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La scène se situe à Paris, pendant l'été 1839. Les deux héros viennent de lier connaissance et flânent dans les rues de la ville.

Publié le 27/04/2011

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   Cependant, le crépuscule tombait, et des persiennes en face s'étaient relevées. Les passants devinrent plus nombreux. Sept heures sonnèrent.    Leurs paroles coulaient intarissablement, les remarques succédant aux anecdotes, les aperçus philosophiques aux considérations individuelles. Us dénigrèrent le corps des ponts et chaussées, la régie des tabacs, le commerce, les théâtres, notre marine et tout le genre humain, comme des gens qui ont subi de grands déboires. Chacun en écoutant l'autre retrouvait des parties de lui-même oubliées. Et, bien qu'ils eussent passé l'âge des émotions naïves, ils éprouvèrent un plaisir nouveau, une sorte d'épanouissement, le charme des tendresses à leur début.    Vingt fois ils s'étaient levés, s'étaient rassis et avaient fait la longueur du boulevard, depuis l'écluse d'amont jusqu'à l'écluse d'aval, chaque fois voulant s'en aller, n'en ayant pas la force, retenus par une fascination.    Ils se quittaient pourtant, et leurs mains étaient jointes, quand Bouvard dit tout à coup : « Ma foi ! si nous dînions ensemble ?    — J'en avais l'idée ! reprit Pécuchet, mais je n'osais pas vous le proposer ! «    Et il se laissa conduire, en face de l'hôtel de Ville, dans un petit restaurant où l'on serait bien.    Bouvard commanda le menu.    Pécuchet avait peur des épices comme pouvant lui incendier le corps. Ce fut l'objet d'une discussion médicale. Ensuite, ils glorifièrent les avantages de la science : que de choses à connaître, que de "recherches..., si on avait le temps ! Hélas ! le gagne-pain l'absorbait ; et ils levèrent les bras d'étonnement, ils faillirent s'embrasser pardessus la table en découvrant qu'ils étaient tous les deux copistes, Bouvard dans une maison de commerce, Pécuchet au ministère de la Marine; ce qui ne l'empêchait pas de consacrer, chaque soir, quelques moments à l'étude. Il avait noté des fautes dans l'ouvrage de M. Thiers, et il parla avec le plus grand respect d'un certain Dumouchel, professeur.    Gustave Flaubert (1821-1880), Bouvard et Pécuchet, 1881.    Vous ferez de ce texte un commentaire composé, que vous organiserez de façon à rendre compte de la lecture personnelle que vous en avez faite. Vous pourriez par exemple — mais cette indication vous laisse entièrement libre de choisir votre démarche — montrer par quels procédés narratifs et stylistiques Flaubert campe ses personnages et en souligne, avec un humour apitoyé, les ridicules.

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