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Le schisme d'Orient

Publié le 26/06/2013

Extrait du document

• La séparation entre l'Église catholique romaine et l'eglise orthodoxe marque une rupture clans l'histoire du christianisme, mais aussi de l'Europe. Ses conséquences et ses enjeux religieux se doublent en effet d'une dimension géopolitique essentielle, qui fait de ce schisme le moment dé d'une séparation du monde entre Orient et Occident...

« LA QUEIEW DU RUOQUE Le •filioque • est une petite partie du credo catholique, absente du credo orthodoxe.

Pour les orthodoxes, le Saint-Esprit •procède• (•est issu•) du Père par le Fils : c'est le Père qui est premier par rapport au Saint-Esprit Pour les catholiques, en revanche, le Saint-Esprit est issu du Père et du fils - en latin, ex Patre Filioque procedit.

On parle cle consubstantialité, une notion qui occupe encore les théologiens d'aujourd'hui.

Cette divergence de wes sur la Trinité apparait officiellement sous Charlemagne, au début du IX" siècle.

Elle marquera ensuite la principale différence théologique entre les deux Églises .

Les orthodoxes adeptes du monopatrisrne sont fidèles au canon du premier Concile de Constantinople (381), et c'est pour cela qurlls sont dits •orthodoxes• (en grec, •fidèles à la règle, au dogme.).

Les catholiques, en revanche sont en rupture avec la tradition originelle.

Cet écart proviendrait des Wisigoths d'Espagne, plus sensibles au rôle théologique du Christ Il aurait été cultivé par Rome pour combattre l'arianisme, avant de sr1mposer dans une culture religieuse occidentale moins patriarcale que son homologue orientale, sans doute sous l'influence de la culture saxonne.

Mais les Romains, au temps du schisme, ont eu à cœur d'affirmer que leur tradition était aussi ancienne et, partant, aussi valide que celle des Byzantins.

•C'est dans ce contexte tendu qu'a lieu une campagne militaire qui wit s ' opposer le pape et les Normands .

Rappelons que le pape est non seulement un chef spirituel, mais aussi un souverain temporel qui doit veiller à maintenir et à développer ses États.

• Une guerre édate , qui wit le pape fait prisonnier en 1053 .

Tout indique qu'il a espéré un secours des Byzantins et que ce secours n'est pas venu : c'est un homme déçu qui meurt à Rome le 9 avril 1054 .

• Quelques jours plus tôt.

il a confié à ses légats -les cardinaux Humbert de MoyenmoOtier, Pierre d 'Amalfi et Frédéric de Lorraine, qui deviendra lui-même pape en 1057 , sous le nom d'Étienne IX -une bulle d'excommunication qui ne vise f-------------..----------- ---1 personne d'autre que le patriarche • La présence des Normands en Méditerranée va encore compliquer la donne .

Appuyé sur ces guerriers mercenaires, Constantinople contrôle 11talie du Sud et les Balkans dès 1025, s'affirmant incontestablement comme la première puissance du monde chrétien .

Son patriarche est un homme aussi important que l'empereur.

Le pape voit incontestablement sa position de prééminence menacée .

• Les Normands jouent double jeu, alliés aux Byzantins pour reconquérir la Sicile et aux Lombards contre les Byzantins dans la péninsule .

!.'.enjeu pour Rome est d'affirmer son pouwir spirituel sur le sud de 11talie , ce qui passe par une unification des rites .

Cette unification est aussi l'un des objectifs du patriarche byzantin, et la rivalité politique va trouver dans l'affrontement dogmatique un excellent prétexte .

LE PRÉTEXTE DES RITES • Il faut bien , en effet motiver les excommunications dont se menacent mutuellement le pape et le patriarche .

Montrer l'autre comme un imposteur, dénoncer son infidélité au dogme sont les meilleurs moyens de saper son autorité spirituelle et de l'exdure de la communauté ecdésiale .

Les arguments fusent de part et d'autre, et les différences qui avaient fini par s'établir au fil des siècles sof appelées par chacun des camps en présence pour être érigées en hérésie .

• La grande question est la façon de célébrer la messe .

Le Canon romain impose une prière eucharistique (dite par le prêtre seul) , qui comprend obligatoirement une •épidèse•, c'est-à­ dire une invocation au Saint-Esprit pour qu'il bénisse l'assemblée, avant le •récit de l'institution• Oe rappel des gestes et des paroles du Christ lors de la Cène , dont la messe chrétienne est une commémoration) .

Les Byzantins réfutent cette façon de faire et mettent notamment en question le credo romain en interrogeant la place du s.lld-Esprlt .

