Comment les auteurs mettent-ils en scène leurs premiers pas dans l'existence?
Publié le 29/08/2014
Extrait du document
Analyse du corpus Au premier abord, ce corpus semble être composé de trois textes autobiographiques présentant un point commun thématique : les auteurs y relatent leur naissance et leurs premiers jours. Toutefois, le premier texte est un roman (soyez toujours attentif au paratexte* !) dans lequel l'auteur imagine une rencontre avec un marin qui lui aurait confié son autobiographie. Cette rencontre est sans doute fictive et, en tout cas, le texte 1, Le Négrier, Aventure de la nier, ne respecte pas le pacte autobiographique (l'auteur n'est pas le narrateur-personnage). Ce corpus présente une autre difficulté : comment peut-on se souvenir de ses premiers jours ? Devant les lacunes de la mémoire, doit-on inventer ? se fier aux autres, ceux qui se souviennent ? Les textes demandent donc une réflexion sur le pacte de sincérité. |
Chateaubriand et Beauvoir inaugurent leur autobiographie* par te récit de leur naissance et de leur petite enfance. De même, Corbière, qui dit s'être contenté de mettre un peu d'ordre dans le manuscrit autobiographique d'un «forban«, laisse place au récit des premiers pas du narrateur dans l'existence. Nous allons étudier comment les auteurs les mettent en scène.
«
l...es questions
Ces récits mettent tous en scène les mêmes éléments : la naissance (texte 1 :
«ma mère accoucha de nous après sept mois de grossesse», l.
7; texte 2 :
«J'étais presque mort quand je vins au jour», l.
17; texte 3: «Je suis née à quatre
heures
du matin, le 9 janvier 1908», l.
1]; le cadre de la petite enfance (texte 1 :
«la frégate», l.
6, «En arrivant à Brest», l.
8; texte 3 : «L'appartement était
rouge, rouges
la moquette, la salle à manger Henri Il, la soie gaufrée qui masquait
les portes
vitrées»]; et les relations avec les proches.
Le jeune marin expose
l'affection
de son père à son égard («Mon père voulut qu'on m'appelât comme lui,
Léonard», l.
14] et sa relation avec son frère («Quand on l'attaquait, je me battais
pour lui{...].
Quand j'étais puni, il faisait mes pensums», l.
19-20]; Chateaubriand,
fidèle à son extrait de baptême, évoque surtout ses parrains(« mon frère», l.
16]
et marraine («la comtesse de Plouër», l.
17]; Beauvoir est plus exhaustive puis
qu'elle décrit successivement ses rapports
avec tous les membres de son entou
rage :
sa sœur («J'avais une petite sœur», l.
1 0-11].
Louise, sa gouvernante
(« C'est à Louise que j'ai dû la sécurité quotidienne», l.
19].
sa mère et son père,
plus
distants(« Ma mère, plus lointaine et plus capricieuse», l.
27; «Quant à mon
père,
je le voyais peu», l.
33].
Ainsi, l'évocation des premiers pas dans l'existence
passe par quelques lieux communs.
Enfin, pour
le jeune marin et pour Chateaubriand, mettre en scène son en
fance, c'est poser des jalons pour son avenir
et pour la suite de son autobiogra
phie*.
Le jeune marin raconte ses premiers pas dans l'existence sur le registre*
comique,
en de courts paragraphes, ce qui donne vigueur et dynamisme à son
ouverture.
De plus, il fait de sa naissance sur une frégate et de son baptême mou
vementé
(«je passai ma petite tête dans un trou de boulet que le pavillon qui nous
servait
de lange avait reçu dans un combat mémorable», l.
12-13] les signes de
sa vocation maritime : «je ne pourrais faire autrement que d'être un jour une
des gloires
de la marine française» (l.
14-15].
Naissance et petite enfance font de
lui un marin et ce récit initial laisse présager au lecteur une autobiographie* à
l'image d'un roman d'aventures.
Chateaubriand place au contraire sa naissance
sous
le signe de la mort («aversion pour la vie», l.
11 ; «tristesse», l.
19; « infli
gea la vie», l.
21; «infortuné», l.
22; «malheurs», l.
23] et fait de cette couleur
sombre
la couleur de sa vie («Le Ciel sembla réunir ces diverses circonstances
pour placer dans mon berceau une image de mes destinées», l.
23-24].
Ainsi, les
premières évocations
de l'autobiographie* ont une fonction programmatrice.
Les auteurs mettent
en scène leurs premiers pas dans l'existence grâce à des
ressources extérieures, évoquent
un certain nombre de lieux communs, et lisent
dans
leur enfance les signes avant-coureurs de leur destinée, comme le lecteur y
lit une annonce de ce que sera l'autobiographie*..
»
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