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Colloque sentimental - VERLAINE, Les Fêtes Galantes

Publié le 30/03/2011

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verlaine

Dans le vieux parc solitaire et glacé, Deux formes ont tout à l'heure passé. Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles, Et l'on entend à peine leurs paroles. Dans le vieux parc solitaire et glacé, Deux spectres ont évoqué le passé. — Te souvient-il de notre extase ancienne ? — Pourquoi voulez-vous donc qu'il m'en souvienne? — Ton cœur bat-il toujours à mon seul nom ? Toujours vois-tu mon âme en rêve — Non. — Ah ! les beaux jours de bonheur indicible Où nous joignions nos bouches ! — C'est possible.  

— Qu'il était bleu, le ciel, et grand, l'espoir! — L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir. Tels ils marchaient dans les avoines folles (1), Et la nuit seule entendit leurs paroles. VERLAINE, Les Fêtes Galantes (1869). Note : (1) L'auteur joue ici sur le nom te folle avoine, qui désigne une variété d'avoine sauvage, commune dans les lieux incultes.

S'appuyer toujours sur une description précise du texte. Ne pas partir du principe que tout est évident : montrer, au contraire, qu'on a su observer la facture du poème. Et la mettre, bien entendu, en relation avec son contenu ou sa thématique.    Dans le titre, le mot colloque signifie conversation, entretien, avec une légère nuance d'ironie, et il est allié à l'adjectif sentimental : il faudra examiner en quoi le poème accomplit le «programme« du titre.   

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« Dans le dialogue, nul n'est nommé, mais des rôles se différencient : l'un pose des questions, évoque le passé, tentede raviver sa présence, l'autre répond et anéantit tout espoir dans l'indifférence et l'oubli (peut-être aussi ledésespoir : vers 14).

Dans les strophes 5 et 6, le contraste est saisissant entre la longueur de la réplique du premier (deux questionspressantes, une exclamation lyrique) et la brièveté des réponses du second.

Ici Verlaine désarticule le décasyllabepour le plier aux exigences « prosaïques » du dialogue.

L'effet dramatique en est amplifié.

On relève, bien sur, lesmots du vocabulaire de l'amour : extase, cœur, âme, rêve, bonheur, espoir, et le contraste entre ces évocations etcelles des premières strophes (lèvres molles/nous joignions nos bouches), contraste relancé par les derniers vers(ciel bleu/nuit).

Noter aussi l'expressivité du chiasme aux vers 13 et 14 : bleu, le ciel, grand, l'espoir/espoir vaincu,ciel noir.

Tous ces procédés tendent à souligner le caractère irrémédiable de la mort de l'amour.

On comprend icil'ironie morbide du titre : ce colloque sentimental prononce la fin du sentiment. Le cadre est à l'image de l'âme des partenaires : glacé, non cultivé (avoines folles), solitaire. Le dernier vers rappelle le quatrième, comme si la nuit elle-même nous rapportait ce dialogue surpris, qui s'enfonce àson tour dans l'oubli. POUR L'ORGANISATION DU COMMENTAIRE L'introduction peut tirer parti du titre pour souligner le relatif paradoxe de ce colloque «sentimental», et annoncerque le commentaire s'efforcera d'en décrire les modalités. Les indications données par le libellé sont alors utiles et suggèrent l'organisation suivante : I.

Le cadre et le climat du «colloque»... où l'on évoquera les éléments descriptifs, le vocabulaire et les figures essentielles (répétitions, rythmes). II.

Le dialogue... distinction des rôles, contrastes, effets dramatiques dans le contenu et le rythme. III.

Le paradoxe du poème... la mort de l'amour, le colloque sentimental comme moment de souffrance, la répétition et l'irrémédiable ou larépétition de l'irrémédiable (on peut penser que ces spectres hantent chaque nuit le parc de leurs amours mortes),le lyrisme et l'ironie. Souligner la simplicité apparente des procédés utilisés par Verlaine, dissimulant une extrême sophistication del'expression poétique.. »

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