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Commentaire « De l’esclavage des nègres » de Montesquieu

Publié le 18/06/2023

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« Commentaire « De l’esclavage des nègres » de Montesquieu « Le droit d’esclavage est nul, non seulement parce qu’il est illégitime, mais parce qu’il est absurde et signifie rien.

Ces mots, esclavages et droit, sont contradictoires ; ils s’excluent mutuellement.

» - Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, 1762 Jean-Jacques Rousseau, Voltaire, Denis Diderot et Voltaire font partis du mouvement des Lumières.

Ils incarnent les figures de proue françaises de cette révolution éclairée.

Ce mouvement ne se limite pas uniquement à la littérature et à la philosophie mais également à la science et la société. Cette vague est européenne et s’implante notamment en France, Grande Bretagne et Allemagne amenant à de grandes découvertes comme la gravité avec Isaac Newton.

L’objectif est simple éclairer le monde, promouvoir le savoir et rendre accessible la connaissance.

L’Encyclopédie est le gargantuesque projet de Diderot et d’Alembert, une œuvre de 28 volumes rassemblant les connaissances, les travaux et les avancées de tous les domaines du XVIIIe siècle.

Celle-ci devrait favoriser l’accession au savoir au peuple mais aussi laisser une trace du travail accompli aux générations futures.

Cette œuvre de grande envergure est le symbole le plus significatif de la volonté des Lumières.

Les philosophes des Lumières soutiennent la liberté, et l’égalité.

Ainsi, l’esclavage et sa notion de « droit » est au cœur du débat politique en 1748.

La traite négrière est une réalité économique forte, atteignant son apogée au XVIIIe siècle.

Tous les pays européens sont impliqués dans ce système esclavagiste car souvent propriétaires de colonies aux Antilles ou aux Amériques.

Le mouvement des Lumières dénonce cette pratique.

Dans les Lettres Persanes écrites en 1721 et De l’Esprit des Lois écrit en 1748, ce sont les principales œuvres de Montesquieu dans lesquelles il dénonce entre autre l’esclavage.

Nous étudierons un extrait de ce texte s’intitulant « De l’Esclavage des Nègres » dénonçant l’esclavage sous des traits subtils à l’attention d’un public averti.

« Comment Montesquieu déguise son opinion aux yeux et la barbe de ses opposant, les poussant à utiliser son argumentaire pour justifier leurs actes ? ».

Tout d’abord, Montesquieu semble un fervent adepte de la thèse esclavagiste mais ses mots sont choisis et chargés d’ironie, enfin il est un philosophe des Lumières. Dans un premier temps, nous verrons que Montesquieu écrit un plaidoyer soutenant la thèse esclavagiste, mais ce n’est qu’une vitrine.

Il garde tous de même une certaine distance avec ses propos. C’est un plaidoyer à l’apparence pro esclavagiste.

Il utilise de nombreux arguments de registres différents accentuant la véracité de ses propos. Montesquieu se pose en porteur de la thèse esclavagiste en s’inscrivant dans un groupe avec le « nous » présent dès le début du texte.

S’ajoute à cela que la notion de droit « le droit que nous avons eu de rendre les nègres esclaves » présent également dès la première phrase du texte rappelle à son lecteur que l’esclavage est une pratique reconnue et acceptée juridiquement.

Les esclavagistes ne sont donc pas dans le tort.

Son avis prend un poids important dans les esprits car il appartient à un collectif qui le soutient.

Puis il débute son argumentaire esclavagiste avec une tournure présentative « voici ce que ».

Son premier argument est historique, il s’appuie sur des faits prouvés, permettant subtilement de crédibiliser ses dires.

Lorsqu’il écrit que « Les peuples d’Europe […] ont dû mettre en esclavage ceux de l’Afrique », Montesquieu montre une nécessité de la mise en esclavage.

Aucune autre alternative n’était possible.

Les européens sont également positionnés comme des victimes de cette situation se déresponsabilisant de ce choix car ils ont été contraints par la situation.

Cet argument s’appuie sur un débat politique et religieux en 1550 par Charles Quint, concernant la mise en esclavage des populations amérindiennes.

En reprenant des arguments de Sépulvéda, les Amérindiens doivent être dominés par une puissance éveillée, religieuse et socialisée.

Les habitants du Nouveau Monde sont dépeints comme des êtres attardés, primaires et pleutres.

Puis, suite à la décimation massive des Amérindiens causée par les maladies européennes et les massacres, les noirs ont dû être mis en esclavage.

Montesquieu use de termes péjoratifs « nègres » et supérieur « esclave », « s’en servir », où l’esclave est déshumanisé et transformé en objet ou en bête de trait.

