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Les Évangélistes

Publié le 27/02/2008

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L'évangile c'est la Bonne Nouvelle. Quel fut, aux premiers jours de la prédication chrétienne, le contenu de cette Bonne Nouvelle ? Ecoutons saint Pierre complétant, entre l'Ascension et la Pentecôte, le collège des Douze que la déjection de Judas avait réduit à onze. " Qu'un autre prenne sa charge, dit-il en citant le psaume 109. Que, parmi les hommes qui furent des nôtres tout le temps que le Seigneur Jésus a vécu avec nous avant de nous quitter, c'est-à-dire depuis le baptême de Jean jusqu'aux jours de l'Ascension, il y en ait un qui devienne avec nous témoin de sa résurrection (Actes I, 20-22). " Ainsi, qui reçoit le ministère du témoignage apostolique doit être à même de proclamer devant ses frères les hommes que le Seigneur Jésus est bien ressuscité et de manifester, en cette résurrection, le sommet lumineux d'une série d'autres faits significatifs se succédant, dans la vie de Jésus, depuis son baptême par Jean jusqu'à son Ascension. Consacrés par la puissance divine qui éclate en la résurrection, tous ces faits doivent donner à quiconque en reçoit le témoignage la conviction que Jésus fut le Christ, le fils du Dieu vivant. La proclamation de cette " Bonne Nouvelle " fut d'abord, et sera toujours d'abord, une proclamation orale. L'apôtre la fait dans l'assemblée des croyants, qu'il s'agisse encore, comme ce fut le cas aux toutes premières origines, de l'assemblée des juifs, ou qu'il s'agisse ensuite de 1'assemblée chrétienne. De la sorte, tout évangile a nécessairement deux dimensions. Par l'une il se rattache à ce dont il témoigne dans la vie ou dans l'enseignement de Jésus. Pour l'autre il adapte ce témoignage à la situation spirituelle présente de telle communauté. Saint Pierre vient de nous dire quel était, dès le commencement, le contenu essentiel de tout évangile considéré selon la première de ces deux dimensions. Il est clair d'ailleurs que, même à ce premier point de vue, chaque témoin, précisément parce qu'il avait été témoin, mettait spontanément en relief ` tels ou tels traits qui l'avaient frappé davantage. A plus forte raison les divers témoins pouvaient-ils différer entre eux par ce qui leur semblait plus éclairant pour les besoins présents de telles ou telles communautés.

« genres littéraires, elle affectionnait les paraboles plus ou moins allégorisantes, depuis la brève comparaison jusqu'auxtableaux plus développés, les interrogations et réponses échangées comme des traits avec les interlocuteursfavorables ou hostiles, voire les exposés plus amples aux enchaînements vigoureusement marqués, et tout celafacilitait encore la fidélité de cette autre mémoire, la mémoire imaginative.

Quant à son contenu proprementdoctrinal, enfin, elle contrastait si fort, par sa simplicité et sa profondeur, par sa souveraine autorité surtout, avecla manière des scribes que l'intelligence ou, si l'on veut, la mémoire intellectuelle des disciples, singulièrement desDouze, ne pouvait qu'en être elle aussi durablement et fidèlement impressionnée. De la sorte, lorsque les apôtres, aux premiers jours de la communauté des disciples de Jésus, transmettaient auxcroyants le contenu des enseignements de leur Maître, ils ne pouvaient le faire qu'avec une fidélité dont la sourcepremière était, si l'on peut dire, l'énoncé même de ces enseignements.

Les témoins qui les avaient entendus lesavaient trop aisément enregistrés pour que leur témoignage puisse maintenant les trahir.

Ils assuraient ainsi à cepremier chaînon de la tradition une authenticité toute naturelle, que garantissait d'autre part l'assistance de l'Esprit-Saint promise par Jésus. Très vite, cependant, l'un ou l'autre de ces " témoins fondamentaux ", ainsi que les qualifiera saint Paul, devait voirnaître en lui l'inspiration de fixer par écrit ces enseignements de Jésus, qu'il se soit agi, ici encore, de ceux quis'étaient imposés comme plus essentiels, ou de ceux que la situation particulière de telle communauté poussait àmettre plus en relief.

Cela nous amène tout de suite à entrevoir et à comprendre comment il se fit, comment ildevait se faire que la stylisation la plus ancienne des discours de jésus fût celle de saint Matthieu, entendons icinon pas le Matthieu grec que nous lisons aujourd'hui en tête des quatre évangiles, mais un Matthieu araméen queles exégètes s'accordent de plus en plus, présentement, à postuler au delà, ou plutôt en deçà non seulement de ceMatthieu grec, mais aussi et inséparablement des deux autres synoptiques grecs, saint Marc et saint Luc. Matthieu, dont l'autre nom était Lévi, était un publicain, c'est-à-dire un collecteur d'impôts.

