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Le Père Goriot - Honoré de Balzac (Résumé et analyse)

Publié le 22/02/2012

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Ouvrage à mille facettes, ce roman est, comme la pension Vauquer où se situe l'action principale, à la croisée de plusieurs destins exemplaires. C'est d'abord l'agonie du Père Goriot abandonné de tous, personnage taiseux que rien n'enthousiasme plus, si ce n'est la visite, de loin en loin, de deux jeunes femmes roulant carrosse. Ce vieillard de soixante-neuf ans a eu le tort impardonnable d'arriver à la pension nanti d'une belle rente dont il ne reste apparemment que peu de choses. Madame Vauquer ne se pardonne pas de s'être laissée aller à rêver de devenir Madame Goriot pour quitter enfin ce pauvre quartier de Paris.
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« 1 • LE CONTEXTE À trente-six ans, Balzac a déjà publié, sous son nom, seize romans ou récits.

C'est dans Le Père Goriot que le romancier donne corps pourla première fois à son « illumination » de 1833 : « relier tous [ses] personnages pour en former une société complète ».

Ce premierroman de La Comédie humaine instaure ainsi la réapparition systématique des personnages d'un récit à l'autre.

Balzac affirme par là uneconception originale du roman à travers la croyance en une unité de composition, qui fait de l'auteur un démiurge, en « concurrence avecl'état civil ».Le Père Goriot, qui décrit de nombreuses « Scènes de la vie privée », est à situer parmi les romans de moeurs.

C'est un des chefs-d'oeuvre de l'auteur : il perfectionne ici sa mythologie réaliste en créant des types humains aux traits fortement individualisés, quis'affrontent dans la « jungle sociale ». 2 • LE TEXTE Paris, 1819.

Dans le microcosme « renfermé, moisi et rance » de la pension Vauquer s'agitent des types humains et romanesques : entreautres, l'étudiant ambitieux, la jeune amoureuse, l'aventurier mystérieux et le martyr de la paternité.

Eugène de Rastignac, étudiant endroit venu de province, veut s'ouvrir les portes du prestigieux faubourg Saint-Germain.

Après quelques maladresses, il apprend de sacousine Mme de Beauséant le premier secret du succès : utiliser les femmes comme des « chevaux de poste » ou des « enseignes »,commencer par la belle Mme de Nucingen.

Le mystérieux Vautrin lui donne une deuxième leçon de cynisme et lui propose une voie de laréussite : épouser la triste VictorineTaillefer, autre pensionnaire de la maison Vauquer, et obtenir sa fortune en faisant mourir le frère de la jeune fille.

Mais Vautrin, en qui lapolice a reconnu un forçat évadé, est arrêté.

Le spectacle du martyre du père Goriot achève l'apprentissage de Rastignac : l'ancien ouvriervermicelier, qui s'est enrichi en profitant de la disette de 1789, adore ses filles, Delphine de Nucingen et Anastasie de Restaud, bellesjeunes femmes perverses ou perverties par la vie mondaine ; elles le dépouillent de tous ses biens et il meurt, non pas de son indigence,mais d'avoir été abandonné par ses filles, qu'il ne peut plus entretenir.

La mort de Goriot libère Rastignac de ses derniers scrupules et ledécide à défier la société : «À nous deux maintenant.

» 3 • LES THÈMES MAJEURS • Le pouvoir de l'argentComme dans toutes les autres oeuvres de Balzac, l'argent (ou plus précisément l'or) est le moteur principal de la société, dans la mesureoù il déchaîne les ambitions.

L'auteur dénonce en cela un appétit qui, s'il a toujours existé, revient plus fort que jamais sous le régimecensitaire, après la quête de gloire qui caractérisait l'Empire.

L'emprise de l'argent sur les hommes se manifeste ici par la descriptionminutieuse de toutes les réalités matérielles et sociales : l'argent est indispensable à la réussite ; il pervertit les sentiments, fonde lesmariages et détruit les familles.

Le père Goriot fait figure de martyr sacrifié au dieu du gain, que son agonie ne parvient pas même àébranler : « Vous ne mentirez pas, dites-leur des millions, et, quand même elles viendraient par avarice, j'aime mieux être trompé, je lesverrai.

