Satiricon de PÉTRONE
Publié le 04/04/2013
Extrait du document
On peut supposer que Pétrone est un certain Petronius Arbiter (1er siècle après Jésus-Christ). Dans les Annales, Tacite nous apprend qu'il fut proche de l'empereur Néron, puis qu'il entra en disgrâce et se suicida. Le Satiricon, dont le nom évoque à la fois les drames satiriques grecs mi-sérieux, mi-grotesques, et l'esprit de satire, nous est parvenu très incomplet, sous la forme de fragments des livres XIV et XVI, le reste étant perdu.
...
«
« -Oui, s'écria Giton,
si la mort d'un de nous
est nécessaire, voici ma
gorge, frappez,
plongez y vos épées ; c'est à moi
de mourir, à m oi qui ai brisé les liens de votre
amitié mutuelle.
»
« Trimalcion rentra.
( •..
) -Excusez-moi, dit il, mes amis ; depuis
plusieurs jours mo n
ventre ne fait pas bien
ses fonctions,
et les
médecins n'y connaissent rien.
"
~------- EXTRAITS
Le plais ir ne conn aît pa s de lo i
( ...
)Gitons' assied sur le lit; et ses larmes,
qu'il essuie vainement, coulent en abon
dance.
Ému de sa douleur, j'en veux
connaître le sujet ; il s'obstine au silence ;
j'insiste ; aux prières je mêle les
~ menaces ; il se rend en-
\~1 fin ; et montrant
rr: ~ Ascylte : - Cet ami si
J.'113 fidèle, dit-il, ce com
pagnon de vos plai
sirs, Ascylte a devan-
cé ici votre venue.
Me
trouvant seul, il a
voulu faire outrage
par la force à ma pu
deur.
J'ai crié à la
violence ; mais lui,
ti
rant son épée : "Si
tu fais la Lucrèce,
m'a-t-il dit,
tu as trou
vé ton Tarquin." -
A ces mots, peu s'en fallut que
je n' arra
chasse les yeux au perfide.
La richesse de Trimalcion contra ste avec
la
pau vret é de ses rep rés e ntati ons sym
boliq ues
( ..
.) tout à coup un grand bruit se fait
entendre au dehors, et des chiens de
Laconie, s'élançant dans
la salle, se met
tent à courir autour de la table.
Ils étaient suivis d'un pla-
teau sur lequel on
por
tait un sanglier de la
plus haute taille.
Sa
hure était coiffée d'un
bonnet d'affranchi ;
à
ses défenses étaient
suspendues deux
corbeilles tissées de
petites branches de
palmier,
l'une rem
plie de dattes de
Syrie, l'autre de dattes
de
la Thébaïde.
( ...
).
Ce rtaines largesses font croir e à
Trimalcion qu'il est magnanime
( ...
) l'enfant du baladin tomba sur !Ui.
Aussitôt toute la valetaille de jeter-de
grands cris, et les convives de l'imiter,-~
qu'ils fussent touchés de la souffrance d:îin
être aussi dégoûtant, car chacun d' eu.x ~ùt
été ravi de lui voir rompre le cou ; mais ils
craignaient que
le festin ne finît tristement,
et qu'ils ne fussent obligés de pleurer aux
funérailles d'un étranger.
(
...
)
Quant
à l'enfant dont la chute avait causé
cet accident, il se traînait
à nos genoux en
implorant son pardon;( ...
) au lieu de punir
cet enfant, Trimalcion rendit un arrêt
par
lequel il lui rendait la liberté, pour qu'il ne
fût pas dit qu'un personnage
de son impor
tance eût été blessé par un esclave.
Eumolpe utilise
la cup idit é de
s
on époque
Tandis qu'il lisait les
premiers articles,
quelques-uns de nos
héritiers, les plus
assidus auprès d' Eu
molpe, entrèrent dans
la
chambre, et, lui
voyant son testament
à la main, le prièrent
instamment de leur
permettre d'en en-
Trimalcion
« ••• Je me ren dis au bai n avec Eumo lpe.
"
tendre la lecture : il y ..
______ ..,.
__ ___ _ _.
consentit aussitôt, et le lut d'un bout à
/'autre.
Mais ils firent triste mine, lors-
qu'ils entendirent la clause formelle qui les
obligeait
à manger son cadavre.
Cepen-
dant la grande réputation de richesse dont
jouissait Eumolpe aveuglait tellement ces
misérables, et les tenait si rampants devant
lui, qu'ils n'osèrent se récrier contre cette
condition inouïe jusqu'alors.
Traduction Héguin de Guerle
(XIXe siècle), Le Français, 194?
NOTES DE L'ÉDITEUR « Pétrone marque le point culminant de
l'immoralité romaine, puisque Tacite nous
dit
qu'à partir de Vespasien les mœurs
de _vinrent plus réglées
et la vie plus honnête.
Et nous n'avons pas la ressource de croire
que son livre fut composé pour être lu en
secret par quelques débauchés
obscurs( ...
);
très probablement il était fait pour le grand
monde et la cour.
» -Gaston Boissier,
« Pétrone est admirable partout, dans la
pureté de son style, dans la délicatesse de ses
sentiments( ...
).
Il ne laisse pas de montrer
beaucoup
d'éloquence( ...
) et pour faire voir
que les plus débauchés ne sont pas
incapables de méditations et dé retour, la
morale
n'a rien de plus sérieux ni de mieux
touché que les réflexions d'Encolpe sur
l'inconstance des choses humaines et sur
l'incertitude de la
mort.» -Saint-Evremond,
cité par Gilbert Lely,
Le Français, 1946
« Le procédé de Pétrone représente donc un
comble
d'art( ...
), la société est mesurée à
l'aune de ses propres valeurs, la simple
expression de ses valeurs équivaut à un
juge
ment sur elles( ...
).
Si l'œuvre de Pétrone
constitue l'extrême limite atteinte
par le
réa
lisme antique, elle montre aussi ce que ce
réalisme ne pouvait ou ne voulait atteindre.
»
Erich Auerbach, Mimesis, Gallimard, 1968
"Un roman de mœurs sous Néron", la Revue
des deux mondes, 1874
Illustration s d'André Derain .
collection Les Peintre s du Livre, éditions L.C.L.
© MCMXCI , ProLineris , Zurich PÉTRONEOI.
»
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