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COLPORTAGE (littérature de)

Publié le 21/02/2019

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COLPORTAGE (littérature de). C'est une littérature caractérisée avant tout par son mode de diffusion et pas nécessairement par son format (livre de poche). En effet, au contraire du reste des ouvrages diffusés, les romans de chevalerie et quelques autres livres les plus anciens du fonds resteront longtemps d'un format presque carré (18 X 20 cm environ) pour permettre la réutilisation de gravures sur bois datant des débuts de l'imprimerie et, plus tard, leur copie, généralement malhabile, en respectant les dimensions du modèle. Le tout cependant assez mal imprimé sur un très mauvais papier, dit « papier à chandelle », ce qui montre assez que l'on visait à l'économie des moyens avant la maniabilité.
 
Ces livres sont vendus par l'intermédiaire des merciers ambulants, plus ou moins vagabonds, que l'on nommait mercelots, mercerots, mais aussi bisouarts, ou bisoards, — à cause de la grosse étoffe bise de leur costume — et porte-paniers ou porte-balles. Le terme de colporteur paraît à l'origine réservé à ceux qui portaient leur étalage sur la poitrine, suspendu au col, et qui, dans Paris, étaient plus particulièrement spécialisés dans la vente des livres, délaissant la mercerie ordinaire. Diverses ordonnances du xviiie s. les représentent vendant « dans les maisons parti
 
culières, les hôtelleries, les cabarets, les cafés et même par les rues où ils débitent à des étalages de livres sur les ponts, quais, parapets, carrefours et places publiques », ce malgré le petit nombre d'autorisations réglementaires. Jacques Savary des Brûlons, dans son Dictionnaire universel de commerce (1723), les montre courant la campagne avec sur le dos une caisse légère remplie de mercerie qu'ils vendent dans les villages. Si l'on en croit l'Histoire de Catherine Cuisson qui colportait du comte de Caylus, dans Paris même, une certaine forme de colportage à domicile de livres sans privilèges ou contrefaits s'accommodait fort bien de ce qu'il était convenu de nommer le commerce de la galanterie, tout comme celui des marchandes à la toilette plus ou moins entremetteuses ou prostituées. De son côté, la chanson populaire peint les mercelots comme de joyeux drilles, francs buveurs et grands trousseurs de filles. Le conte folklorique en fait de rusés coquins, plus habiles que renards, et vivant plus souvent qu'il n'est besoin de volailles dérobées aux paysans et autres menus larcins. La tradition argotique qui remonte au xvie s., d’après la littérature de colportage elle-même, déclare que des mercelots ruinés et dévoyés ont été les initiateurs de l'argot des truands. Dans les villes d'importance, ou donnant lieu à de grandes foires annuelles, ils sont en butte à l'hostilité et aux persécutions de la corporation des libraires soucieuse de préserver ses privilèges, mais ils jouissent apparemment de la complicité des merciers grossiers — ou grossistes — qui les pourvoient en marchandises de toutes sortes, y compris des livres dépassant les normes tolérées, malgré interdictions et saisies.
 
La vente de livres par le colportage est attestée dès le xvie s. Malgré une législation répressive, souvent répétée, non pas tant peut-être par crainte de la diffusion d'ouvrages vraiment subversifs, qui trouvaient toujours à se propager, que de livres hors du courant commercial légal, le colportage des livres ne fait que prospérer jusqu'au xviiie s. C'est ainsi qu'un fait commercial, sinon économique, devient un fait culturel, doublement marginal à la culture dominante mais dont il est souvent difficile d'estimer l'impact exact sur la masse populaire.
 
La Révolution rendit le colportage libre. Le premier Empire ne s'embarrassa guère de légalité mais préféra contrôler la source, c'est-à-dire les imprimeurs, en accordant un monopole exorbitant à quelques-uns d'entre eux (à Paris les 400 imprimeurs furent réduits à 60 par un décret de 1810). La Restauration commença à mettre au point un système plus efficace de contrôle de la diffusion des livres. Les obstacles iront ainsi croissant jusqu'au second Empire. À partir de 1852, les colporteurs sont tenus à l'estampillage des Livres au siège de la préfecture de chaque département où ils exercent leur activité, de façon qu'ils puissent attester à toute réquisition de la gendarmerie que ces livres sont bien sur la liste des ouvrages autorisés. Moyennant ces conditions, on estime officiellement le nombre des livres ainsi diffusés à 9 millions d'exemplaires.
 
