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Publié le 13/04/2014

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Amorce : Les Romantiques réhabilitent les droits de la sensibilité, de l'imagination et l'expression lyrique des grands sentiments ; ils mettent au centre de leurs préoccupations l'individu, ses passions et ses contradictions. Dans cette perspective, l'artiste, avec sa sensibilité exacerbée, et plus particulièrement l'acteur, souvent fantasque et imprévisible, capable d'exprimer les émotions et les passions extrêmes pour qu'elles « passent la rampe », jouit d'un grand prestige et devient un personnage littéraire. Le texte : Dans son drame romantique Kean ou Désordre et génie, Dumas s'inspire de la vie tumultueuse et extravagante du tragédien anglais Edmund Kean, interprète de Shakespeare : dans cette scène, une jeune femme, Anna Damby, décrit à Kean comment sa découverte du théâtre et le jeu prodigieux d'un acteur l'a guérie de sa neurasthénie et l'a rendue au monde des émotions. Annonce du plan : Dans un dialogue dramatique, elle révèle, face à un Kean plus réservé, sa personnalité passionnée d'héroïne romantique et fait l'éloge du théâtre et de ses vertus. I. La progression dramatique du dialogue : régularité, variété et suspense 1. La structure de la scène : régularité et variété La scène se déroule au rythme du récit d'une guérison presque miraculeuse - trois jours ont suffi - marquée par des repères temporels précis : commencée « le jour même » (l. 9), dans « la soirée » du premier jour, et se poursuit « Le surlendemain » (l. 32), puis « Le lendemain » (l. 40). Ce long récit progresse en quatre temps, sensibles dans la mise en page même : quatre longues répliques d'Anna sont à peine interrompues par trois questions laconiques de Kean, construites symétriquement, qui donnent au récit sa régularité mais aussi l'accélèrent. 2. Une guérison miraculeuse Anna, dans les lignes qui précèdent l'extrait, décrit les symptômes de sa maladie - une grave « dépression » (on parlait alors de « neurasthénie ») -, qui la rendait indifférente à tout comme le marque la triple négation (« Je ne C O R R I G É © Hatier 2007 « H I E R O N M ' A M E N É A U T H É Â T R E » o C O M M E N T A I R E o S U J E T 14 désirais rien, je n'espérais rien, je n'aimais rien »). À la fin de la scène, elle rappelle cet état critique, toujours sous le signe de la négation, dans un groupe ternaire plein d'émotion (« Je languissais sans force, sans désir, sans espoir »), ou sous le signe du manque (« mon sein était vide, mon âme en avait fui, ou n'y était pas encore descendue »...). Son récit décrit presque médicalement son état physique : le vocabulaire du corps est très présent - « sang, coeur, yeux, oreilles, mains, bouche... » -, ainsi que celui des fonctions vitales : « respirer, parler, dire », « toutes les sensations amassées ». Anna énumère les symptômes cliniques qui marquent le début de la guérison : elle éprouve un sentiment « douloureux », puis un éblouissement (« m'éblouirent »), une sensation d'étouffement ; « muette et immobile », « froide et silencieuse [...], mais déjà ranimée et vivante », elle peut « pa...
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« » : « tou tes ces l u m iè res m’éblou i ren t », « j’en tend is une voix », « on me condu is i t au Mo re de Venise », « j’y t rouvai la tê te somb re et pâ le d’Ham le t »… E n f i n, i l t r adu i t les man ifesta t ions exté r ieu res de cet te gué r ison : « Je res ta i muet te », « ce f u t tou jou rs le même rav issemen t », « mes ma i ns bat t i ren t , ma bouche app laud i t… ». L’ impa r fa i t , l u i, déta i l le les i mp ressions i n t i mes ; A nna Damby rev i t ses momen ts dans leu r i n tensi té et essaie d’analyser en p rofondeu r les sensa t ions qu i l’envah issaien t : « Cet te voix d isai t des vers mélod ieux… », « ce n’éta i t p lus la même voix ».

Cet te al te r nance dans les temps donne au réci t un ton et u n r y t h me va r iés. 3.