Montesquieu reprend une autre affirmation de Sépulvéda selon laquelle les Amérindiens sont prédestinés à être des esclaves.

Il use d’une argumentation théologique et d’autorité, où Dieu aurait choisi de les créer ainsi « Dieu, qui est un être très sage […](n’) ait mis une âme […] dans un corps tout noir ».

La dernière référence à la controverse de Valladolid est qu’on ne peut pas esclavager un peuple qui a une âme.

Cela convient à la thèse avancée par Montesquieu, les noirs n’ont pas d’âme.

La bascule entre homme et nègre est présente ici « il est impossible que nous supposions que ces gens-là soient des hommes ». L’homme possède une âme alors que le nègre non mais l’analyse va plus loin, les européens sont supérieurs aux africains.

Cela va jusqu’à la priorisation des habitudes futiles européennes : l’utilisation du sucre aux esclaves.

Ces derniers sont, par l’argument théologique, un mauvais présage par la couleur de leurs peaux comme le chat noir mais également une simple transaction corporel proche du bétail moins important que le sucre.

Tous les chrétiens se doivent de rejeter l’humanité des noirs. Montesquieu garde une certaine distance avec ses dires.

Son insertion dans un groupe conquit est rapidement coupé court.

Il se dissocie aussi vite de ce groupe comme le montre les pronoms impersonnels « on » et « ils ». Ces propos sont camouflés dans une foule de personnes, indistinctes les unes des autres.

L’ambiguïté de ses mots sont exposés dès la première phrase, dont la compréhension est multi scalaire « Si j’avais à soutenir » et « voici ce que je dirais ».

Montesquieu peut alors exposer des arguments dans la possibilité où il devrait soutenir la thèse esclavagiste, comme les exercices en fac de droit de l’avocat du diable.

Le conditionnel « je dirais » exprime la possibilité.

Une autre compréhension est possible, dans l’alternative où Montesquieu serait pro esclavagiste voici ce qu’il pourrait avancer comme argument.

Cependant, pour un public averti, il sous-entend qu’il n’est pas pro esclavagiste. Similaire à l’œuvre de Gargantua, le texte de Montesquieu à plusieurs niveaux de lectures pour un lectorat habitué et prêt à comprendre.

Il semble écrire tous un plaidoyer pour l’esclavage mais ses arguments sont contre l’esclavage si on arrive à lire entre les lignes. En effet les mots sont choisis avec grand soin.

Son écrit est chargé d’ironie et d’humour.

Il est évident que la seule imagination de la déconcertassions d’un pro esclavagiste à cette lecture est amusante, certains d’entre eux utilisent même ce texte pour asseoir leurs actes.

Il se moque de ses propres arguments. Son argumentation repose sur une rigueur et une logique infaillible. Son texte est morcelé en 9 paragraphes clair et distincts.

Cela démontre à son lecteur que ses arguments sont concis, simple et clair comme de l’eau de roche.

Il va à l’essentiel sans, à priori, perdre son lecteur.

Montesquieu avance pas à pas avec son lecteur, il expose ses arguments de manière fluide.

Ce sont essentiellement des phrases juxtaposées amenant un effet de logique implicite.

Les termes utilisés rappellent une démonstration scientifique « voici », « une preuve que ».

Il donne l’impression que ces arguments ont été testé et prouvé par quelque chose de rationnel comme la science.

Celle-ci a un effet de véracité générale, d’arbitre de plus en plus forte depuis la naissance des Lumières.

De plus, il use d’un schéma mathématique de cause / effet semblant logique.

Dans le deuxième argument « le sucre serait trop cher », si « l’on ne faisait travailler […] des esclaves », ainsi l’esclavage est justifié car si des personnes étaient rémunérées pour ce travail, le prix du sucre serait en hausse.

Il faut donc que ce soit des esclaves qui exécutent ce travail.

Enfin il utilise des tournures de phrases souhaitant faire admettre une idée énoncée avant de la justifier comme « Il est si naturel de penser que c’est la couleur qui constitue l’essence de l’humanité ».

Cette phrase est énoncée également de manière que nous ne puissions pas remettre en cause ce qui a été émis. La couleur de peau est donc l’essence de l’humanité. Montesquieu écrit un texte contraire aux premiers abords de ce qu’il pense en glissant subtilement son propre avis.

Pour cela, il use de l’ironie dont le propre est d’adhérer de manière illusoire à une proposition afin de montrer le décalage entre cette idée et la réalité mais surtout entre l’avis de la proposition et notre opinion.

C’est donc ce que fait Montesquieu tout au long du texte.

Il suggère systématiquement le contraire de ce qu’il dit.

Dans le paragraphe 4, il énonce que Dieu n’aurait pas pu mettre une âme dans un corps noir mais l’ajout de « surtout une âme.... »

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