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COMMENTAIRE COMPOSÉ On vit alors une chose superbe... Nana ! Nana ! Nana ! Le cri montait dans la gloire du soleil, dont la pluie d'or battait le vertige de la foule. Nana (Livre de poche, pp. 348-349, Ch. XI)

Publié le 12/01/2015

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Troisième partie : Impressionnisme et expressionnisme Sans aucun doute, Zola cherche ici l'équivalent des techniques impressionnistes qui défont les contours, diluent les formes dans un flou vaporeux où vibre le mouvement. La médiation de la peinture, celle, en particulier, de Degas, apparaît clairement dans ce « tremblement de l'air » qui semble mettre « la flamme invisible d'un brasier au-dessus de ce tas vivant ». Mais, par-delà la rapidité de la touche impressionniste qui indique sommairement, dans l'indistinction des « petites figures détra quées la gestuelle de quelques silhouettes aux « bras tordus », par delà le pointillisme qui réduit les visages aux « points noirs des yeux et de la bouche ouverte ii, c'est l'expression de l'idée fixe, le détraquement des individus mécanisés par le nombre, par leur immersion dans la « marée » de la foule, qui se donne à voir : « Les femmes brandissaient leurs ombrelles ; des hommes sautaient, tournaient en vociférant ; d'autres, avec des rires nerveux, lançaient des chapeaux ». Bref, une véritable hystérie collective, qui tient de la transe sacrée et du délire pro-fane, « un enthousiasme fou s'empare de Longchamp.

« brèves notations d'attitudes ou de mouvement : "Price, debout sur les étriers, la cravache haute, fouaillait Nana [ ...

], il la soutenait, il la portait, trempée d'écume, les yeux sanglants '" La tension de la volonté se lit dans la séparation inattendue du sujet et du verbe de la première propo­ sition comme l'union, voire la confusion du jockey et de la pouliche dans l'apposition (" trempée d'écume, les yeux sanglants ") qui, malgré l'orthographe et la grammaire, semble concerner Price, le sujet, autant que Nana, le complément d'objet.

Avec un art qui lui est propre, Zola suggère la vitesse : les virgules insistent sur les scansions régulières qui sont celles du galop lui-même en coupant les phrases en parties égale­ ment nerveuses, rapides, fébriles, et les instantanés d'impressions se chevauchent, se donnent dans le désordre du temps vécu : suivi un moment dans la précision de sa technique, le favori est bientôt emporté dans l'indistinction de la course dont on entend, grâce à l'allitération en R et aux assonances en OU, le "train passer avec un roulement de foudre", sans rien percevoir d'autre qu'un élan confus" coupant les res­ pirations, balayant l'air'" L'arrivée est si fulgurante que " l'immense acclamation ,, de la foule " retentit ,, avant qu'on ne comprenne : " Price venait de jeter Nana au poteau, battant Spirit d'une longueur de tête"· Deuxième partie : Une course au plaisir et au profit On peut certes relever le symbolisme sexuel de cette scène où le joc­ key, " la cravache haute ", "fouaillant ,, Nana, chevauche la femme­ jument, mais l'articulation des trois noms, surtout, fait sens : Nana, la prostituée, Price, le "prix"• Spirit, " l'esprit'" " Nous mettons toutes sortes d'intentions littéraires dans les noms"• écrivait Zola.

Faut-il donc voir dans cette victoire celle du naturalisme (Nana) balayant " le pantin métaphysique ,, (Spirit) ? Sans doute.

Pourtant, au delà du manifeste, on peut lire la dénonciation du règne de la chair et de l'argent : Nana, la bête humaine vendue à prix d'or, bafoue toutes les valeurs morales, cul­ turelles et intellectuelles, à l'image d'un régime détesté dont elle condense tous les vices, et d'abord le goût des courses.

Venues d'Angleterre, ces compétitions sont un phénomène nouveau sous le Second Empire et Zola fait de ces machines vivantes défiant le temps le symbole même de la course au profit.

Il voit dans ces chevaux transportant des millions au rythme de leurs sabots le symbole ludique de la spéculation boursière, des "valeurs ,, de nerfs et de sang, sur lesquelles on parie à la hausse ou à la baisse, au milieu de la fièvre du jeu : " la pluie 117. »

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