Quelle est au juste cette place au sein de la Trinité? Quels sont les rôles respectifs du Père et du Fils? C'est toute la querelle du filioque, qui sur le plan théologique marque la principale césure entre les traditions orientales et occidentales .

• Rome attaque de son côté sur la communion : l'llost#e consacrée, dont la consommation constitue le foyer de la liturgie chrétienne, doit être en pain azyme, c'est-à-dire non levé .

• Les Byzantins répondent en mettant en cause le baptême latin : une seule immersion, n'est-ce pas insuffisant? Il en faut trois , si l'on veut être chrétien : une pour le Fils, une pour le Père et une pour le Saint-Esprit • D'autres points sont soulevés : le jeOne des Romains n 'est pas celui des Byzantins, et certains interdits alimen­ taires font problème .

Les Byzantins, restés plus proches des traditions judaïques en particulier, et orientales en général, reprochent aux Romains de ne pas saigner les animaux dont ils consomment la viande, dès lors impure .

• La question apparemment anecdotique du port de la barbe chez les dercs ~nterdit à Rome, seul les moines étant autorisés à en porter) soulève un débat plus profond, celui du statut des prêtres.

Le principe du célibat des prétres, que Rome tente d'affirmer depuis plusieurs siècles , est refusé par les Byzantins .

EXCOMMUNICATIONS On le wit les prétextes pour se déchirer ne manquent pas.

C'est autour de la personne du pape Léon IX que se produit la rupture .

Chose étrange, le pontife est déjà mort quand ont lieu les principaux événements .

• Monté sur le trône de saint Pierre le 12 février 1049, Léon IX a maille à partir à la fois avec le patriarche de Constantinople et avec des Normands de plus en plus entreprenants .

Le patriarche se nomme Michel Cérulaire (Michel Keroularios).

Des échanges épistolaires dont les pièces sont conservées montrent les deux dignitaires discuter vigoureusement des rites , chacun ayant à cœur de l'emporter sur l'autre.

Le pape bénéficie certes d'un soutien discret de l'empereu r Constantin IX.

qui s'inquiète de l'influence des Normands et souhaite faire alliance avec Rome, mais l'intransigeance de Léon IX est telle qu'il en vient à mettre en doute l'appartenance à la chrétienté du patriarcat de Constantinople .

de Constantinople .

•C'est peu avant la mort du pape que les légats se mettent en route ; ils arrivent à Constantinople en avril.

Tout indique qu'une conciliation a d'abord été tentée, mais Humbert de MoyenmoOtier et Michel Cérulaire ne parviennent pas à s 'entendre .

La nouvelle de la mort du pape étant parvenue à Constantinople, le patriarche met en doute le statut des émissaires d'un pape décédé, mais les Roma ins s'obstinent Les arguments théologiques déjà évoqués dans la correspondance entre Léon IX et Michel Cérula ire ressortent.

et en particulier le filioque .

Mais personne n'accepte de revenir sur ses positions .

Le débat s'envenime , jusqu 'à tourner au dialogue cle sourds .

Des insultes sont échangées, tant et si bien que, le 16 juillet 1054, en présence d'une nombreuse assistance, les légats procèdent à l'excommunication .

Ils déposent le parchemin de la bulle papale sur le maftre-autel cle la basilique Hagia Sophia (Sainte-Sophie), et.

au moment de sortir, secouent symboliquement la poussière de leurs sandales : la cathédrale du patriarche n'est plus, à leurs yeux.

un lieu chrétien.

• !.'.assemblée des évêques byzantins réplique le 24 juillet en frappant d 'anathème les trois légats, qui ont déjà quitté la ville, et tous ceux qui leur viendraient en aide .

DES ANATHÈMES À LA RUPTURE DÉFINITIVE •A l'époque , l'épisocle est surtout perçu comme une aise diplomatique, sans grande importance, puisque les puissances les plus inquiétantes, pour les uns comme pour les autres, sont les Sarrasins, les Normands et les Turcs , qui ne vont pas tarder à s'emparer d'Antioche et de Jérusalem (1078).

Le nouveau pape n'est pas excommunié par le synode byzantin, ce qui signifie que, du point de vue oriental.

il n'y a toujours qu'une seule chrétienté .

• La brouille subsiste pourtant comme en témoigne en 1078 l'excom­ munication de l'empereur byzantin Nicéphore Ill, excommun ication qui sera étendue à son successeur Alexis I" Comnène, avant d'être levée par le pape UrlHlln Il.

• Il faut sawir que l'Église use alors assez facilement de l'excommunication : le même Urbain Il proclame en 1095 celle du roi de France Philippe I" , coupable de s'être remarié.