La profession, où lesexacteurs n'étaient pas l'exception, était méprisée dans l'opinion des Juifs : publicain et pécheur, c'était tout un.Jésus cependant fit de Matthieu l'un des Douze.

Le récit de cette vocation donne à penser que Matthieu, en cebureau des douanes de Capharnaüm, était son maître.

Donc personnage d'un certain rang.

D'une fortune suffisante,en tout cas, pour qu'il ait pu offrir en cette circonstance un festin d'adieu.

D'une certaine culture aussi, et d'abordsachant les deux langues, l'araméenne et la grecque.

Connaissant bien, enfin, son Ancien Testament, en juif qui,manifestement, avait fréquenté les rabbins.

On conçoit aisément, dès lors, que cet homme de bureau et d'étude aitété impressionné plus que d'autres par les admirables enseignements de son Maître, tout comme, dans le mêmetemps, Pierre, le pêcheur du lac, dont Marc serait pour nous l'écho, était plutôt saisi par le caractère divin ducomportement de Jésus. Pour autant qu'à travers nos trois évangiles synoptiques grecs nous pouvons rejoindre ce tout premier évangilearaméen de saint Matthieu, nous voyons qu'il se composait essentiellement de cinq discours qu'il est encore facilede discerner sous leur actuel revêtement grec (1 : 5-7 ; 2 : 10 ; 3 : 13 ; 4 : 18 ; 5 : 23-25).

Il est légitime depenser que les exégètes, entre lesquels ce point demeure encore discuté, s'accorderont de plus en plus àreconnaître le caractère très archaïque, très primitif de ces discours.

Pour ne prendre qu'un exemple, celui del'extraordinaire sermon sur la montagne, si certains fragments comme ceux sur le divorce (5, 31-32) et sur le PaterNoster (6, 7-15) paraissent, au témoignage de l'analyse littéraire comme à celui du troisième évangile, comme desadditions faites sans doute dans la composition grecque à la trame primitive araméenne, l'ensemble du sermon, parcontre, a toutes chances d'être demeuré très proche de ce qu'était cette trame primitive.

On peut même penserqu'il nous fournit beaucoup moins une composition de l'apôtre qu'un très fidèle écho du grand discours messianiquepar lequel Jésus, effectivement, inaugura sa mission.

On doit sans doute en dire autant des grands anathèmes duchap.23 contre les Scribes et les Pharisiens et de l'admirable discours eschatalogique des chap.24-25 que Marc etLuc auront eux-mêmes emprunté à ce très primitif Matthieu araméen.

Il n'est pas jusqu'au caractère très juif, etmême rabbinique, de cette catéchèse évangélique de Matthieu qui, par sa parfaite adaptation à la problématiqued'une communauté chrétienne encore très proche de la communauté juive, ne témoigne à la fois, même en sonrevêtement grec, de son archaïsme et de sa.

fidélité aux enseignements réservés d'abord par Jésus lui-même auxbrebis perdues du peuple d'Israël (Mt.

10, 6 ; 15, 24). De la sorte, à condition de n'être pas dupes de la rigidité d'un tel schéma, on peut penser que saint Matthieu futvraiment le premier à fixer par écrit des fragments importants de nos futurs évangiles synoptiques et que cesfragments contenaient principalement les discours du Seigneur.

Cela nous reporte entre les années 40 et 50.

En cesannées, les traditions évangéliques de récits, en particulier celle qui par saint Marc se rattachera à saint Pierre,demeuraient encore, semble-t-il, principalement orales. Les uns après les autres, cependant, les apôtres disparaissaient de la scène.

Leur témoignage oral avait étéjusqu'ici, et donc serait à jamais, le fondement solide de la foi de l'Eglise en Jésus Messie et Fils de Dieu.

Cette foide l'Eglise vivait de ce tout premier témoignage oral et ne pourrait jamais vivre que de lui.

Mais, maintenant que lesDouze ne seraient plus là pour le donner de vive voix, il fallait en fixer l'essentiel en des textes que ces mêmespremières générations, capables encore de les confronter avec le témoignage vivant qu'elles avaient entendu,garantiraient, en même temps que l'Esprit-Saint, pour les générations à venir.

Avec la mort de Pierre, vers lesannées soixante, commence donc la période de rédaction ou de définitive fixation de nos actuels évangiles. Nous avons dit les origines du premier, celui de Marc, et ses emprunts au Matthieu araméen.

Il est direct, sansapprêt, principalement épisodique, sans grand souci de savantes élaborations doctrinales, parsemé de notations. »

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