Psychanalyse du feu de Bachelard

« EXTRAITS -----------.

La terre : spécimens de lave du Vésuve, par Hamilton (1776) La psychanalyse de l'imaginaire permet à l'homme de retrouver « dans l'expérience scientifique les traces de l'expérience enfantine».

Ce passage est un bon exemple de la méthode et de la vision de Bachelard, appliquées dans d'autres ouvrages aux trois autres éléments Le feu et la chaleur fournissent des moyens d'explication dans les domaines les plus va­ riés parce qu'ils sont pour nous l'occasion de souvenirs impérissables, d'expériences personnelles simples et décisives.( ...

) Parmi tous les phénomènes, il est vraiment le seul qui puisse recevoir aussi nettement les deux valorisations contraires : le bien et le mal.

Il brille au paradis.

Il brûle à l'enfer.

Il est douceur et torture .

Il est cuisine et apoca­ lypse.

Il est plaisir pour l'enfant assis sage­ ment près du foyer; il punit cependant de toute désobéissance quand on veut jouer de trop près avec ses flammes.

Il est bien-être et il est respect.

C'est un dieu tutélaire et ter­ rible, bon et mauvais .

Il peut se contredire: il est donc un des principes d'explication universelle.

Bachelard analyse ici une des attitudes spontanées de l'homme face au feu, celle qui impose le respect et qu'il appelle « complexe de Prométhée » Voici alors la véritable base du respect devant la flamme : si l'enfant approche sa main du feu, son père lui donne un coup de règ le sur les doigts.

Le feu frappe sans avoir besoin de brûler.

Que ce soit flamme ou cha leur, lampe ou --- !':""-:'l~ ::;;;;;z -r.

fourneau, la vigi ­ lance des parents est la même.

Le feu est donc initiale­ ment l'objet d'une interdiction géné­ rale ; d'où cette conclusion : l'inter­ diction sociale est notre première con­ naissance générale sur le feu.

Ce qu'on connaît d'abord du feu c'est qu'on ne doit pas le toucher.

Le« complexe d'Empédocle »s e définit par rapport à la double signification de la flamme, celle de la rêverie et celle de la destruction Le feu enfermé dans le foyer fut sans doute pour l'homme le premier sujet de rêverie, le symbole du repos, l'invitation au repos.

( ...

) Mais la rêverie au coin du feu a des axes plus philosophiques.

Le feu est pour l'homme qui le contemp le un exemp le de prompt devenir et un exemple de devenir circonstancié .

Moins monotone et moins abstrait quel' eau qui coule, plus prompt même à croître et à changer que l'oiseau au nid surveillé chaque jour dans le buisson, le feu suggère le désir de changer , de brus­ quer le temps, de porter toute la vie à son terme, à son au-delà.

Alors la rêverie est vraiment prenante et dramatique ; ell e am­ plifie le destin humain ; elle relie le petit au grand, le foyer au volcan, la vie d'une bûche et la vie du monde.L'être fasciné en­ tend l'appel du bûcher.

Pour lui, la des­ truction est plus qu'un changement, c'est un renouvellement.

Gallimard, 1949 L'eau : le déluge , gravure anonyme du xvne siècle NOTES DE L'ÉDITEUR Gaston Bachelard ne fut pas en mesure de poursuivre ses études au-de là du niveau seco ndaire ; par conséquent, après avoir passé son baccalauréat (1903), il devint fonctionnaire postal.

Sa licence en mathématiques (1912), il l'obtint grâce à so n travail personnel.

Après la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle il fut mobilisé, il commença par enseigner les sciences (physique et chimie) au collège de sa ville natale (Bar-sur-Aub e).

Puis il fut agrégé de philo sophie (1922), docteur en lettre s (1927) , avant d'occuper s uccessive ment les chaires de philosophie de l'université de Dijon et de philosophie des sciences à la Sorbonne (1940).

En 1955 , l 'ann ée où il prit sa retraite, il fut élu à l 'Académie des sciences morales et politiques.

de ces analyses subtiles dont le lecteur moyen a si vite perdu le fil, point de sauts brusques dans le déroulement de la pensée, mais un exposé clair, concret , coloré, illustré de souvenir s personnels tout baignés de poésie.

Le style joint l'émotion à l 'humo ur, il a le pétillement et la saveur du terroir champeno i s.

C'est par cet ouvrage [Psychanalyse du feu] qu'il faut aborder Bachelard.

» M.

Mansuy, Gaston Bachelard et les éléments, Librairie Josi Corti, 1967.

«Voi là certainement le livre de Bachelard le plus accessible et le plus agréab l e.

Point 1 dess ins.

n.

/ Roge r·Yioll et 2 Nicolas Bouvie r 3, 4, 5 Biblioth è que de G en ève/ N ico las Bouv ie r BAC HEL ARD 02. »