Un flot d'immondices envahit les rues de Paris
Publié le 04/09/2013
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de son coeur, combien les eaux de la Seine se troublent. C'est en plein centre de la ville, entre la tour Barbeau et la tour de Nesle, que le fleuve, puis-qu'il n'existe pas d'égouts, re¬çoit les plus grandes quantités de déchets. La population s'y débarrasse de ses déjections et de ses ordures ; les méde¬cins et les barbiers, comme les chirurgiens de l'Hôtel-Dieu, n'hésitent pas à y jeter les sa¬nies et le sang des saignées ; les bouchers, qui abattent cha¬que année des milliers de porcs, de boeufs et de mou¬tons, y abandonnent carcasses et rebuts.
Ces habitudes fort peu hygié¬niques provoquent moult coli¬ques et maux de ventre, mais n'empêchent pas une intense animation de régner sur les rives du fleuve, qui draine l'es-sentiel de l'activité écono-mique. En ces temps où les voies navigables sont à la fois plus praticables et plus sûres que les routes terrestres, des émbarcations lourdement char¬gées transportent depuis les provinces les matières pre-mières, les étoffes, le cuir, les poteries, le vin et les denrées alimentaires.
«
L'INSÉCURITÉ EN PRIME
L'autre grand fléau qui menace les Parisiens est l'insécurité .
Dès l'heure du couvre-feu et la tombée de la nuit, alors que les lampes à huile, les bougies et les chandelles doivent être éteintes pour éviter les risques d 'incendie, chacun s'empresse de regagner son logis et de s'y enfermer à double tour.
Les rues plongées dans l'obscurité deviennent des coupe-gorge où les bandes de voleurs règnent en maîtres.
La plus dangereusement célèbre, celle de la cour des Miracles , qui jouxte l'actuelle rue du Nil , forme une forteresse imprenable.
De véritables confréries hiérarchisées de brigands se livrent sans vergogne au vol et au commerce illicite : le crépuscule est leur royaume.
La police est impuissante et n'ose même pas pénétrer dans certains quartiers particulièrement malfamés .
li en va de même pour la garde de nuit, formée d'habitants désignés à tour de rôle.
Le guet royal possède plus de moyens, mais les archers en armes ont beau patrouiller sans relâche, il est rare qu'ils attrapent les malandrins et les coupe ~jarrets.
l'approvisionnement de la
cité.
Faute d'
oser braver une
interdiction aussi formelle
qu'officielle, les Parisiens sont
contraints de prendre leur mal
en patience.
Déjections, sanies
et carcasses
Épisodiquement, Paris est
frappé par des pollutions et
des écoulements pestilentiels .
Les voyageurs
qui découvrent
la capitale en arrivant par ba
teau ne peuvent que consta
ter,
à mesure qu'ils approchent
de son cœur, combien les eaux
de la Seine se troublent .
C'est
en
plein centre de la ville,
entre la tour Barbeau et la tour
de Nesle , que le fleuve, puis
qu 'il n'existe pas d'égouts, re
çoit les plus grandes quantités
de déchets .
La population s'y
débarrasse
de ses déjections
et de ses ordures ; les méde
cins et les barbiers , comme les
chirurgiens de !'Hôtel-Dieu ,
n'hésitent pas à y jeter les sa
nies et le sang des saignées ; o ] les bouchers, qui abattent cha- a.
que année des milliers de
porcs, de bœufs et de mou
tons, y abandonnent carcasses
et rebuts.
Ces habitudes fort peu hygié
niques provoquent moult coli
ques et maux de ventre, mais
n '
empêchent pas une intense
animation de régner sur les
rives
du fleuve , qui draine l'es
sentiel de l'activité écono
mique .
En ces temps où les
voies navigables
sont à la fois
plus praticables et plus sûres
que les routes terrestres, des
embarcations lourdement char
gées
transportent depuis les
provinces les matières pre
mières, les étoffes, le cuir, les
poteries,
le vin et les denrées
alimentaires .
Une « toilette »
d'exception
Le nettoyage de la capitale
laisse beaucoup à désirer, et
rien n'est prévu pour remédier
à la« pollution ».Comme dans
les autres grandes
villes du
royaume, des mesures de pro
preté ne sont prises qu 'en
deux occasions extraordinai
res .
Lors des grands événe
ments orchestrés par la monar
chie, mariages, entrées royales
ou visites
diplomatiques , les
Parisiens sont sommés de net
toyer les rues .
Les plus riches
payent les services de cureurs ,
chargés
d'éliminer les saletés
qui jonchent les voies de terre
~ED ITIONS '"'9 ATLAS
battue et les artères pavées -
celles-ci,
telles les rues Saint
Honoré, Saint-Jacques, Saint
Antoine et Saint-Martin, sont
encore peu nombreuses.
Tous
doivent également participer
quand menace la «peste »,
terme par lequel on désigne la
plupart des graves épidémies,
peste, choléra ou typhus .
Cha
cun a pour instruction de pla
cer ses ordures dans des réci
pients fermés aussi herméti
quement que possible et de
les déposer devant sa porte, en attendant que des charre
tiers s'
emploient à les évacuer .
Les
ordonnances sont très strictes : « La planche qui
ferme le tombereau devra être aussi haute que celle de
devant afin que les immon
dices ne puissent tomber sur
la
voie publique .
»
Il faudra encore des décennies
avant qu'un réseau correct
d'égouts ne soit mis en place
et fonctionne efficacement.
En
attendant, accumulées par les
éboueurs médiévaux à l'écart
de la ville, les ordures forme
ront des collines , qui, bapti
sées Butte-aux-Cailles , butte
Saint-Roch ou butte Bonne
Nouvelle , finiront par s'inté
grer dans le paysage urbain..
»
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