U n r éc i t à deux voix : le suspense La scène se fa i t à deux voix que tou t semb le opposer : d’un côté u ne jeune femme, r iche et ma lade, appa r tenan t à la hau te société, de l’au t re u n homme, acteu r célèb re ; la p rem iè re s’exp r i me avec volub i l i té et eff us ion, les rép l iques du second son t lacon iques.

I l semble qu’i l n’y ai t pas en t re eux de vé r i t ab le commu n ica t ion, comme si A n na, rev ivan t son h is to i re, n’en tenda i t pas son i n te r locu teu r : seul u n p ronom personnel de la deux ième pe rsonne (« vous », l.

42), i nd ique qu’el le sen t vaguemen t sa p résence, ma is, en fa i t , s’ad resse-t - el le v ra i men t à Kean, ou, à t rave rs l u i, au specta teu r ? © Hatier 2007 « H I E R O N M ’ A M E N É A U T H É Â T R E » • C O M M E N T A I R E • S U J E T réé cr i t u re s Suje ts d’oral Le roman Conv aincre… Le t héât re L a poésie 14 Cependan t, la fo r me du d ia logue a une fonc t ion d rama t ique.

Les quest ions de Kean re lancen t la conf idence d’An na, comme cel les d’un psychanalys te susci ten t la remon tée des souven i rs du pa t ien t ; elles assu ren t la dynam ique de la scène.

Par a i l leu rs, leu r fo r me i n te r roga t ive crée le suspense : le specta teu r a, tou t au tan t que Kean, env ie de connaî t re l’ iden t i té de l’ac teu r capable de créer au tan t d’émot ions chez les specta teu rs. E n f i n, el les révèlen t le pe rsonnage même de Kean : son t-elles la ma rque d’un cer ta i n recul de sa pa r t , de son i n té rê t pou r ai ns i d i re p rofessionnel pou r les effets que le jeu d’un acteu r p rovoque su r u n publ ic ? Ca r l’ac teu r qu i joua i t Roméo, Ot hel lo, H a m le t, on s’en dou te, c’est bien l u i : i l peu t ainsi observer – avec u n cer ta i n p la is i r et u ne cer ta i ne f ie r té ? – les qua l i tés de son p rop re jeu à t ravers le réci t d’Anna.

Es t-ce de la cu r iosi té et le sen t i men t que, si l’acteu r a su touche r ainsi cet te specta t r ice, l’homme qu’i l est sau ra aussi sédu i re la jeune femme dans la v ie ? I I .

A n n a, u ne hé ro ï ne de d r a me r o m a n t i q ue Le tempéramen t d’Anna, te l qu’i l appa raî t dans son réci t, s’accorde bien aux passions t u m u l t ueuses des hé ros shakespea r iens qu’el le v ien t de découv r i r… E l le p résen te les carac té r is t iques de l’héroïne-t y pe de d ra me roman t iq ue. 1.

L e « mo i » envah issan t : u ne sensib i l i té exace rbée : co r ps et « â me » Pou r les Roman t iques, le « moi » n’est pas haïssable, bien au con t ra i re. Aussi le réci t d’Anna est-i l en t iè remen t cen t ré su r el le-même.

Les i nd ices de la p rem iè re pe rsonne, le p l us souven t comme suje ts des verbes, p rojetés en débu t de ph rase, envah issen t son d iscou rs.

Son réci t révèle une sensib i l i té f rém issan te et ses émot ions passen t d’abord pa r tous ses sens.

Le verbe « sen t i r » apparaî t pl us ieu rs fois (l.

18, 56) et se décl i ne tou t au long du tex te en sensat ions va r iées : el les son t l iées au toucher et à l’odora t – l’« at mosphère est chaude et embaumée », pu is « l’ai r » appo r te « u n peu de f raîcheu r » –, et à la v ue à t ravers les « l u m iè res » qu i « éblou i ren t » ses « yeux ».

Ma is c’est l’ouïe qu i p rédomine, comme en témoigne le champ. »

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