu, en laissant son fils épouser Adélaïde, éteindre la querelle patrimoniale qui l'opposait à son cousin et assurer l'avenir de la famille : au lieu de cela, sa cruelle obstination causera le malheur des deux jeunes gens et l'extinction du lignage. Le roman est d'abord l'histoire de cet effroyable gâchis, aux antipodes, malgré l'analogie de situation, du tragi-

« heureux bénéficiaire, à l'image de Mme de Tencin elle-même, de la libé­ ration des mœurs instaurée par la Régence et les débuts de Louis XV -est invité à situer l'action au siècle précé­ dent.

Lequel, en ces temps de dolce vita, est perçu rétrospectivement comme une époque archaïque et austère, met­ tant à la torture les corps (Comminge évoque le. »

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