Je veux mes filles ! » À ce monde matérialiste, d'où le sentiment est banni au profit de la réussite sociale, Goriot est devenuétranger ; sa mort témoigne contre une société dont toutes les valeurs, y compris familiales, sont corrompues.• La force des passionsUne large palette de passions humaines nous est offerte : toutes sont présentées comme des maladies convulsives, oscillant entrel'extrême lucidité et le délire, consumant les personnages dans leurs désirs.

Ce tableau correspond en réalité à la théorie balzacienne despassions, selon laquelle la pensée se confond avec la passion, qui revêt ici l'habit d'une idée fixe, d'une obsession.

Si la passion estprésentée comme une force (qui maintient le père Goriot en vie malgré sa déchéance physique et sa misère affective), elle est unepuissance moralement et physiquement destructrice.

Ainsi Goriot dépérit à vue d'oeil, rongé par un amour masochiste pour ses fillesingrates : il « semblait être un septuagénaire hébété, vacillant, blafard.

Ses yeux bleus si vivaces prirent des teintes ternes et gris de fer ;[...] et leur bordure rouge semblait pleurer du sang ».

Le mal socialBalzac, auteur réaliste mais aussi peintre visionnaire du coeur humain, récuse l'accusation d'immoralité : il s'attache à écrire une histoiredes moeurs, qu'il juge aussi importante que l'Histoire officielle des historiens, et nous montre, avec lucidité et pessimisme, tout ce qui,d'ordinaire, nous reste caché.

Il met en relief le mal inhérent à la société.

L'arrivisme suppose une lutte sans merci (« il faut vous mangerles uns les autres comme des araignées dans un pot ») ; Goriot est l'emblème du persécuté ; ses filles illustrent parfaitement lesparvenus sans scrupules.

Cette histoire des moeurs met également au jour l'existence de « lois sociales » en vertu desquelles tout « crime» ou acte crapuleux est suivi d'un châtiment.

Ainsi, le drame du père Goriot n'est pas autre chose que la punition du mauvais père par lui-même : pécheur par excès de faiblesse envers ses filles, il a laissé dégénérer son amour paternel en passion, élément destructeur parexcellence de toute société.

La comédie humaineDans ce roman du secret, chacun porte un masque : Trompe-la-mort cache son identité de bagnard et son homosexualité sous lesséductions cyniques de Vautrin ; il faut toute la ténacité de Rastignac pour élucider le mystère des relations entre le père Goriot et lesbelles dames qui lui rendent visite ; toute l'aristocratie vient voir tomber le masque de Mme de Beauséant, trahie par son amant ;Rastignac se décide à porter celui de l'amour mondain et du cynisme. 4 • L'ÉCRITURE Une langue épiqueDans cette oeuvre, les jeux de mots et de sonorités, la richesse métaphorique (notamment les images animales), ainsi que l'ampleur dulexique utilisé occupent une fonction bien définie.

Les formules (« l'égout moral ») et les leitmotive, loin de styliser le réel, rendent cedernier plus « grouillant », plus débordant, plus énorme.

Balzac révèle un sens de la démesure bien ajusté à l'expression vigoureuse destempéraments qu'il décrit : « Ah ! mon Dieu ! s'écrie Goriot.

J'expire, je souffre un peu trop ! Coupez-moi la tête, laissez-moi seulement lecoeur.

» Cet art du contraste et de l'exagération, proche de celui de Molière, peint, mieux que tout commentaire, le caractère et lespassions qui animent le personnage.

Ce style nouveau traduit une réalité elle aussi nouvelle.

Une dramaturgie tragiqueAprès une longue exposition des personnages et des lieux qui les entourent, on assiste à une lente montée de la crise qui finit parexploser, suivie de son dénouement.

Avec une maîtrise sans défaillance, l'auteur conduit et noue autour du personnage de Rastignac desintrigues complexes.

Cette « effroyable tragédie parisienne » mène les héros vers leur destin : le défi du mondain, la révolte du forçat,l'exil de la femme abandonnée, le martyre de la paternité.

En même temps, un art scénique sert des portraits à la fois représentatifs(évoquant un type littéraire connu) et fortement individualisés : la passion dévorante du père Goriot prend une tournure d'autant plustragique que, comme chez Racine, elle est partagée entre illusion et lucidité (« Je les entends, elles viennent.

Oh ! oui, elles viendront » ;puis, juste après : « Je suis dupe ! Elles ne m'aiment pas, elles ne m'ont jamais aimé ! »).. »

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