Une clientèle composite. La clientèle du colportage ne peut être considérée comme un bloc. Au xvie s., elle n'est guère différenciée de celle de la librairie : elle est formée de gens de robe, titulaires d'offices, propriétaires terriens, marchands enrichis, sortis il y a peu de générations du menu peuple de la bourgeoisie artisanale et commerçante, mais aussi d'une petite noblesse provinciale d'ailleurs liée à la nouvelle bourgeoisie terrienne. À partir du xviie s., le public des lecteurs se diversifie et le colportage devient de plus en plus populaire. Au xviiie s., il pénètre dans les chaumières, chez les paysans aisés et même moins aisés : ceux qui savent lire suffisamment font la lecture à la veillée. En même temps, il s'étend davantage dans le petit peuple des villes parmi les petits artisans et compagnons, qui expriment parfois leur misère en de naïfs poèmes qui entrent dans le bagage du colporteur.
 
Au xix® s., parallèlement aux petits opuscules traditionnels répandus sous le nom de « Bibliothèque bleue » (les ro
 
mans de chevalerie ayant souvent été réduits eux-mêmes en petits formats), le fond de colportage s'augmente d'œuvres de format toujours très réduit (9 x 14 cm et en dessous), mais de 200 à 250 pages. Le succès d'une œuvre ne se mesure pas au chiffre des tirages — inconnu et incontrôlable, d'ailleurs — mais au nombre d'éditeurs qui la publient en contrefaçons, souvent de très mauvaise qualité. Et, comme il a toujours été de tradition chez les imprimeurs de livres populaires, on tire des exemplaires jusqu'à usure et écrasement des plombs, quitte à en rendre parfois la lecture difficile. Par leur prix (un franc et plus), ces livres ne peuvent cependant atteindre que la petite et moyenne bourgeoisie, surtout en province, tandis que la Bibliothèque bleue, avec ses petits opuscules à quatre sous, de plus en plus minces, demeure l'apanage du petit peuple paysan, artisans et compagnons. Un examen du contenu de la Bibliothèque bleue montre que le niveau de culture des lecteurs se situe en général en marge de l'inculture, ou plus précisément d'une culture de tradition orale caractérisée par des éléments de création ou de recréation populaire souvent grâce à des apports venus justement de la littérature de colportage.
 
Un catalogue utilitaire. Dans la boîte du colporteur se trouvent toutes sortes de livres de piété mais aussi d'enseignement à l'usage des écoles des frères et des écoles de charité qui se tenaient sous la direction du diacre maître d'école bien avant l'enseignement obligatoire. Ainsi, vers 1740, parmi d'autres livres de dévotion en même temps que d'enseignement, tels psautiers, petits offices, vie de Jésus, vies de saints, cantiques, noëls, sans oublier la Grande Danse macabre reproduite avec sa série de bois gravés, comme en bande dessinée, depuis 1485, on peut remarquer des A. B. C. en feuilles de parchemin, des Livres d'arithmétique élémentaire, un Avis salutaire aux pères et mères pour l'éducation des enfants et la très curieuse Civilité puérile et honnête avec ses caractères bizarrement contournés, dits « caractères de civilité », qui ont souvent servi de

« qu'un fait commercial, sinon économi­ que, devient un fait culturel.

doublement marginal à la culture dominante mais dont il est souvent difficile d'estimer l'impact exact sur la masse populaire.

La Révolution rendit le colportage libre.

Le premier Empire ne s'embar­ rassa guère de légalité mais préféra contrôler la source, c'est-à-dire les imprimeurs, en accordant un monopole exorbitant à quelques-uns d'entre eux (à Paris les 400 imprimeurs furent réduits à 60 par un décret de 181 0).

