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RACINE : Phèdre (Résumé et analyse)

Publié le 22/02/2012

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Depuis l'étude de R. Picard sur La Carrière de Racine, on comprend de mieux en mieux l'importance de la trajectoire littéraire et de la trajectoire sociale de Racine comme conditions déterminant sa production théâtrale. Contrairement à une idée largement répandue, le théâtre, y compris tragique, n'est pas le genre le plus noble dans la poétique de l'époque dite « classique ». Dans l'ordre théorique de dignité, la poésie héroïque et surtout épique était considérée comme supérieure. Mais le théâtre était le genre où se réalisaient les plus larges succès : la tragédie est une forme alors en voie de consécration. D'où la position de Racine : il respecte les règles, mais sans les fétichiser, et se préoccupe des effets à produire sur son public ; il propose une pièce à l'esthétique « ouverte », susceptible de plaire au public mondain de l'époque, sans en faire un acte militant pour telle ou telle doctrine esthétique ou religieuse. D'où, aussi, la distance qu'il prend à l'égard de l'écriture dramatique lorsque, au lendemain de Phèdre, il accède à des dignités plus élevées que celle de dramaturge.

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« le malheur des Pallantides dans celui d'Aricie.

La fatalité ne reste donc pas une idée abstraite dans cette tragédie.Les conséquences de l'hérédité déclenchent le conflit politique entre les trois branches qui peuvent prétendre à lasuccession de Thésée.

Surtout, grâce à l'univers mythologique de référence, les dieux interviennent dans cettehérédité : entraînés dans des conflits survenus bien avant eux entre des puissances surhumaines, les personnagessont les jouets de, forces qui les dépassent.

L'ambiguïté persiste cependant : on parle des dieux, mais ils ne sontjamais présents.

Aussi leur évocation peut apparaître comme une justification que se donnent les protagonistes, lediscours dont ils déguisent leurs passions cela a entraîné des interprétations de Phèdre dans le registre de latragédie très « bourgeoise ».

A l'inverse, si on prend les paroles au pied de la lettre, on peut la lire comme unetragédie « métaphysique ».

Mais l'une et l'autre interprétation perd de vue l'essentiel : c'est l'ambiguïté desréférences qui fait la richesse mythique et la puissance de Phèdre sur l'imaginaire individuel et collectif; il n'est demythe que par images, et d'images que polysémiques. 3.

Le style de l'écrivain Au XVIIe siècle, le théâtre tragique est spectacle et poésie : l'écriture textuelle y joue un rôle capital.

Phèdreapparaît comme une tragédie du langage.

Les principales actions y sont des performatifs, des actes accomplis parles paroles : aveu, accusation, condamnation.

Les événements extérieurs, d'autre part, ne s'actualisent que par desrécits (disparition de Thésée, troubles politiques à Athènes, mort d'Hippolyte). 1.

Les actes de paroleLes actes de parole (qui tendent à s'accomplir par le langage) sont tous difficiles ; ils correspondent à autant detransgressions.

Il est donc très profitable d'examiner les rapports entre langage et tabous.

Cela éclaire notammentla façon dont Racine redonne vigueur à des figures rhétoriques banalisées.

Le discours galant alors en usageabondait en procédés d'euphémisation : périphrases, métaphores, prétéritions, allusions, mythologismes.

Mais lessentiments qui s'expriment dans Phèdre ne sont pas seulement difficiles à actualiser et à dire ; ils sont interdits.Dans des tragédies comme Bérénice ou Iphigénie, et même Britannicus, si les passions des héros sont sources deconflits, elles ne se heurtent pas à des interdits impératifs.

Dans Phèdre, l'étroitesse des liens familiaux est telle quel'interdit est omniprésent.

De ce fait, le langage détourné, usuel dans la galanterie, devient un enjeu vital, et nonune commodité ou un simple ornement.

On pourra étudier la scène de l'aveu de Phèdre selon ce point de vue (v.634-710) : à partir d'une comparaison (v.

640), la logique sémantique échappe au personnage.

D'où l'aveu (v.

655-662) : c'est la perte de la maîtrise pragmatique, dont le code langagier galant supposait au contraire qu'elle soitpleinement dominée ; les périphrases et métaphores usuelles du discours mondain sont, tout à coup, prises au piedde la lettre et tous les doubles sens occultés se révèlent. 2.

« Aura » poétique et mélodieCe langage détourné, imagé, allusif, contribue à l'« aura » poétique de l'oeuvre.

Le récit de Théramène (V, 6, v.1498 à 1570), si souvent discuté, en est un bon exemple.

La description du monstre (v.

1513 à 1521) puisl'évocation du dieu Neptune (v.

1539-1540) ne sont recevables que parce qu'elles s'ordonnent en un réseaud'images : le mythe retrouve là sa fonction première d'espace libre pour l'imaginaire.

D'autre part, le discoursmétaphorique et périphrastique multiplie les occasions d'effets rythmiques recherchés.

Dans les évocations etimages mythiques, le vers racinien est, plus qu'ailleurs, mélodique.

On pourra analyser dans le détail quelquesexemples de cadence et de répartition des accents.

Ainsi la répartition en 3/3-4/2 aux vers 253.254, ou le rythme3/3-3/3 aux vers 360 ou 1404, etc.

La diction que Racine demandait à ses interprètes souligne les effets mélodiques: une part de plaisir du spectateur provenait de cette qualité sonore du langage tragique racinien, en particulier desvers dont la cadence, par sa lenteur, créait un effet d'amplification par lequel l'aspect matériel du la gage coïncidaitavec l'évocation sémantique de lieux mythiques, vastes et lointains.. »

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