• !.'.émergence des Turcs ottomans vient compliquer la donne, en fawrisant d'abord un rapprochement La bataille de Manzikert (1071) voit les Turcs vaincre l'Empire et faire prisonnier l'empereur et le patriardie.

lis prennent ensuite Jérusalem aux Arabes, interdisant du coup aux pèlerins l'accès aux lieux saints.

que les Arabes avaient autorisé .

Dans les faits, des pèlerinages ont lieu, mais l'Empire byzantin saisit le prétexte pour en appeler à la chrétienté dans la perspective plus terre à terre de contenir la nouvelle puissance.

Au concile de Plaisance (1095) , les ambassadeurs byzantins réclament de l'aide .

L'Église occidentale va entendre cet appel, prise dans ses propres difficultés (dergé dissolu , perte de prestige , contestation du pouwir du pape par des antipapes) et celles d'une société féodale qui se cherche .

!.'.appel à la crolslHle va donner un nouvel élan au monde occidental .

• Jérusalem est reprise en 1099, et de petits États latins d'Orient sont créés, avec la bénédiction du pape .

• Lors de la deuxième croisade, en 1147 , les relations s'enveniment quand les croisés d'Occident arrivent à Constantinople .

!.'.empereur Manuel I" Comnène exige des rois croisés français et allemand qu'ils lui fassent allégeance et que les villes conquises lui soient remises .

Conrad Ill et Louis VII refusent, ce qui leur compliquera la tache et contribuera à l'échec de leur expédition .

•Avec la quatrième croisade , entre 1202 et 1204, la rupture sera définitive.

Prêchée par le pape 1-ocMtlll, elle est financée parla République de Venise, puissance émergente dont le véritable objectif est d'affaiblir l'Empire byzantin pour étendre son influence jusqu'en Orient L'Empire byzantin est alors en aise, et les croisés en profitent: ils s'allient avec Alexis IV, le fils d'un empereur déchu.

•Le sac de COllSttllllhlople en 1204 et la création dans la foulée de l'Empire latin de Constantinople, qui durera jusqu'en 1261, wit le triomphe des Occidentaux : des royaumes latins sont créés en Grèce, et les Byzantins ne tiennent plus qu'un petit territoire autour de Nicée .

DES ÉVOLUTIONS DIVERGENTES • La fin politique de l'Empire byzantin, effective avec la prise de Constantinople par les Ottomans en 1453, entérine l'évolution divergente des Églises d'Orient, qui font d'abord l'expérience d'une religion populaire et minoritaire, distincte de celle du pouwir régnant avant de connaftre un déplacement politique vers le nord .

• La création du patriarcat de Moscou {1589) scelle le dédin de Constantinople comme centre religieux.

au profit de la •troisième Rome•.

Son hégémonie ne va pas de soi, pourtant et, pour des raisons politiques, une partie des orthodoxes ukrainiens choisissent quelques années plus tard de reconnaftre l'autorité de Rome, tout en conservant leurs rites .

Avec l'Union de Brest (1596) se crée la première communauté catholique orientale.

• La position minoritaire des orthodoxes dans la zone méditerranéenne fawrise l'évolution d'une Église différente, qui ne connait certes pas l'édat et le pouwir de Rome mais conserve un authentique soutien populaire .

Le catholicisme, lui, fait l'épreuve de la Réforme et, par la suite, d'une modernité morale étroitement associée à la formation des États modernes, avec ce moment dé dans l'histoire religieuse occidentale f--------------1 qu'est la Révolution française.

ANATH~MEET EXCOMMUNICATION Les armes théologiques utilisées de part et d'autre demandent à être explicitées.

• Utilisé déjà par saint Paul, l'anathèrne est employé par les conciles pour définir les dogmes en négatif : •Si quelqu'un dit ...

si quelqu'un fait ...

alors qu'il soit anathème.• Cela qualifie donc une personne et définit une faute.

• !.'.excommunication marque un degré plus élevé.

Excommunier, c'est au sens propre exdure de la communion, et donc de la communauté des aoyants, l'ecclesia (Église}.

Celui qui est excommunié se voit interdire de convnunier, et ~ est donc condamné à mourir damné, faute de pouvoir obtenir la rémission de ses péchés.

Il faut noter que ces excommunications, d'un côté comme de l'autre, visaient les personnes des dignitaires et non leurs Églises respectNes.

Penonne à l'époque nrimaginait la portée de ce qui allait devenir un schisme.

VERS l'ŒCUMÉNISME1 mutuels par lesquels les dignitaires des deux Églises continuaient théoriquement à s'excommunier .

• Le pape Jean-Paul Il a poursuivi ce travail de dialogue , mais la séparation des Églises est aujourd'hui moins une affaire de théologie qu'une différence de culture et de pratique .. »

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