La Restaura­ tion commença à mettre au point un système plus efficace de contrôle de la diffusion des livres.

Les obstacles iront ainsi croissant jusqu'au second Empire.

À partir de 1852, les colporteurs sont tenus à l'estam pillage des livres au siège de la préfecture de chaque département où ils exercent leur activité, de façon qu'ils puissent attester à toute réquisi­ tion de la gendarmerie que ces livres sont bien sur la liste des ouvrages autorisés.

Moyennant ces conditions, on estime officiellement le nombre des livres ainsi diffusés à 9 millions d'exemplaires.

Une clientèle composite.

La clientèle du colportage ne peut être considérée comme un bloc.

Au XVI• s., elle n'est guère différenciée de celle de la librairie : elle est formée de gens de robe, titulaires d'offices, propriétaires terriens, mar­ chands enrichis, sortis il y a peu de générations du menu peuple de la bour­ geoisie artisanale et commerçante, mais aussi d'une petite noblesse provinciale d' ailleurs liée à la nouvelle bourgeoisie terrienne.

À partir du XVII• s., le public des lecteurs se diversifie et le colportage devient de plus en plus populaire.

Au XVIII• s ..

il pénètre dans les chaumières, chez les paysans aisés et même moins aisés : ceux qui savent lire suffisamment font la lecture à la veillée.

En même temps, il s'étend davantage dans le petit peuple des villes parmi les petits artisans et compagnons.

qui expriment parfois leur misère en de naïfs poèmes qui entrent dans le bagage du colporteur.

Au XIX" s., parallèlement aux petits opuscules traditionnels répandus sous le nom de « Bibliothèque bleue » (les ro- mans de chevalerie ayant souvent été ré­ duits eux-mêmes en petits formats), le fond de colportage s'augmente d'am­ vres de format toujours trés réduit (9 X 14 cm et en dessous), mais de 200 à 250 pages.

Le succès d'une œuvre ne se mesure pas au chiffre des tirages - inconnu et incontrôlable, d'ailleurs - mais au nombre d'éditeurs qui la publient en contrefaçons, souvent de très mauvaise qualité.

Et, comme il a toujours été de tradition chez les impri ­ meurs de livres populaires, on tire des exemplaires jusqu'à usure et écrasement des plombs, quitte à en rendre parfois la lecture difficile.

Par leur prix (un franc et plus), ces livres ne peuvent cependant atteindre que la petite et moyenne bour­ geoisie, surtout en province.

tandis que la Bibliothèque bleue, avec ses petits opuscules à quatre sous, de plus en plus minces.

demeure l'apanage du petit peuple paysan, artisans et compagnons.

Un examen du contenu de la Bibliothè­ que bleue montre que le niveau de culture des lecteurs se situe en général en marge de l'inculture, ou plus précisé­ ment d'une culture de tradition orale caractérisée par des éléments de créa­ tion ou de recréation populaire souvent grace à des apports venus justement de la littérature de colportage.

Un catalogue utilitaire.

Dans la boite du colporteur se trouvent toutes sortes de livres de piété mais aussi d'enseigne­ ment à l'usage des écoles des frères et des écoles de charité qui se tenaient sous la direction du diacre maitre d'école bien avant l'enseignement obligatoire.

Ainsi, vers 1740, parmi d'autres livres de dévotion en même temps que d'enseigne­ ment, tels psautiers, petits offices, vie de Jésus, vies de saints, cantiques, nol!ls, sans oublier la Grande Danse macabre reproduite avec sa série de bois gravés, comme en bande dessinée, depuis 1485, on peut remarquer des A.

B.

C.

en feuil ­ les de parchemin, des Livres d'arithméti­ que élémentaire, un A vis salutaire aux péres et m.éres pour l'éducation des enfants et la trés curieuse Civilité puérile et honnéte avec ses caractères bizarre­ ment contournés, dits « caractères de civilité », qui ont souvent servi de. »

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