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ANDRÉ CHÉNIER: LA JEUNE TARENTINE

Publié le 15/05/2012

Extrait du document

On a souvent comparé la théorie de l'imitation dans Chénier et dans La Fontaine. De fait, Chénier est classique. Il n'en apportait pas moins le principe d'un art nouveau, parce qu'il s'inspirait de modèles laissés de côté par l'époque précédente et qu'il se faisait de l'art et même de l'antiquité une conception assez différente de celle qui avait prévalu au xviie siècle.

Pleurez, doux alcyons, ô vous, oiseaux sacrés, Oiseaux chers à Thétis, doux alcyons, pleurez.

Elle a vécu, Myrto, la jeune Tarentine. Un vaisseau la portait aux bords de Camarine. Là l'hymen, les chansons, les flûtes, lentement, Devaient la reconduire au seuil de son amant. Une clef vigilante a pour cette journée Dans le cèdre enfermé sa robe d'hyménée Et l'or dont au festin ses bras seraient parés Et pour ses blonds cheveux les parfums préparés. Mais, seule sur la proue, invoquant les étoiles, Le vent impétueux qui soufflait dans les voiles L'enveloppe. Étonnée, et loin des matelots, Elle crie, elle tombe, elle est au sein des flots.

Elle est au sein des flots, la jeune Tarentine. Son beau corps a roulé sous la vague marine. Thétis, les yeux en pleurs, dans le creux d'un rocher Aux monstres dévorants eut soin de la cacher. Par ses ordres bientôt les belles Néréides L'élèvent au-dessus des demeures humides, Le portent au rivage, et dans ce monument L'ont, au cap du Zéphir, déposé mollement. Puis de loin à grands cris appelant leurs compagnes, Et les Nymphes des bois, des sources, des montagnes, Toutes frappant leur sein et traînant un long deuil, Répétèrent : « hélas ! « autour de son cercueil.

Hélas ! chez ton amant tu n'es point ramenée. Tu n'as point revêtu ta robe d'hyménée. L'or autour de tes bras n'a point serré de nœuds. Les doux parfums n'ont point coulé sur tes cheveux.

« On a souvent comparé la théorie de l'imitation dans Chénier et dans La Fontaine.

De fait, Chénier est classique.

Il n'en appe>r­ tait pas· moins le principe d'un art nouveau, parce qu'il s'ins­ pirait de modèles laissés de côté par l'époque précédente et qu'il se faisait de l'art et même de l'antiquité une conception assez différente de celle qui avait prévalu au xvii• siècle.

Dans La jeune Tarentine, il s'est souvenu de quelques épi· grammes de l'Anthologie grecque, consacrées à des naufragés 1.

Ce qu'il doit aux anciens : 1.

Le sujet même : une jeune fille tombée du navire, au milieu de la tempête; mais d'une courte inscription gravée sur un tombeau, il a fait une idylle, un petit tableau.

Il a développé les indications de l'original, à l'aide d'autres rémi· niscences antiques; Myrto était fiancée, comme Lysidicé.

2.

La mythologie, trè·s à la mode d'ailleurs au xvm• siècle : les Nymphes, les Néréides.

3.

Quelques expressions ou constructions, : la matière, employée pour l'objet, le cèdre, pour le coffre de cèdre, l'or pour les bracelets d'or.- Oiseaux chers à Thétis, traduit de Virgile: Dilectae Thetidi alcyon es.

- Elle a vécu, pour elle est morte, vixit : c'est l'idée exprimée sans évocation funèbre, le mot r mort » n'est pas employé une seule fois dans le morceau.

- Une inversion très hardie et très belle : Mais seule sur la proue, invoquant les étoiles •.•.

4.

La couleur antique du morceau, qui tient à tout ce qui vient d'être dit et à vingt autres détails: l'évocation du cortège nup­ tial, de la parure de la mariée ...

quelques expressions toutes grecques : çague marine, demeures humtdes, frappant leur sein, r~ pétèrent hélas! II.

Ce qu'il a aJouté.

1.

J·e pathétique tout moderne: Chénier veut nous attendrir; au xvti!• siècle, les larmes sont à la mode, mais elles ne doivent pas défigurer un beau visage.

Aussi nous émeut-il en insistant. »

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